Fait rarissime : la forte hausse de l’immigration au Québec l’an dernier a temporairement freiné le vieillissement de la population dans la province, selon le bilan démographique du Québec révélé mercredi.

« On ne l’avait jamais envisagé »

L’an dernier, l’âge moyen de la population du Québec était de 42,7 ans. Une année plus tôt, il s’établissait à 42,8 ans. Cette petite baisse, qui marque une pause dans le vieillissement de la population de la province, a pris les démographes par surprise. « On ne l’avait jamais envisagé », signale Frédéric Fleury-Payeur, démographe à l’Institut de la statistique du Québec (ISQ). « Ça illustre à quel point l’immigration a été exceptionnelle en 2023. » Sur les 220 000 nouveaux immigrants, environ 174 000 sont issus de l’immigration temporaire, note-t-il. « Donc ce n’est pas un phénomène qu’on estime qui va durer dans le temps. C’est une curiosité analytique intéressante. »

L’immigration sort de l’île de Montréal

Autre fait marquant : les nouveaux arrivants sont de plus en plus nombreux à s’établir à l’extérieur de l’île de Montréal, peut-on lire dans le bilan. « La part des immigrants permanents et des résidents non permanents recensés hors de l’île de Montréal était de 30 % en 2001, alors qu’elle s’élève à 44 % en 2021 », écrivent les chercheurs. Parmi les pays d’origine des immigrants permanents admis en 2023, on retrouve la France (13 %), suivi du Cameroun (12 %), de la Chine (11 %), de l’Algérie et du Maroc (4,7 % chacun) et de la Tunisie et d’Haïti (4,2 % chacun).

Baisse de la fécondité

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

« La baisse [de la fécondité] se poursuit et s’accentue », note le démographe Frédéric Fleury-Payeur.

La fécondité a piqué du nez encore une fois, pour s’établir à 1,38 enfant par femme en 2023, comparativement à 1,48 en 2022. « La baisse se poursuit et s’accentue, note M. Fleury-Payeur. Ça semble être le cas partout ailleurs. C’est difficile d’identifier un seul facteur, mais c’est peut-être la diminution du désir d’avoir un enfant, l’influence du coût de la vie et de l’accès à la propriété. Si tu as un quatre et demie, et que tu veux un cinq et demie pour avoir une chambre d’enfant, peut-être que c’est trop cher, ou trop difficile à trouver. »

Espérance de vie

Le Québec continue de faire bonne figure au classement des endroits où l’espérance de vie est la plus élevée dans le monde. L’espérance de vie de la population québécoise était de 82,5 ans en 2023, un niveau qui s’apparente à celui qui prévalait avant la pandémie. « Au 1er juillet 2023, 21 % de la population québécoise est âgée de 65 ans et plus, une part égale à celle des jeunes de moins de 20 ans, alors que 58 % est âgée de 20 à 64 ans », signale l’ISQ.

Surdoses en hausse

Parmi les 25 à 44 ans, les tendances concernant la mortalité sont encourageantes pour ce qui est des accidents de véhicule à moteur, des suicides, et des agressions (homicides et féminicides). Cependant, les intoxications accidentelles (surdoses) sont en hausse marquée depuis une dizaine d’années. « C’est perceptible, mais le Québec semble toutefois échapper au gros du phénomène, nuance M. Fleury-Payeur. Au Manitoba et en Saskatchewan, de même qu’aux États-Unis, les surdoses font plus de ravages encore. »

Baisses de la mortalité due aux tumeurs et aux maladies cardiovasculaires

Une tendance positive et contre-intuitive : les maladies cardiovasculaires et les tumeurs font de moins en moins de victimes, et ce, malgré le vieillissement de la population. La diminution du tabagisme dans la société de même que les avancées dans le domaine médical pourraient expliquer cette diminution. « Les maladies du cœur peuvent inclure les décès liés à la COVID-19, la grippe, ou autres. Peut-être même que ça vient ralentir les gains observés », dit Frédéric Fleury-Payeur.

Hausse de l’immigration francophone

Après une baisse, la part des immigrants permanents admis qui connaissent le français ou qui ont le français comme langue maternelle atteint des niveaux qui comptent parmi les plus élevés des dernières décennies. Près de 66 % des immigrants admis en 2023 savaient s’exprimer en français, tandis que près de 28 % avaient le français comme langue maternelle. C’est plus du double des niveaux qui prévalaient il y a 30 ans.