La CLASSE ne veut pas attendre qu'un tribunal tranche sur la constitutionnalité de la loi spéciale du gouvernement Charest: l'association étudiante jure de la défier.

Et elle ne perdra pas de temps. Dès aujourd'hui, une grande manifestation soulignant le 100e jour de grève étudiante devrait envahir les rues de Montréal. La Coalition large de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE) ne veut pas remettre son trajet aux policiers. Elle pourrait donc être déclarée illégale dès que 50 personnes s'y seront jointes.

«Nous pensons que nos droits fondamentaux doivent prendre le dessus sur le respect d'une loi qui est injuste», a fait valoir Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole de l'organisation, en conférence de presse.

«On appelle les gens à jouir de leurs droits fondamentaux et à ne pas se laisser intimider. Le gouvernement libéral parle d'intimidation depuis le début du conflit. Mais avec un projet de loi comme ça, c'est exactement de l'intimidation, c'est faire peur.»

Cependant, d'autres organisations, dont des syndicats, participeront à cette manifestation et ils ont l'intention de se conformer aux dispositions de la loi.

S'ils entendent violer les dispositions de la loi d'exception, les élus de la CLASSE n'ont pas l'intention de s'acquitter des amendes qu'ils encourent. Selon les deux porte-parole de l'organisation, un tribunal invalidera «probablement» cette loi «dans un futur proche».

«On va examiner toutes les stratégies légales possibles», a affirmé M. Nadeau-Dubois.

Au bureau de Robert Dutil, ministre québécois de la Sécurité publique, on refuse de commenter les déclarations des porte-parole de la CLASSE. «Les lois sont là pour être respectées. Personne n'est censé y désobéir», s'est limité à dire Mathieu Saint-Pierre, attaché de presse du ministre.

Appel à la désobéissance

Si tous les dirigeants de la CLASSE se trouvaient devant les caméras à la conférence de presse d'hier, c'est pour montrer qu'ils acceptent tous d'être liés par l'appel à la désobéissance, a expliqué M. Nadeau-Dubois. En conservant leur poste, ils s'exposent à des amendes beaucoup plus élevées - jusqu'à 35 000$ plutôt que 5000$.

«On est prêts à assumer les conséquences de ce qu'on dit. Pour nous, les libertés fondamentales comme le droit de manifester, le droit d'expression, ça vaut la peine», a expliqué Jeanne Reynolds, co-porte-parole de la CLASSE.

Elle a toutefois ajouté que les manifestants anonymes doivent être nombreux à violer la loi d'exception pour rendre impossible son application.

La CLASSE a d'ailleurs mis en ligne le site ArrêtezMoiQuelqu'un.com, où il invite les étudiants et les citoyens opposés à la loi à déclarer ouvertement qu'ils ne lui obéiront pas. Des photos sont aussi diffusées afin de «faciliter la tâche aux policiers» qui voudraient arrêter ces personnes.

La conférence de presse d'hier a été organisée au parc Émilie-Gamelin, haut lieu du mouvement de contestation à Montréal. Intervenants et journalistes étaient entourés d'environ 250 militants venus appuyer les leaders étudiants.

Les fédérations préfèrent les tribunaux

Les deux fédérations étudiantes, réputées plus modérées, refusent d'appeler à violer la loi spéciale. Leurs dirigeants promettent que des avocats entameront dès cette semaine des recours juridiques pour la faire invalider.

«On ne va pas jusqu'à inviter à désobéir à la loi parce qu'on ne veut pas exposer inutilement les gens à des amendes, a expliqué Léo Bureau-Blouin. Il y a des éléments qui n'ont vraiment pas de sens dans cette loi et il faut recourir aux tribunaux.»

Le président de la FECQ souligne d'ailleurs que la CLASSE sera partie prenante à la contestation juridique.