Environ 200 personnes ont marché cet après-midi au départ du parc Émilie-Gamelin pour protester contre la force utilisée par la police de Montréal lors de la marche anti-capitaliste du 1er mai dernier.

La manifestation du 1er mai, organisée chaque année par la Coalition des luttes anticapitalistes, réunissait quelques centaines de personnes. Un jeune homme, Gabriel Duchesneau, aurait subi des fractures du crâne lorsque des policiers ont chargé les manifestants.

Il a dit à La Presse jeudi dernier qu'il avait tenté de fuir les lieux mais que, comme la foule était compacte et peu mobile, il a été poussé au sol et frappé à la tête.

Le SPVM a indiqué qu'il prenait au sérieux les affirmations du militant de 29 ans et qu'une enquête était en cours.

C'est en réaction à cet incident qu'un groupe appelé Cellule Para Bellum du Mouvement progressiste pour l'indépendance du Québec a organisé la manifestation d'aujourd'hui, à laquelle a d'ailleurs participé Gabriel Duchesneau.

«Je suis très ému de voir une manifestation comme ça organisée pour moi. Je manifeste depuis le début, trois fois par jour. Je vais continuer de militer pour la gratuité scolaire», a dit celui qui étudie en création littéraire à l'UQAM. Il envisage d'ailleurs de porter plainte au Comité de déontologie policière.

Si la marche n'était pas à proprement parler organisée par le mouvement étudiant, le site web de la Coalition large de l'association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE) a tout de même relayé l'invitation.

La marche s'est ébranlée vers 13h30. Au delà du cas de Gabriel Duchesneau, c'est un peu contre tout ce qu'ils qualifient de «répression policière» contre les actions des derniers jours que protestent les manifestants. Les étudiants y sont très largement majoritaires, mais des professeurs sont aussi du nombre, ainsi que le groupe des «mères en colère».

«Je ne sais plus quel mot utiliser depuis le 7 mars (NDLR: manifestation devant le 500, rue Sherbrooke Ouest, au cours de laquelle Francis Grenier avait été blessé à l'oeil)», dit Suzanne Bilodeau, dont le fils, un cégépien en grève, a été blessé au genou d'un coup de matraque, en plus d'avoir été aspergé de gaz irritant. Elle-même a participé à quelques manifestations depuis.

«On marche pour les blessés. On maltraite les enfants du peuple», a déclaré Virginie Paquette, étudiante à l'UQAM.

«On espère véhiculer que la violence est surtout dirigée envers les manifestants. Quelques vitres brisées ne valent pas des yeux brisés», renchérit sa camarade Chloé Parenteau, qui tient dans ses mains un grand miroir.

«Je vais le montrer aux policiers, pour qu'ils puissent voir leur vrai visage», a-t-elle expliqué.

«Il faut être solidaires de notre compatriote (Gabriel Duchesneau). Le message d'aujourd'hui est contre la répression policière du mouvement de rage commun. Il y a surreprésentation de la police», croit un étudiant du Collège de Maisonneuve.

Après avoir sillonné les rues du centre-ville pendant deux heures, avec notamment un arrêt devant le quartier général du SPVM, rue Saint-Urbain, le groupe a regagné son lieu de départ, le tout paisiblement.

Manifestation silencieuse pour Maxime L. Valade

Le même thème était aussi à l'ordre du jour en matinée au collège de Saint-Laurent. Un groupe, surtout composé de professeurs, a tenu une manifestation silencieuse en soutien à Maxence L. Valade, qui a perdu un oeil dans l'émeute de vendredi soir dernier à Victoriaville.

Après une longue intervention chirurgicale, il est toujours hospitalisé, dans un état stable.

Pour ces professeurs, dont certains étaient présents là-bas, il ne fait aucun doute que le jeune Valade a bel et bien reçu une balle de caoutchouc lancée par la police.

«Il est très engagé dans l'association étudiante et très discret», estime Marie Voisard, convaincue qu'il n'a pas lancé de projectile aux policiers, et qu'il est une «victime collatérale» de la manifestation. «Il était un manifestant exemplaire», a poursuivi Mme Voisard.

«C'était un gars d'une sagesse exemplaire», a ajouté Frédérique Bernier.

«Il y a eu des projectiles lancés par une très petite minorité, on ne le nie pas. Les gens qui affrontent la police vont devant. Mais derrière, nous étions des milliers de manifestants pacifiques. Mais nous les avons reçus, les gaz», déplore Marie Voisard.

Une autre enseignante du même établissement qui était à Victoriaville dit quant à elle avoir secouru une étudiante qui aurait reçu une balle de caoutchouc à la mâchoire.

«Elle avait ses dents dans un petit sac et un linge mouillé sur la bouche. Un policier est venu lui demander son identité. Elle ne pouvait même pas parler», raconte Julie-Andrée Rostan.