Des carrés verts incitent leurs sympathisants à poursuivre leur association étudiante aux petites créances pour se faire rembourser leur session, à la suite de la victoire cette semaine de Marc-Antoine Dumas.

M. Dumas complétait sa quatrième session en histoire à l'Université Laval en février 2012 quand son association étudiante a voté pour la grève. Les grévistes ont fait du piquetage et les cours ont été annulés.

«J'ai attendu jusqu'à la date limite, le 19 mars, pour annuler ma session sans avoir un échec», raconte-t-il.

Il n'aurait pas pu reprendre ses cours l'été sans perdre son emploi d'été en terrassement, un emploi de plus de 50 heures par semaine en fonction duquel son budget était calculé. Il a poursuivi son association étudiante à la chambre civile des petites créances. Il avait conservé les tracts et courriels du comité de mobilisation de son association étudiante qui coordonnait entre autres le piquetage. Les professeurs appuyaient les étudiants et refusaient de donner un cours s'il y avait un piqueteur.

Le juge Daniel Bourgeois a ordonné que l'association rembourse 1220 dollars à M. Dumas. Il a donné raison au plaignant, qui plaidait que les associations étudiantes ne disposaient pas du même droit de grève que les syndicats. Leur vote ne lie donc pas tous les membres, a conclu le magistrat qui s'appuyait sur des jugements rendus entre autres par la Cour supérieure.

M. Dumas n'a pas voulu poursuivre l'Université Laval, car il la croit «plus victime que complice». «Ils étaient pris entre l'arbre et l'écorce», dit-il. Le juge Bourgeois a affirmé que l'établissement n'était pas sans reproche, mais que l'association étudiante est la principale responsable du préjudice.  

M. Dumas travaille aujourd'hui comme camionneur. «C'est pour mon foyer, pour des raisons financières, pendant que ma femme étudie. Quand elle aura terminé, je vais retourner aux études», avance-t-il. 

D'autres recours de carrés verts pourraient suivre. «J'y songe sérieusement, et c'est aussi quelque chose qu'on va encourager avec notre Fondation 1625», dit Jean-François Morasse.

Recourir aux petites créances est assez facile, ajoute-t-il.  «On doit se défendre soi-même, sans avocat. Ça coûte 103 dollars pour un dossier, ce n'est pas très cher, et il faut prouver le préjudice et imputer la responsabilité à l'association étudiante.»

M. Morasse, lui aussi étudiant à l'Université Laval, a gagné un procès contre Gabriel Nadeau-Dubois en novembre 2012. L'ex-porte-parole de la CLASSE avait été jugé coupable d'avoir incité à violer une injonction accordée à M. Morasse pour lui permettre de suivre ses cours en arts plastiques malgré la grève votée par son association étudiante. La cause a été portée en appel.

Les associations étudiantes ne craignent pas que de tels recours se multiplient. «Son emploi d'été, la façon dont la grève s'est déroulée là-bas et la date d'annulation, ce sont des circonstances particulières, je ne pense pas que ça va se répéter», dit Antoine Genest-Grégoire, président de la FEUQ. Une opinion que partage l'ASSÉ. «Nous trouvons déplorable qu'un étudiant insatisfait d'une décision de son association générale s'adresse aux tribunaux et judiciarise le conflit, lance son porte-parole Benjamin Gingras. Pour nous, la légitimité vient de la démocratie étudiante et de la volonté des membres, et non du juridique.»