La traverse entre Matane, Baie-Comeau et Godbout, sur la Côte-Nord, est suspendue depuis mardi. Plus récent épisode d’une longue série de pannes survenues depuis plusieurs années, cette nouvelle interruption suscite la colère des usagers.

Les passagers joints sur place ne cachent pas leur lassitude, à l’image de Dany Collin, qui emprunte le traversier chaque année. « Il a tout le temps des problèmes. On n’est pas surpris quand il reste à quai, on est surpris quand il part ! », déplore-t-il.

Le traversier n’a pu assurer aucun des deux trajets quotidiens mardi et mercredi. Passagers et véhicules étaient sur le pont, mardi vers 9 h 30, lorsque le report des traversées a été annoncé. « Ils nous ont dit d’attendre midi pour avoir plus d’informations et savoir si le traversier pourrait repartir à 14 h, mais il n’est jamais parti », témoigne Dany Collin.

La Société des traversiers du Québec (STQ) dit avoir déterminé l’origine de cette panne après une maintenance planifiée dans la nuit de lundi à mardi. « La tentative de mise à jour effectuée par l’équipe externe a causé un problème d’interconnexion de différentes composantes électroniques, explique Simon Laboissonnière, responsable des communications à la STQ. Le problème a été identifié et nous sommes en attente de la composante à remplacer. »

Cette panne est loin d’être la première pour le traversier F.-A.-Gauthier, rendu célèbre par le très grand nombre de dysfonctionnements constatés depuis sa livraison en 2015.

Il avait notamment connu une interruption de service de 13 mois entre 2018 et 2020, et son remplaçant, le navire Apollo, avait été envoyé à la casse après seulement 17 jours de service. Les pannes successives du F.-A.-Gauthier lui ont valu l’année dernière l’obtention du prix Citron, remis par la Fédération canadienne des contribuables pour signaler un gaspillage des dépenses gouvernementales.

Le traversier vient d’être remis en service il y a un peu plus de trois semaines, après un arrêt technique obligatoire au cours duquel le navire Saarema-1 assurait la liaison entre Matane et la Côte-Nord.

Un « service public » en question

Résidant à environ une heure de route de Matane, Dany Collin a dû envoyer quelqu’un le chercher en voiture. D’autres n’ont pas eu cette chance, comme Marie-Ange Barriault, qui revenait d’une traversée en voilier avec son fils et qui a dû louer une chambre d’hôtel pour la nuit.

Souffrant de diabète, elle n’a pas pu prendre ses médicaments. Plus que la panne en elle-même, c’est l’absence d’initiative de la Société des traversiers du Québec qu’elle déplore : « Après 24 heures de navigation, on était épuisés. Ils nous ont mis dehors, sans même nous offrir un café ou un repas […] On a pu s’arranger pour commander au restaurant, mais je pense à toutes les personnes qui n’ont pas les moyens de faire ça… »

« Ils nous ont pris pour des vidanges », renchérit Dany Collin. Les passagers seront remboursés de leur billet, mais aucune solution de restauration ou de logement n’a été proposée par la STQ.

L’explication donnée par les employés sur place tient essentiellement au manque de moyens.

Ils nous ont dit que c’était un service public et qu’ils ne pouvaient rien faire pour cela. Mais quand un avion tombe en panne, on défraye des hôtels, on paye des repas. Là, ils nous ont juste demandé de débarquer.

Marie-Ange Barriault, utilisatrice du traversier

Pour atteindre la Côte-Nord, elle a dû emprunter le traversier entre Rimouski et Forestville, situé à environ deux heures de Godbout en auto.

Joint mercredi en milieu d’après-midi, le responsable des communications de la STQ a indiqué que le remplacement de la pièce manquante sur le F.-A.-Gauthier se ferait au cours de la soirée. Le maintien des traversées de jeudi reste incertain, a annoncé la société sur Twitter.