Visiter ou non le Québec cet été ?

Les campings sont maintenant accessibles, tout comme les hébergements touristiques et les hôtels – seules les auberges de quatre chambres et moins n’ont toujours pas reçu le feu vert des autorités de la santé publique.

Les propriétaires d’établissements touristiques dans plusieurs régions, notamment dans Charlevoix, ne demandent pas mieux que d’accueillir les visiteurs.

« Mais la ministre du Tourisme a dit : ‟Faites vos commissions avant de partir et allez vous enfermer dans votre chalet.” Pourtant, bien des commerçants locaux espèrent, depuis la levée des barrages, que les touristes vont venir, » déplore Érick Tremblay, copropriétaire du resto-pub Belles & Bum, situé juste en face du fleuve, à La Malbaie.

PHOTO ISABELLE DUCAS, LA PRESSE

Érick Tremblay et Julie Tremblay, copropriétaires du resto-pub Belles & Bum, à La Malbaie

Il n’est pas le seul à déplorer les messages contradictoires qui sont envoyés aux touristes.

Certains visiteurs risquent-ils de ne pas se sentir bienvenus dans certaines régions ?

Dans Charlevoix et ailleurs, des barrages routiers ont bloqué les accès pendant plusieurs semaines, dans le but d’éviter que la COVID-19 s’y propage. Ces barrages ont été levés au début du mois de mai.

Des citoyens ont aussi lancé des pétitions en ligne demandant aux visiteurs, notamment aux Montréalais, de rester chez eux – dans Charlevoix, une telle pétition a recueilli 6000 noms en 48 heures, en avril.

Sur les réseaux sociaux, des citoyens de diverses régions se disent encore mal à l’aise de voir des touristes faire leur épicerie dans les mêmes commerces qu’eux.

« Pas de mouvement anti-tourisme »

Les Montréalais qui rêvent de grands espaces seront-ils traités comme des pestiférés s’ils désirent sortir de la ville ?

« Il n’y a pas de mouvement anti-tourisme dans Charlevoix, et les Montréalais qui visitent la région sont les bienvenus », répond la députée caquiste Émilie Foster, qui représente la circonscription de Charlevoix–Côte-de-Beaupré.

Mme Foster rappelle que 30 % de l’économie charlevoisienne dépend du tourisme.

On avait tous hâte que le secteur du tourisme puisse rouvrir, mais on compte aussi sur la responsabilité individuelle des visiteurs, qui devront respecter les consignes de distanciation, de lavage des mains, et qui sont incités à porter le masque. On espère que les gens ont intégré de nouvelles habitudes et auront le réflexe de protéger les autres.

La députée Émilie Foster

Avec la réouverture de plusieurs secteurs de l’économie, les touristes ne doivent pas craindre de fréquenter les commerces locaux, dit-elle.

D’ailleurs, la nouvelle stratégie de Tourisme Charlevoix vise à attirer les visiteurs des autres régions du Québec, note la députée.

Érick Tremblay, qui est aussi président de la Société de développement commercial de La Malbaie, espère que cette stratégie aura du succès.

Mais la tâche risque d’être difficile, puisque plusieurs attractions importantes sont fermées, comme le Casino de Charlevoix, le train de Charlevoix, les Jardins de Quatre-Vents et le Domaine Forget, qui présente habituellement des concerts en plein air et un festival de musique classique.

« L’été, notre clientèle est composée à 80 % de touristes, souligne M. Tremblay. On mise beaucoup sur les produits régionaux. Pour tout le monde dans le milieu, ce qu’on engrange pendant la période touristique nous permet de passer à travers l’hiver. »

Avec sa conjointe Julie Tremblay, il a fait des pieds et des mains pour garder son restaurant ouvert depuis le début de la pandémie : nouveaux plats pour emporter, boîtes barbecue à faire cuire chez soi, promotions…

Le couple avait cependant très hâte de pouvoir rouvrir sa salle à manger.

Même s’ils n’ont qu’une semaine pour se préparer, tous deux ont bien l’intention de recevoir leurs premiers clients dès qu’ils en auront l’autorisation, lundi prochain, le 15 juin, avec visières et masques.

Annulations de visiteurs étrangers

S’ils tentent d’être optimistes, les propriétaires d’établissements touristiques doutent cependant que les touristes québécois soient suffisamment nombreux pour compenser la baisse du nombre de visiteurs étrangers.

À l’Auberge et restaurant Chez Truchon, logée dans une grande maison ancestrale, plus de la moitié de la clientèle vient de l’extérieur du Québec. La copropriétaire, Annie Dufour, a été très occupée à enregistrer les annulations au cours des dernières semaines.

PHOTO ISABELLE DUCAS, LA PRESSE

Dominic Truchon et Annie Dufour, copropriétaires de l’Auberge et restaurant Chez Truchon, à Pointe-au-Pic.

Les quelques clients hébergés dans l’établissement étaient des travailleurs essentiels se trouvant temporairement dans la région.

Après avoir dû modifier les procédures pour l’entretien des chambres, qui demandent beaucoup plus de temps, on se prépare maintenant à se conformer aux nouvelles consignes pour l’ouverture de la salle à manger.

Tout cela demande beaucoup de travail, alors que les revenus seront assurément à la baisse.

« Nous sommes en mode survie. On veut juste passer à travers en espérant que tout rentre dans l’ordre le plus rapidement possible », dit Mme Dufour.