Salué par tous les députés comme un héros qui a évité un carnage au Parlement, mercredi, le sergent d'armes Kevin Vickers se dit « très touché » par tous ces hommages. Mais il tient à partager les honneurs avec tous les membres de l'équipe de sécurité de la colline parlementaire.

«Je suis très touché par l'attention que l'on m'accorde à la suite des évènements survenus hier. Cependant, je bénéficie du soutien d'une équipe de sécurité remarquable qui est déterminée à assurer la sécurité des députés, des employés et des visiteurs sur la Colline. Hier, lors de circonstances extraordinaires, le personnel de sécurité a fait preuve de professionnalisme et de courage. Je suis reconnaissant et fier de faire partie de cette équipe», a affirmé M. Vickers dans un communiqué de presse.

Se fiant à ses instincts de policier, M. Vickers est intervenu rapidement pour neutraliser le tireur qui a fait irruption au Parlement, Michael Zehaf Bibeau, dans le couloir qui mène à l'auguste bibliothèque Parlement. En tout, une trentaine de coups de feu ont été entendus durant la fusillade.

«Les Services de sécurité de la Chambre des communes maintiennent aussi des relations de travail étroites avec leurs partenaires de sécurité, y compris le Service de sécurité du Sénat, la GRC et le Service de police d'Ottawa. Cette collaboration étroite nous a permis de s'unir et de rétablir l'ordre rapidement dans la Cité parlementaire et au centre-ville».

Il a précisé qu'un constable, Samearn Son, a été blessé à la jambe durant la fusillade après avoir tenté de maîtriser le tireur. Ce dernier est dans un état stable et devrait se rétablir complètement.

Comme le veut le protocole, M. Vickers a porté la masse, symbole de l'autorité du président, durant la parade quotidienne qu'il mène dans les couloirs du Parlement jusqu'à la Chambre des communes. Dès son entrée aux Communes, il a été chaudement applaudi par les quelque 300 députés présents, encore secoués par l'attentat terroriste perpétré mercredi alors que la plupart d'entre eux participaient à la réunion de leur caucus respectif.

M. Vickers, devenu un véritable héros national, a indiqué qu'il n'accordera aucune entrevue aux médias en raison de l'enquête policière en cours.

 Un 2e «héros»

Kevin Vickers n'est pas seul à avoir fait feu sur le tireur. Selon le député Paul Dewar, un autre garde, Craig Brett, a fait feu sur l'homme. «Kevin Vickers et Craig Brett ont sauvé nos vies hier. S'ils n'avaient pas été là, s'il n'avaient pas agi, ça se serait passé très différemment.»

Le député néo-démocrate d'Ottawa-Centre a salué le sang froid de l'agent Brett. «Ce gars a non seulement neutralisé le tireur, mais ensuite a pris le temps de s'assurer de notre sécurité.» C'est lui qui a notamment escorté une poignée d'élus néo-démocrates, incluant leur chef Thomas Mulcair, dans un tunnel, pour les mettre à l'abri. «Je ne pourrai jamais assez le remercier. C'est un héros, tout comme M. Vickers, a tenu à dire M. Dewar. On tient notre sécurité souvent pour acquise. Ce genre d'événement nous rappelle qu'on doit remercier ceux qui nous protègent.»

M. Dewar a aussi révélé que le garde ayant été blessé venait tout juste de fermer la porte où se réunissaient les députés quand le tireur a fait irruption dans le Parlement. «Il n'était pas armé, mais n'a pas hésité à se mettre en danger pour s'assurer que nous étions en sécurité.»

«Si le tireur avait tourné à gauche ou à droite, ça aurait été une partie de tir au pigeon», a ajouté son collègue néo-démocrate Robert Chisholm.

Ce scénario a d'ailleurs été envisagé par plusieurs qui se sont soudain retrouvés barricadés à quelques mètres à peine d'où s'échangeaient des coups de feu. Ex-policière, la ministre Shelly Glover a affirmé que, même si elle n'était pas armée, elle était prête à foncer sur le tireur s'il avait tenté de s'introduire dans la pièce où étaient réunis les élus conservateurs. « Si l'homme avait voulu entrer, j'étais prête à faire ce qu'il fallait pour protéger mes collègues», a-t-elle confié, encore sur le coup de l'émotion.

Comme plusieurs élus, la ministre Glover estime que la fusillade de mercredi doit relancer le débat sur la sécurité au Parlement. «Ça fait longtemps qu'on parle de ça. Je suis pas mal enragée envers ceux qui refusaient d'agir. Il va falloir réagir. Ce n'est pas drôle ce qui s'est passé. J'espère que tout le monde va réaliser maintenant qu'on c'est une menace globale.»

Le député libéral Irwin Colter s'attend d'ailleurs à une révision des mesures de sécurité. «Le Canada a toujours eu une culture d'innocence, comparativement aux États-Unis. Ça va certainement entraîner un resserrement de la sécurité.»

Robert Chisholm appréhende toutefois un trop fort resserrement des mesures de sécurité. Il a dit juger important de conserver l'accessibilité pour la population à leurs élus, une importante particularité à préserver du Parlement canadien, selon lui.

Son collègue néo-démocrate Charlie Angus souhaite aussi que la colline parlementaire soit de nouveau accessible. «J'espère que le Parlement va être rouvert au public rapidement. C'est la maison du peuple, ça appartient aux Canadiens. On va protéger cet endroit où les Canadiens peuvent célébrer, être entendus ou manifester.»

PHOTO CHRIS WATTIE, REUTERS

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