(Québec) L’Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE) s’est dite en accord avec la vaccination obligatoire des éducatrices. De leur côté, les cégeps et universités n’en voient pas l’utilité pour l’instant. Les syndicats du réseau de l’éducation craignent que d’imposer la mesure aux enseignants ne vienne créer « faux sentiment de sécurité » dans les écoles.

L’AQCPE s’est prononcée vendredi en faveur de la vaccination obligatoire des éducatrices. « C’est de notre responsabilité de protéger les enfants », a fait valoir Geneviève Bélisle de l’AQCPE, soulignant que leur clientèle n’est pas admissible à la vaccination et qu’il est impossible de maintenir une distanciation sociale entre les enfants et éducatrices.

L’AQCPE réclame cependant que les éducatrices qui refuseraient d’être vaccinées soient plutôt accommodées en se soumettant à « un protocole de tests de dépistage régulier » à leurs frais et sur leur temps personnel, a expliqué l’Association. Selon eux, le réseau ne peut pas se priver d’éducatrices en raison de la pénurie de main-d’œuvre et du manque de personnel.

L’Association des garderies non subventionnées en installation abonde dans le même sens.

La commission de la santé et des services sociaux se penche depuis jeudi sur la vaccination du personnel soignant et « d’autres catégories de travailleurs qui sont en contact prolongé avec les citoyens ». Des groupes et syndicats représentant l’éducation doivent notamment être entendus vendredi.

La Fédération des cégeps et le Bureau de coopération interuniversitaire estiment avoir « ce qu’il faut pour avoir une rentrée sécuritaire » notamment avec l’imposition du masque en classe. Ils ont soulevé des défis techniques et logistiques à imposer la vaccination alors que les campus sont comme « des petites villes ».

Imposer la vaccination serait « comme imposer la vaccination à la population du Québec », a illustré le président du conseil d’administration du Bureau de la coopération interuniversitaire, Pierre Cossette. Les deux organisations ont cependant affirmé que si la Santé publique donnait le feu vert à la vaccination obligatoire sur les campus, elles offriront leur pleine collaboration.

Un « faux sentiment de sécurité »

De son côté, la FAE a dit ne pas être en mesure de répondre « par l’affirmative ni par la négative » à la question à savoir si le syndicat est favorable ou non à la vaccination obligatoire des enseignants.

Selon le président, Sylvain Mallette, le gouvernement Legault doit « faire la démonstration que d’imposer la vaccination au personnel enseignant » est nécessaire dans les écoles alors que « certains des élèves et leurs parents ne sont pas vaccinés ». Il estime donc que « ça peut donner un faux sentiment de sécurité ».

« Le fait pour une enseignante ou un enseignant d’être vacciné ne compense pas le fait que certains de ses élèves ou leurs parents ne le sont pas », a lancé M. Mallette. « Dans le présent débat, le gouvernement doit faire la démonstration que de rendre obligatoire la vaccination pour le personnel scolaire, sans que cette mesure s’applique aussi aux élèves et à leurs parents, permettra de freiner significativement la propagation du virus dans le réseau des écoles publiques », a-t-il dit.

La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) a aussi parlé de cette crainte que la vaccination obligatoire ne vienne créer un « faux sentiment de sécurité » dans les écoles. « Le vaccin est-il vraiment la panacée ? La question se pose », a souligné le président Éric Gingras. Il a souligné à son tour « des zones d’ombres à éclaircir » pour le gouvernement Legault avant d’aller dans la direction de la vaccination obligation.

Les deux syndicats ont dit craindre que cette nouvelle mesure provoque des bris de services ou aggrave la pénurie de main-d’œuvre dans le réseau de l’éducation. Par contre, devant l’absence de données précises sur la couverture vaccinale de leurs membres, ils ont expliqué qu’il était difficile de prévoir les impacts que pourrait avoir cette imposition.

Absence de données

« La FAE estime que le débat sur la vaccination obligatoire ne peut se mener que si l’ensemble des données et des informations, qui conduisent le gouvernement à lancer l’idée de la vaccination obligatoire, notamment pour le personnel enseignant, sont accessibles », a fait valoir M. Mallette.

La FAE a souligné à grands traits l’absence de données complètes sur la couverture vaccinale des enseignants. Sylvain Mallette a parlé de données « parcellaires, confuses ou ne sont tout simplement pas mises à jour ». Il s’est insurgé contre la publication d’un sondage vendredi sur la couverture vaccinale qui révèle que 96 % des professeurs du primaire et du secondaire sont pleinement vaccinés.

La Presse rapportait vendredi que le gouvernement Legault a maintenant une bonne idée du taux de vaccination après avoir commandé un sondage à la firme Synopsis.

Lisez l’article « 96 % des enseignants se disent pleinement vaccinés »

Sylvain Mallette a déploré « une étrange opération de communication », menée « à l’insu » du syndicat. « Le ministre de l’Éducation aurait pu profiter de l’occasion pour vérifier combien il est impopulaire auprès des enseignantes et enseignants », a critiqué M. Mallette qui n’a visiblement digéré la tenue de l’exercice.

Sur une question aussi fondamentale que la vaccination obligatoire, que « le ministre se contente d’un seul sondage, c’est assez troublant », a ajouté M. Mallette dont le syndicat représente 50 000 enseignants.

La FAE a, en ce sens, amorcé une consultation de ses membres sur la question de la vaccination obligatoire. Le syndicat n’a pas questionné ses membres sur leur statut vaccinal évoquant des raisons légales.

Jeudi, le DHoracio Arruda a émis d’importantes réserves à la possibilité d’imposer la vaccination à d’autres métiers, comme les enseignants. Il a dit considérer que le bénéfice dans le secteur de l’éducation « n’est pas de la même nature que celui dans le secteur de la santé » affirmant que la clientèle en milieu hospitalier est beaucoup plus vulnérable.

Le gouvernement Legault n’a pas l’intention pour l’instant d’élargir la vaccination obligatoire à des secteurs autres que le réseau de la santé.