Les conducteurs de VUS et de camionnettes causent des blessures 55 % plus graves aux personnes à vélo lors d’une collision, selon une nouvelle étude. La SAAQ dit se pencher sur la question du degré de dangerosité des véhicules qui circulent sur nos routes.

Des véhicules dangereux… pour les autres

Alors que les déplacements à vélo sont en forte hausse au Québec, une nouvelle étude américaine vient rappeler que le choix de véhicule que font les automobilistes a des conséquences mesurables sur la sécurité des gens qui se trouvent à l’extérieur du véhicule, dont les personnes se déplaçant à vélo. Selon une récente étude de l’Institut des assurances pour la sécurité routière (Insurance Institute for Highway Safety) aux États-Unis, les personnes à vélo heurtées par des conducteurs de VUS ou de camionnettes présentent des blessures 55 % plus graves que celles des cyclistes qui ont été heurtés par des conducteurs d’automobiles. Ces véhicules plus gros provoquent aussi des traumatismes crâniens 63 % plus graves que ceux provoqués par une voiture.

PHOTO IVANOH DEMERS, ARCHIVES LA PRESSE

Les personnes à vélo heurtées par des conducteurs de VUS ou de camionnettes présentent des blessures 55 % plus graves que celles des cyclistes qui ont été heurtés par des conducteurs d’automobiles.

Pilier A

Magali Bebronne, directrice des programmes et porte-parole de Vélo Québec, note que l’un des problèmes des VUS et des camionnettes est le fameux « pilier A », soit la partie qui soutient le pare-brise du côté conducteur, et qui crée un angle mort important. « Sur ces véhicules, les piliers A sont beaucoup plus imposants, ils contiennent aussi les coussins gonflables. Donc on a de plus en plus de collisions dans des virages à gauche, parce que des piétons ou des cyclistes n’ont jamais été vus : ils étaient cachés par ces piliers massifs. » Le capot des VUS et des camions est aussi beaucoup plus haut que celui d’une voiture. En cas de collision, ils atteignent les gens au niveau des organes vitaux plutôt qu’au niveau des jambes, accentuant la gravité des blessures et les risques de décès.

1000 morts par année

C’est le nombre de personnes se déplaçant à vélo qui sont tuées chaque année aux États-Unis dans une collision avec le conducteur d’un véhicule motorisé, alors que plus de 130 000 autres sont blessées. Aussi, 7500 personnes se déplaçant à pied sont tuées par année, ce qui représente environ 20 morts par jour. C’est le niveau le plus élevé en 40 ans. Au Québec, 50 piétons ont été tués en 2022 selon la SAAQ, soit une personne tous les 7 jours, et des milliers ont été blessés, un sommet en 10 ans. L’an dernier, sept cyclistes ont été tués au Québec, alors qu’une centaine ont été grièvement blessés après une collision avec un véhicule motorisé.

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Un vélo blanc installé à Montréal en 2021, à la mémoire d’un cycliste mort sur la route. Sept autres cyclistes ont été tués au Québec en 2022.

Réglementation inéquitable

Cette tendance à « l’obésité des véhicules » est préoccupante, et devrait être encadrée par le gouvernement, croit Mme Bebronne. « Par exemple, la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) est censée regarder les facteurs de risque et demander plus à ceux qui représentent les plus gros risques. En ce moment, ce n’est pas pris en compte, et ce sont les conducteurs de petites voitures qui paient pour les dommages de plus en plus importants des conducteurs de VUS et de camions légers. »

Les tarifs d’immatriculation devraient être modulés en fonction du gabarit des véhicules pour tenir compte de cette réalité, fait-elle valoir. « Ceux qui optent pour des véhicules plus dangereux devaient être conscientisés à ces impacts-là. Les véhicules à grosses cylindrées ont vécu une légère augmentation des frais d’immatriculation, mais la mesure est tellement insuffisante que même les camionnettes Ford F-150 ne vont pas être soumises à cette surprime-là. Il est vraiment temps d’aller plus loin. On parle beaucoup d’écofiscalité, de tarifer des comportements qui sont nuisibles à l’environnement, mais on ne semble pas prêt à faire ça à l’échelle de la sécurité au Québec. »

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Des camionnettes Tundra sur leur ligne d’assemblage, à San Antonio, au Texas, le 17 avril dernier. La tendance générale « l’obésité des véhicules » est préoccupante et devrait être encadrée par le gouvernement, selon la porte-parole de Vélo Québec, Magalie Bebronne.

Comité de travail à la SAAQ

À la SAAQ, on indique avoir mis sur pied un comité de travail pour analyser des accidents concernant des piétons avec décès et blessés graves impliquant différents types de véhicules. « Les travaux sont toujours en cours. Il est prévu dans le cadre de ces travaux de s’attarder davantage au type de véhicule impliqué, note Geneviève Côté, porte-parole de la SAAQ. Pour ce qui est des contributions d’assurance, l’exercice pour déterminer les contributions d’assurance 2025-2027 débutera bientôt. Suivra ensuite le dépôt de l’expertise actuarielle et du document public d’information au début de 2024. »

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La Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) indique avoir mis sur pied un comité de travail pour analyser des accidents concernant des piétons avec décès et blessés graves impliquant différents types de véhicules.