L'ancien ministre des Transports, Guy Chevrette, a balayé du revers de la main les allégations de Gilles Cloutier, cet ancien vice-président de la firme de génie-conseil Roche, qui l'a associé l'an dernier à une «magouille» de pot-de-vin.

«Je n'ai jamais demandé de l'argent à qui que ce soit et je n'ai jamais demandé à quelqu'un de collecter», a-t-il déclaré vendredi matin devant la commission Charbonneau.

Lors de son témoignage, Gilles Cloutier dit avoir remis, en 2001, 25 000 $ à Gilles Beaulieu, un grand ami de Chevrette, pour que Roche obtienne le contrat de la route 125 à Saint-Donat. Au départ, Beaulieu aurait demandé à Cloutier un pot-de-vin de 100 000 $ pour lui permettre d'avoir accès au ministre Chevrette. Plus tard, Beaulieu lui a expliqué que l'argent devait servir à payer un voyage avec l'ex-ministre et leurs femmes.

Fait à noter, Gilles Beaulieu a vendu sa firme à une filiale de Roche en 1999 et y travaillait pour assurer la transition au moment des faits allégués.

Un voyage à 100 000 $

Chevrette et Beaulieu sont bel et bien partis en voyage autour du monde pour 100 jours en mai 2002. «Notre objectif était de voir les sept merveilles du monde, on en a vu six», a dit Chevrette.

Selon un affidavit déposé devant la Commission, le voyage de Chevrette et de sa conjointe a coûté 49 200 $ et celui de Beaulieu et sa conjointe 49 800 $.

Comment expliquer que le voyage ait coûté exactement 100 000 $, a demandé la juge France Charbonneau. «C'est une pure coïncidence», a dit Guy Chevrette. «C'est des ramassis d'histoire qu'il a mis ensemble pour la Commission.»

Chevrette affirme qu'il a seulement envisagé de faire un tel voyage plus d'un an plus tard, en mars 2002, après avoir quitté la politique.

Guy Chevrette a aussi ajouté qu'en novembre 2001, le parti québécois lui a donné 25 000 $ à l'occasion d'une fête pour ses 25 ans au parti. Chevrette dit qu'il a utilisé la somme pour effectuer le voyage.

Chevrette ne s'est pas gêné pour attaquer Gilles Cloutier. «C'était une genre de mouche... qui n'est pas africaine», a-t-il lancé.

Lors de son témoignage, Cloutier a affirmé qu'après avoir décroché le contrat, il a rencontré Guy Chevrette. Lors de cette rencontre, Chevrette lui aurait demandé de confier le contrat de construction à «un ami commun», c'est-à-dire Pavages Desjardins.

Chevrette a nié en bloc. Il affirme qu'il a seulement rencontré Cloutier à quelques reprises lors de tournois de golf et d'un match des Expos. Cloutier n'est jamais venu à son bureau.

Chevrette défend bec et ongles la route 125

Devant la commission Charbonneau, vendredi matin, Guy Chevrette, a aussi âprement défendu la construction de la route 125, un projet qu'il a porté même si le ministère des Transports (MTQ) le considérait comme superflu.

Devant la Commission mercredi, l'ancien directeur territorial du MTQ pour la région de Laurentides-Lanaudière, Mario Turcotte a affirmé qu'il n'y avait «rien de standard» dans le projet de la route 125. Il a dit que la construction de cette route récréotouristique n'était pas une priorité du MTQ, mais plutôt d'un projet politique.

Aujourd'hui, la route 125 est peu fréquentée ce qui lui a valu le surnom de «plus belle piste cyclable du Québec».

«C'était une dépense importante, mais c'était un moteur de développement touristique pour la région de Lanaudière, qui avait peu d'accès routiers et qui était véritablement en déprime économique», a dit M. Chevrette.

Il a admis que la décision de construire la route était «politique».

«Je ne voudrais pas donner l'impression que j'ai camouflé une soumission au Conseil du trésor, ça s'est fait dans les règles, de façon clean», a-t-il toutefois ajouté.

Gilles Cloutier dit aussi avoir organisé des élections clés en main pour quatre des cinq maires des villes qui ont fait parti du comité de sélection. Chevrette dit qu'il l'a appris en écoutant la commission.