(Halifax) La guerre en Ukraine et le conflit entre Israël et le Hamas au Proche-Orient sont le résultat d’une rupture du droit international dans un monde de plus en plus violent, de l’avis du ministre de la Défense nationale, Bill Blair, qui a pris la parole lors d’une conférence mondiale sur la sécurité à Halifax vendredi.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie, en février 2022, et l’attaque du Hamas contre Israël, le 7 octobre dernier, constituent des attaques flagrantes à l’ordre international fondé sur des règles, a-t-il martelé.

« Au Moyen-Orient, nous avons vu des civils innocents qui se sont retrouvés coincés dans une guerre qu’ils n’avaient pas demandée », a noté le ministre, soulignant le « massacre » de 1200 Israéliens par le Hamas, qui a aussi capturé plus de 200 otages.

Tout en défendant le droit d’Israël à la légitime défense, le ministre Blair a rappelé que « tous les civils doivent être protégés » et que les règles encadrant les conflits armés « doivent être respectées ».

M. Blair fait partie des 300 délégués qui proviennent de partout dans le monde et qui ont convergé vers la Nouvelle-Écosse pour participer au Forum d’Halifax sur la sécurité internationale, un évènement annuel consacré au renforcement de la coopération entre les nations démocratiques.

La plupart des ateliers de la conférence se concentrent sur la guerre en Ukraine, même si une grande partie de l’attention internationale s’est tournée dans les dernières semaines vers la bande de Gaza, où l’invasion israélienne, en réponse à l’attaque du Hamas du 7 octobre, a tué plus de 11 400 Palestiniens. Les deux tiers des victimes seraient des femmes et des enfants, selon les autorités sanitaires palestiniennes.

Questionné par les journalistes à savoir si le soutien des alliés du Canada envers l’Ukraine diminue, M. Blair a assuré que ce n’est pas le cas.

« Je comprends que des discussions politiques aient lieu chez un certain nombre de nos pays alliés, mais j’ai constaté un soutien absolu, sans équivoque, envers l’Ukraine », a-t-il tranché.

Le ministre a aussi ajouté qu’il est important de se rappeler que même si les alliés de l’Ukraine fournissent un soutien militaire et financier, « [les Ukrainiens] mènent cette bataille avec leur sang ».

« Ils se battent en notre nom contre une atteinte très franche à l’ordre international fondé sur des règles », a-t-il déclaré, ajoutant que l’armée ukrainienne a désormais du mal à consolider les acquis réalisés l’été dernier.

« À l’heure actuelle, il semble que l’on évolue vers… je n’utiliserai pas le mot impasse, mais vers un environnement de combat plus statique. Il reste à voir ce qui pourra faire débloquer cette situation », a-t-il dit.

En faire plus

Lors de la table ronde d’ouverture du forum, le ministre Blair s’est joint aux sénateurs américains James Risch et Jeanne Shaheen. Il a soutenu que les pays démocratiques doivent travailler sur des méthodes permettant de fournir davantage de munitions à l’Ukraine, même si leurs propres réserves d’obus d’artillerie sont épuisées.

« On ne peut pas juste regarder ce qu’on a dans nos entrepôts. Il faut trouver des moyens de résoudre le problème des munitions », a-t-il affirmé.

Le chef d’état-major de la Défense, le général Wayne Eyre, a d’ailleurs récemment mentionné, devant un comité de la Chambre des communes, que si les troupes canadiennes tiraient au même rythme que les troupes ukrainiennes, leur réserve d’obus ne durerait que quelques jours.

Oleksandra Matviichuk, une avocate ukrainienne spécialisée dans les droits de la personne, a néanmoins appelé à ce que l’attitude change parmi les puissances occidentales qui aident son pays.

Selon elle, l’objectif est trop souvent uniquement « d’aider l’Ukraine à ne pas échouer », plutôt que de garantir que son pays gagne réellement la guerre.

« Si nous n’avons pas d’objectif commun ambitieux, nous n’aurons pas de stratégie commune », a-t-elle estimé en entrevue avec La Presse Canadienne, tout en exhortant le Canada à fournir plus rapidement des armes plus modernes.

Ne pas oublier l’Ukraine

Le président du forum, Peter Van Praagh, a délibérément choisi de garder l’angle de l’évènement sur l’Ukraine, plutôt que de le faire pivoter sur la situation au Proche-Orient.

« En ce moment, [le président russe Vladimir] Poutine s’efforce de détourner l’attention des démocraties du monde – et leur généreux soutien à l’Ukraine – vers d’autres endroits », a-t-il expliqué jeudi.

« Les démocraties du monde doivent s’unir pour mettre fin à cette attaque sur plusieurs fronts. »

Plus tard, M. Blair a annoncé qu’Ottawa fournira 26,6 millions sur six ans pour établir un pôle d’innovation à Halifax pour l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Sa prédécesseure comme ministre de la Défense nationale, Anita Anand, avait mis de l’avant cette proposition en novembre dernier.

L’objectif de ce pôle, connu sous le nom d’Accélérateur d’innovation de défense pour l’Atlantique Nord, sera de promouvoir la coopération entre les membres militaires de l’OTAN et le secteur technologique, y compris les entreprises technologiques émergentes et les chercheurs universitaires.

M. Blair a également annoncé que le Canada investira 188 millions pour concevoir et construire un nouveau centre de formation à la Base des Forces canadiennes Halifax, la plus grande base militaire du pays.