(Montréal) Roger Thibault, qui faisait partie du premier couple de même sexe à s’être uni de façon civile, non seulement au Québec, mais en Amérique du Nord, est mort vendredi, à l’âge de 77 ans.

Son mari, Theo Wouters, l’a annoncé dans un courriel envoyé à quelques proches, disant que M. Thibault s'est éteint paisiblement dans ses bras à 15 h 30, vendredi. Le septuagénaire était atteint de la maladie de Parkinson. Le couple a partagé 50 ans de vie commune.

Le couple Thibault-Wouters s’est marié le 18 juillet 2002, au palais de justice de Montréal. Leur union a pu être officialisée grâce à la loi 84, adoptée en juin de la même année par l’Assemblée nationale, qui créait l’union civile, destinée à tous les couples, peu importe leur orientation sexuelle.

Le mariage entre deux personnes de même sexe ne sera légal au Canada que le 20 juillet 2005, après la proclamation royale de la Loi fédérale sur le mariage civil.

« Malheureusement, Roger, sa maladie a progressé tellement vite, raconte M. Wouters, en entrevue. La dernière semaine, sa condition s’est détériorée si vite. »

Il espère que les prochaines générations se souviendront du combat que lui et son mari ont mené contre l’homophobie, notamment à Pointe-Claire, où ils avaient organisé une marche qui avait regroupé des milliers de personnes en mai 2001.

« J’aimerais que le monde sache tout le combat qu’on a fait contre l’homophobie, la discrimination qu’on a subie ici. Et ça, j’espère que ça va partir un jour », affirme M. Wouters.

L’homme âgé de 81 ans estime qu’il ne faut pas baisser sa garde, car la menace d’un recul des droits de la communauté LGBTQ+ plane toujours.

« On veut que les jeunes aujourd’hui restent très vigilants, dit M. Wouters. Ce qui se passe aux États-Unis, c’est épeurant. »

En mai dernier, après 21 ans de mariage, les deux hommes ont été nommés Citoyens d’honneur de Montréal.

« Toute leur vie, ils ont lutté contre les discriminations et la haine. Ils ont combattu les préjugés avec dignité et détermination. Ces hommes sont des exemples de persévérance, de résilience et d’amour. Par leur mariage, ils ont contribué à faire de Montréal une ville plus ouverte et inclusive. Je les en remercie », avait alors écrit la mairesse, Valérie Plante, dans une publication diffusée sur Facebook.

Une pensée pour le couple à la Fierté

La mort de M. Thibault survient à quelques jours du défilé de la Fierté qui, dimanche, fera valoir les droits de la communauté 2SLGBTQIA+.

« C’est une triste nouvelle. C’est une nouvelle qui était connue que la santé de Roger était de plus en plus défaillante de par la maladie de Parkinson », affirme en entrevue Patrick Desmarais, président de la Fondation Émergence, qui lutte contre l’homophobie et la transphobie.

M. Thibault a toutefois pu demeurer dans sa maison jusqu’à la fin de ses jours. « C’est ce qu’on peut souhaiter à tout couple de pour voir être accompagné des personnes qu’on aime lorsqu’on décède », ajoute M. Desmarais.

La Fondation Émergence exprime sa sympathie aux proches de M. Thibault, et dit que l’organisation aura une pensée pour le couple lors de la marche de la Fierté.

« C’est sûr que lorsqu’on fait une marche, on fait une marche à la mémoire des combats qu’on a gagnés comme communauté. Le fait que Roger et Theo aient été le premier couple à s’unir civilement au Québec, et en Amérique du Nord en fait, de façon légale, c’était le début de plusieurs belles réussites de notre communauté à obtenir des droits tout à fait identiques que pour les autres couples », détaille M. Desmarais.

Lors du mariage du couple, il était président de la Chambre de commerce gaie du Québec, aujourd’hui, la Chambre de commerce LGBT du Québec.

« J’étais aux premières loges des batailles que Roger et Théo ont eues à l’époque, par rapport à de l’homophobie haineuse qu’ils subissaient autour de chez eux, raconte-t-il. Lorsque la loi sur l’union civile a été applicable, qu’ils aient pu être le premier couple à se marier, il y avait une symbolique aussi qui venait avec ça. Dans la mesure que, de par des batailles, il y a aussi des moments heureux qui peuvent arriver, et ça en était un. »

Fierté Montréal s’est pour sa part dite de tout cœur avec M. Wouters, et souligne l’importance du parcours du couple.