«Assez, c'est assez!» a tonné le ministre des Finances et responsable de la métropole, Raymond Bachand. «La perturbation délibérée de l'économie de Montréal» par des «groupes anticapitalistes et marxistes» doit cesser. Il a laissé la porte ouverte à l'adoption d'une loi spéciale afin de rétablir l'ordre et de faire respecter les injonctions destinées à assurer l'accès aux collèges et universités.

Au lendemain de la démission-surprise de Line Beauchamp, le ton est plus ferme chez les libéraux. À l'entrée d'une réunion, plusieurs députés libéraux ont manifesté leur exaspération devant les manifestations à répétition, à Montréal et ailleurs. Ils ont martelé que la nouvelle ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, a le mandat de «rencontrer» les représentants des quatre associations étudiantes aujourd'hui, de «parler» et de «discuter» avec eux. Mais ils ont pris soin de ne pas utiliser le terme «négocier». «Mme Courchesne a dit qu'il n'y aurait pas de négociation», a insisté le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard.

Les libéraux ont fait savoir que la balle est dans le camp des leaders étudiants. «Je pense que quelqu'un doit prendre acte que quelque chose a changé», a indiqué M. Lessard.

Michelle Courchesne s'est refusée à tout commentaire. Elle fera rapport demain au conseil des ministres de sa rencontre avec les leaders étudiants. Le gouvernement devrait annoncer sa décision par la suite. Notons que la ministre rencontrera également les représentants des universités et des cégeps.

«Des groupes étudiants radicaux utilisent l'intimidation, la violence, je pense qu'il faut que ça s'arrête, a affirmé Raymond Bachand. Il y a des groupes radicaux qui, systématiquement, veulent déstabiliser l'économie de Montréal. Ce sont des groupes anticapitalistes, marxistes, ça n'a rien à voir avec les droits de scolarité.»

À la question de savoir si une loi spéciale est une option, il a répondu: «On va laisser Mme Courchesne rencontrer les étudiants, les dirigeants des collèges et universités. Elle va nous faire rapport, et on verra. Je pense qu'il faut que la perturbation délibérée de l'économie - et là, je ne parle pas du droit de manifester - arrête.»

Des députés ont confirmé que le recours à une loi spéciale fera l'objet de discussions. D'autres sont réticents à adopter cette mesure, comme Michel Pigeon, ancien recteur de l'Université Laval: «Il me semble qu'une injonction, ça parle par soi-même. On ne met pas une loi par-dessus une injonction... Il faut que vous demandiez aux spécialistes. Mais qu'on fasse respecter la loi, c'est la chose la plus normale du monde.»

Le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, est revenu sur les événements survenus au collège Lionel-Groulx. Rappelons que la direction a fait appel à la police pour faire respecter une injonction pour que les étudiants qui le souhaitent puissent suivre leurs cours. «C'est leur décision. Ils sont sujets, s'ils ne le font pas, à outrage au tribunal», a-t-il affirmé.

De son côté, le ministre des Transports, Pierre Moreau, a qualifié d' «inacceptable» et d'«intolérable» le blocage du pont Jacques-Cartier par des manifestants ce matin. «Je veux saluer le travail exceptionnel des policiers qui ont procédé à 19 arrestations et sont intervenus rapidement pour que ce blocage cesse», a-t-il dit.

Selon lui, «il faut arrêter de voir dans le travail des policiers un travail de violence. Les policiers font un travail exceptionnel dans des circonstances extrêmement difficiles. Quand vous avez des manifestants qui se présentent avec des pics, qui lancent des balles de billard et des briques, je pense que ça ne s'appelle pas de la négociation. Ça s'appelle des actes criminels. Les gens qui causent ces actes doivent être mis en prison».

Il a fait valoir que «la patience de tous a été mise à rude épreuve et est épuisée». «À Montréal, les gens en ont assez de cette situation-là. Si on a des revendications à faire ou des négociations à faire, on les fait sans prendre en otage l'ensemble de la population», a-t-il ajouté.

Line Beauchamp s'est rendue à la réunion des députés libéraux pour saluer ses collègues. L'ex-ministre, visiblement émue, n'a pas fait de commentaires.