C'est un «choc vagal» que le ministre des Transports, Sylvain Gaudreault, a eu en constatant l'ampleur des extras toujours facturés sur les grands chantiers du Québec. Pour y remédier, il prend les grands moyens, a appris La Presse. Il commandera très bientôt une vérification externe pour examiner tous les coûts additionnels exigés dans la dernière année à son ministère.

Selon une compilation de La Presse, plus de 30 millions de dollars en extras ont été facturés au ministère des Transports (MTQ) dans les huit premiers mois de l'année 2012-2013.

La décision a été prise hier. La firme n'a pas encore été sélectionnée. Son mandat s'appliquera aussi aux coûts additionnels exigés depuis avril 2012 à la Société immobilière du Québec, au Centre de services partagés du Québec et à Infrastructure Québec. On pourrait élargir le mandat en cours de route pour remonter plus loin dans le passé.

M. Gaudreault espère recevoir le rapport d'ici quelques mois. «Il n'est pas exclu qu'on fasse par la suite des recours pour récupérer de l'argent, s'il s'avère que des procédures ont été viciées», annonce-t-il.

Le ministre dit avoir «halluciné» en apprenant que, le 20 septembre, quelques heures après sa nomination, son ministère a accordé un extra de 2,5 millions de dollars à Louisbourg SBC, alors liée à Tony Accurso, pour un contrat d'une valeur initiale de 4,6 millions. En se préparant pour l'étude des crédits dans les dernières semaines, il dit avoir pris connaissance de tous les «coûts additionnels» accordés par son ministère. «Ça m'a jeté à terre», raconte-t-il.

Dans la description des motifs, on justifie souvent la demande en invoquant des «contrôles additionnels», la «surveillance additionnelle» ou la «modification au concept initial». Les demandes sont souvent faites par des entreprises de génie-conseil comme Genivar, Roche, Dessau, Cima+ et BPR.

Manque d'expertise

M. Gaudreault regrette que le ministère des Transports ne soit pas toujours outillé pour savoir quelles demandes sont justifiées et lesquelles pourraient être liées aux pratiques mises en lumière à la commission Charbonneau. Le rapport de l'Unité anticollusion a lui aussi déploré la perte d'expertise au MTQ, qui le rend vulnérable aux extras non justifiés.

«Je veux un oeil externe sur les coûts additionnels accordés. Il faut savoir ce qui est justifié et ce qui aurait pu être prévu pour évaluer les futurs budgets des routes. Si j'annonce une route pour un montant précis, il faut que ça coûte ça. Désormais, on va dire ce qu'on fait, et on va faire ce qu'on dit.»

M. Gaudreault avoue que le Ministère a actuellement une certaine «impuissance». «Quand on parle de surveillance additionnelle, c'est pour moi un argument de plus en faveur de la création d'une agence des transports qui permettrait de rebâtir l'expertise dans l'État.»