Le Canada se heurte à une hausse de cas de violence envers les personnes âgées déclarés à la police, révèle une étude de Statistique Canada. Cette hausse signifie-t-elle qu’il y a plus de violence contre les aînés ? Pas nécessairement.

Selon l’étude publiée jeudi, le taux de cas de violence vis-à-vis des personnes de 65 ans et plus déclarés à la police a augmenté de 22 % de 2010 à 2020. Cette étude qualifie de violence les voies de fait, les agressions sexuelles et les vols qualifiés.

« On parle d’une hausse de cas [de violence] déclarés à la police. Est-ce qu’on parle vraiment d’une hausse du nombre de cas ? Il faudrait mettre beaucoup de nuance », prévient Marie Beaulieu, professeure à l’École de travail social de l’Université de Sherbrooke.

D’après elle, les campagnes de sensibilisation des dernières années contribueraient à l’accroissement des cas de violence signalés.

« Depuis 2010, au Québec et dans plusieurs autres provinces canadiennes, il y a un travail de sensibilisation qui est fait sur la maltraitance envers les aînés dans lequel on dit aux gens qu’ils peuvent appeler la police […] Chaque fois qu’on a des campagnes de sensibilisation, ça fait augmenter le nombre de cas », déclare la professeure.

Toujours d’après Marie Beaulieu, le vieillissement de la population et la confiance des aînés envers la police pourraient également expliquer ce phénomène.

Les personnes de 65 ans et plus ne sont toutefois pas celles qui rapportent le plus de cas de violence. À ce chapitre, elles sont devancées par celles de 15 à 64 ans, qui en rapportent cinq fois plus, indique le rapport de Statistique Canada.

« Ce sont elles qui sortent le soir, qui vont dans les bars, qui ont une vie sociale qui se trouve plus à l’extérieur de la maison familiale », explique la professeure de l’Université de Sherbrooke.

Fait à noter, le nombre de plaintes de violence pourrait être plus élevé que ne le montre l’étude. Les appels à la police ne finissent pas nécessairement tous dans les statistiques. Marie Beaulieu s’explique facilement ce résultat.

« Cela fait qu’on n’a pas toutes les situations rapportées aux policiers, mais bien les situations qui ont été jugées suffisamment importantes pour qu’ils ouvrent un rapport », précise-t-elle.

La pandémie, un facteur potentiellement aggravant

L’étude de Statistique Canada utilise des chiffres qui s’échelonnent de 2010 à 2020, ce qui exclut les années de pandémie. L’isolement et les débats liés à la vaccination pourraient avoir fait grimper le nombre de cas de violence déclarés, selon Pierre Lynch, président de l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR).

« La vaccination et la non-vaccination ont pu créer des heurts. Les personnes aînées étaient plus susceptibles de porter des masques, et face à ça, il y a sûrement des gens antimasques qui pouvaient s’en prendre à elles », déclare M. Lynch.

Pour le président de l’AQDR, la violence envers les personnes âgées est « un phénomène sociologique inacceptable pour une société évoluée comme la nôtre ».

« Il n’y a aucune raison valable qui justifie cette augmentation », conclut-il.