Les municipalités qui jugeront nécessaire de réglementer la vitesse ou de bloquer en tout ou en partie la navigation sur les lacs de leur territoire pourront y parvenir beaucoup plus rapidement en vertu d’une modification à la loi fédérale.

Le nombre croissant de motomarines et d’embarcations à moteur inquiète de nombreux citoyens préoccupés par la santé des lacs, la sécurité des plans d’eau ou le bruit engendré. Jusqu’ici, les riverains et les municipalités qui voulaient agir se heurtaient à un mur, Transports Canada, Ottawa ayant compétence sur la navigation.

En entrevue téléphonique avec La Presse jeudi, la ministre du Revenu, Marie-Claude Bibeau, qui a pris sous son aile ce dossier à titre de députée de Compton–Stanstead, en Estrie, explique que le ministre des Transports pourra désormais publier rapidement un décret pour avaliser une résolution qui aura été prise dans une municipalité à propos de la navigation.

Concrètement, cela signifie que les municipalités qui voudraient restreindre la navigation sur les plans d’eau de leur secteur pourront espérer rapidement un décret favorable du ministre des Transports s’ils ont démontré que la santé du lac ou la sécurité nautique étaient en jeu, puis fait voter une résolution municipale.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Marie-Claude Bibeau, ministre du Revenu national et députée des Cantons-de-l’Est, a convaincu Ottawa d’alléger la tâche des municipalités qui veulent avoir leur mot à dire sur la navigation sur les lacs.

« Les municipalités de ma région [qui présenteraient un dossier maintenant] peuvent espérer un décret du ministre d’ici l’été prochain », illustre Mme Bibeau.

La ministre note qu’Ottawa conserve sa compétence sur la navigation, mais une fois « qu’une municipalité aura eu le courage de faire une résolution », « on peut raisonnablement s’attendre à ce que le ministre [des Transports] accorde le décret » sans tarder.

Car les municipalités, dit-elle, « sont les mieux placées pour prendre leur décision ».

Loi sur la marine marchande

Mme Bibeau explique avoir pris « le flambeau » de ce dossier après avoir été fortement interpellée en 2015 par « la présentation très percutante » de huit associations de lacs de sa région, certains étant aux prises avec des espèces envahissantes.

« Je me suis alors engagée à faire ce qui était en mon pouvoir dans ce dossier, sans savoir dans quoi je m’embarquais. »

Ce à quoi elle s’attaquait, finalement, c’était la loi sur la marine marchande, pensée surtout pour la navigation sur le fleuve Saint-Laurent, et qui, encore aujourd’hui, régit tant les motomarines et les petites embarcations sur de petits lacs du Canada que les gros navires sur la Voie maritime.

Ajustement de Transports Canada

Transports Canada a reconnu que le processus actuel était trop long et trop complexe. Mieux, il a reconnu non seulement qu’il fallait prendre en compte les enjeux de sécurité nautique, mais aussi les enjeux environnementaux.

« C’était déjà là [dans le règlement], mais en tout petits caractères, et Transports Canada ne le mettait jamais en application », précise Mme Bibeau.

« Les Canadiennes et Canadiens méritent d’avoir leur mot à dire sur la façon dont leurs voies navigables sont réglementées. Aujourd’hui, on accélère le processus pour les communautés locales », a déclaré Pablo Rodriguez, ministre des Transports.

Par cette annonce, Pascale St-Onge, ministre du Patrimoine – elle aussi partie prenante au dossier –, estime qu’Ottawa réitère son engagement « auprès de nos citoyens et nos municipalités » et s’assure que la population ait « davantage son mot à dire sur la façon de protéger nos plans d’eau et de rendre la navigation de plaisance plus sécuritaire ». La balle sera désormais beaucoup dans le camp des municipalités, à qui il reviendra de faire les arbitrages entre ceux qui estiment nécessaire de limiter la navigation sur les lacs et ceux qui plaideront pour le droit de circuler sur les lacs qui sont à la base libres d’accès.