Un peu plus de cinq mois après la présentation du projet de charte des valeurs québécoises, l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ) saute dans la mêlée.

La charte est un «écran de fumée» qui vise à «camoufler» les mesures d'austérité adoptées par le gouvernement sur le plan social, politique et économique, ont conclu une majorité de membres de l'ASSÉ réunis en congrès hivernal cette fin de semaine.

Le porte-parole de l'organisation, Justin Arcand, a affirmé dimanche en entrevue avec La Presse Canadienne que cette prise de position tardive s'expliquait par le fait que bon nombre d'associations régionales n'avaient pas reçu le mandat de la part de leurs membres de se prononcer sur cette question lors du congrès de l'ASSÉ l'automne dernier.

L'ASSÉ compte s'inviter dans la prochaine campagne électorale, qui devrait être lancée sous peu, non seulement pour dénoncer la charte, mais aussi pour s'opposer à d'autres décisions du gouvernement Marois, notamment en matière d'«austérité».

L'organisation étudiante se mobilisera par des manifestations et d'autres actions, dont la nature est gardée secrète, pour forcer la main au gouvernement sur ces questions.

Les membres de l'ASSÉ sont ainsi conviés à une manifestation contre la charte et «son racisme sous-jacent» le 21 mars prochain et à un grand rassemblement national d'opposition le 3 avril, à quelques jours d'un possible scrutin au Québec.

«Il va falloir faire monter la pression et pour qu'elle monte, on va utiliser différentes stratégies un peu plus combatives. Il y a aura des perturbations, peut-être plus symboliques, mais il y aura une diversité d'actions, a fait savoir le porte-parole de l'ASSÉ. Le Parti Québécois se dit progressiste, mais en les voyant aller, on a plus des allures de Parti conservateur du Canada.»

«Instrumentaliser le féminisme»

Justin Arcand croit que la charte des valeurs «instrumentalise le féminisme». Son organisation est pour la laïcité, a-t-il insisté, mais elle estime que le projet de loi 60 n'a été proposé qu'à «des fins électoralistes».

«Le PQ se réclame du féminisme dans ce dossier, mais c'est faux. Ça va, au contraire, atteindre le droit au travail. Les gens vont-ils être obligés de démissionner pour une question de signes religieux?», a-t-il demandé.

Le porte-parole de l'ASSÉ ne comprend pas l'appui accordé aux grands principes de la charte par des groupes tels que les Janette, qui compte en ses rangs Denise Filiatrault, Denise Robert, Julie Snyder et Djemila Benhabib.

«Les femmes se sont battues pour ne plus être confinées à faire des trucs en arrière-plan. Là, on est en train de dire que si tu portes le voile, il faut se cacher. C'est à l'encontre des luttes féministes», selon M. Arcand.

Si les membres de l'ASSÉ ont adopté une position commune contre le projet de loi 60, il reste que toutes les associations n'ont pas nécessairement le même point de vue sur certains aspects de la charte.

«C'est un débat houleux et le débat n'a pas été amené de la même manière à l'UQAM ou au cégep de Matane. Matane, par exemple, est contre la charte tant qu'elle ne concorde pas avec la Charte des droits et libertés. La démocratie étudiante est longue et il y a eu bon nombre de discussions avant de trouver une position consensuelle», a indiqué M. Arcand.

L'ASSÉ juge essentiel de se positionner par rapport à la charte puisque les étudiants qu'elle représente fréquentent des établissements d'enseignement où des professeures peuvent être voilées et que certains d'entre eux travailleront au sein de l'appareil étatique dans le futur.