Entre 70 % et 80 % des Québécois qui sont dans le noir devraient être rebranchés d’ici la fin de la soirée de vendredi, assure Hydro-Québec. Pour y arriver, la société d’État entend d’abord rebrancher les secteurs les plus névralgiques. La tâche est toutefois colossale : plus de 1100 employés seront déployés en tout temps.

« Nous déployons tout ce que nous pouvons en moyens financiers, humains et techniques pour vous raccorder le plus rapidement possible. […] Ce n’est pas parce qu’il fait chaud qu’on va moins vite, et ce n’est pas parce que c’est Pâques qu’on ne donnera pas notre 100 % », a assuré jeudi la PDG sortante d’Hydro-Québec, Sophie Brochu, en point de presse au siège social de la société.

À ce moment, plus d’un million de foyers québécois manquaient de courant. La bonne nouvelle, selon le vice-président aux opérations de maintenance d’Hydro-Québec, Régis Tellier, est toutefois qu’environ le quart des pannes touchent plus d’un millier de personnes.

Résultat : les interventions peuvent être ciblées, et beaucoup plus efficaces, selon lui. Déjà, jeudi, la situation semblait se « stabiliser », le nombre de nouveaux clients qui déclaraient manquer de courant ayant cessé d’augmenter en raison des conditions météorologiques plus favorables que la veille. La priorité est donnée aux citoyens en danger, puis aux établissements de santé et aux équipements de communication.

Les régions les plus touchées par les pannes demeurent l’Outaouais, où le verglas est arrivé en premier, mais aussi la Montérégie et Montréal. La métropole québécoise représente environ 50 % des pannes.

« On estime qu’environ 70 à 80 % de nos clients affectés vont être rebranchés d’ici vendredi minuit », a expliqué M. Tellier, dont l’équipe vise à raccorder environ 350 000 clients par jour, jeudi et vendredi. Il tient toutefois à faire une « distinction claire » avec la crise du verglas de 1998, qui était beaucoup plus grave « en termes de dégâts ».

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Régis Tellier, vice-président aux opérations de maintenance d’Hydro-Québec

On a certains poteaux au sol, notamment à Mirabel, mais globalement, ce sont surtout des branches qui ont touché le réseau.

Régis Tellier, vice-président aux opérations de maintenance d’Hydro-Québec

Environnement Canada a aussi prévenu ceux et celles qui auraient de « mauvais souvenirs de 1998 » que l’actuel scénario météo était « bien différent ». En 1998, on avait vu déferler trois tempêtes et 100 millimètres de pluie verglaçante en six jours. Cette année, on parle plutôt d’une tempête de 33 mm de pluie verglaçante en une journée, suivie d’un redoux rapide, a rappelé l’organisme.

N’empêche, Sophie Brochu appelle la population à rester loin des fils électriques, mais aussi à « déplacer [les] véhicules » loin des trottoirs quand ceux-ci sont entravés, si cela est possible, afin de permettre aux employés d’effectuer les raccordements. Des équipes du Nouveau-Brunswick et de l’Ontario pourraient d’ailleurs porter assistance à Hydro-Québec dans les prochaines heures, au besoin.

Développer « la résilience »

Au mois de décembre dernier, la vérificatrice générale du Québec, Guylaine Leclerc, constatait dans un rapport qu’Hydro-Québec « n’est pas outillée adéquatement pour faire face au défi grandissant du vieillissement de ses actifs ». Conséquence : la fiabilité de son service de distribution d’électricité présente une « baisse marquée », notait-elle.

On y apprenait que les pannes dues aux équipements défaillants ont touché en 2021 près de 2 millions de clients. Depuis 2012, en excluant les évènements météorologiques majeurs, « la durée moyenne des pannes par client alimenté a augmenté de 63 % et le nombre de pannes est en hausse de 16 % », écrivait du même souffle Mme Leclerc.

Pour Sophie Brochu, il est urgent que le Québec entame une « discussion de société » sur le développement d’une « résilience » énergétique à plus long terme. « Depuis quelques années, on a augmenté les investissements dans le contrôle de la végétation pour éviter le plus possible que les branches entrent en contact avec le réseau », a-t-elle dit.

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Sophie Brochu, PDG sortante d’Hydro-Québec

Ce qu’on vient de vivre, c’est une grande crise de verglas. Et il n’y a pas un programme de végétation qui va être capable [de l’absorber].

Sophie Brochu, PDG sortante d’Hydro-Québec

Répétant que ce genre d’évènement météo « risque de se reproduire de plus en plus », la PDG sortante d’Hydro-Québec réitère que « la société doit se doter d’une résilience » plus forte. « Tout l’argent du monde ne peut pas se faire juste du côté d’Hydro-Québec. Il y a une discussion à avoir sur comment on bâtit un lieu, une ville. C’est une affaire de société […] devant ce qui va être de plus en plus difficile », a-t-elle martelé.

Pour augmenter la résilience à travers la province, le premier ministre François Legault, quant à lui, affirme que du travail est en cours pour doter les plus petites municipalités de « points de contrôle, afin que les gens puissent aller prendre une douche » pendant de telles tempêtes. Son gouvernement, dit-il, est également « en train d’ajouter de la capacité » de production et d’effectifs chez Hydro-Québec.