(Ottawa) Le mouvement des protestations contre les restrictions liées à la pandémie de COVID-19 continue de s’étendre à l’échelle du pays.

À Ottawa, les opposants ne montrent aucun signe d’essoufflement après une semaine de perturbations au centre-ville et à proximité de la Colline du Parlement.

Mais ils pourraient face à une première contestation judiciaire à leurs dépens. Un avocat d’Ottawa a présenté devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario pour plaider un recours collectif au nom de milliers de résidents de la ville demandant des millions de dollars en dommages-intérêts et une injonction « interdisant la continuité de la nuisance ». Le juge Hugh McLean a indiqué qu’il ne rendra pas de décision avant lundi.

Ottawa et plusieurs autres villes du Canada s’efforcent de faire en sorte que les manifestations demeurent pacifiques.

Le chef de police d’Ottawa, Peter Sloly, a indiqué que tous ses policiers étaient en fonction afin de s’occuper de la manifestation.

Selon ses estimations, il y avait environ 1000 véhicules et 5000 manifestants au cœur de la ville. Il signalait aussi la présence d’environ 300 contre-manifestants.

Il a décrit Ottawa comme « une ville assiégée », une situation pour laquelle la police n’a jamais été préparée.

« C’est un siège, a-t-il lancé. C’est quelque chose de nouveau dans nos démocraties. Je n’ai jamais vu rien de tel. Nous n’avons pas une loi sur la police qui pourrait nous permettre d’agir selon les circonstances. »

PHOTO PATRICK DOYLE, LA PRESSE CANADIENNE

Un convoi de tracteurs et de camions en direction d’Ottawa

Mais habituellement, dans un siège, les « envahisseurs » se tiennent à l’extérieur du périmètre d’une ville et bloquent l’approvisionnement.

Les tensions demeurent vives, car de nombreux résidents ont exprimé leur frustration, qualifiant la manifestation d’occupation.

En milieu d’après-midi, des milliers de manifestants cherchaient à se réchauffer auprès de petits feux allumés en face de l’Édifice de l’Ouest qui abrite la Chambre des communes. Ils ont fait griller des hot-dogs et distribué des plats sous des bâches. Deux hommes se sont promenés en cheval dans les rues de la ville, l’un portant un drapeau appuyant l’ancien président des États-Unis, Donald Trump.

Toutefois, au crépuscule, le chaos s’installait au sud de la Colline du Parlement.

Les rues avoisinantes étaient bourrées de véhicules, notamment des camions lourds, aussi loin que le regard peut porter. La police était absente, sauf près de la colline. Un feu à ciel ouvert illuminait une intersection. Tout près, un restaurant était rempli au maximum de sa capacité de clients qui ne portaient pas de couvre-visage.

Toutefois, une résistance à la manifestation semble en train de s’organiser dans la capitale nationale. Un groupe de contre-manifestants se sont rassemblés près du campement des protestataires au parc de la Confédération au centre-ville.

« Tout le monde s’attend à ce que ce soit un évènement agréable et sûr. Cependant, il existe toujours ce danger sous-jacent pour toutes les minorités visibles, toutes les personnes de la communauté LGBTQ », a déclaré samedi en entrevue un résident d’Ottawa et organisateur d’une contre-manifestation, Mackenzie Demers.

« Ces occupants, ils sont dangereux. Ils ont des camions. Il y a des rumeurs selon lesquelles il y a des armes. », a ajouté M. Demers.

Certains résidents s’interrogeaient sur le bien-fondé d’une telle démarche.

« J’ai comme l’impression qu’il s’agit d’un geste futile et stupide, et la dégradation de notre vie politique m’a découragé ce matin », a déclaré un résident d’Ottawa, Jeremy Owen, qui a organisé une pétition en ligne appelant la police d’Ottawa à expulser les manifestants.

Ailleurs au pays

À Toronto, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés du côté sud de l’Assemblée législative de l’Ontario, scandant en français « Liberté » sur une bruyante rythmique de reggae transmis par des haut-parleurs. Certains portaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « liberté=pas obligation » ou « laissez-vous guider par l’amour, pas la peur ».

La police de la Ville-Reine dit avoir arrêté un homme de 22 ans pour avoir allumé une bombe fumigène. Celui-ci devra répondre à des accusations de voies de fait armés, de méfait et d’administrer une substance délétère.

À proximité, quelque 200 travailleurs de la santé et des sympathisants ont marché de l’Université de Toronto et à un hôpital. Ils brandissaient des pancartes indiquant « pas d’imbéciles » ou « des masques N95 pour tous ».

Des manifestations se sont aussi déroulées à Québec, Fredericton, Winnipeg, Regina, Edmonton, Vancouver, Victoria et dans le village frontalier de Coutts, en Alberta.

Plusieurs corps policiers disent avoir appris des manifestations d’Ottawa. Ils ont élaboré des stratégies visant à protéger les infrastructures essentielles, comme des voies de circulation essentielles, les hôpitaux tout en empêchant des actes de violence.

Accident en Alberta

La GRC du sud de l’Alberta affirme qu’il y a eu des blessés à la suite d’une collision impliquant un tracteur agricole dans un convoi sur la route transcanadienne.

La police a déclaré que le tracteur se déplaçait lentement dans un petit convoi avec au moins une autre camionnette samedi après-midi à l’ouest de Brooks, en Alberta, lorsqu’un deuxième camion a heurté le pare-chocs arrière du premier camion, le poussant hors de la route.

Le deuxième camion a continué d’avancer et a heurté le pneu arrière gauche du tracteur agricole, le cisaillant complètement.

Le conducteur du deuxième camion, âgé de 45 ans, a dû être extrait du véhicule et la police a déclaré qu’il avait été transporté à l’hôpital avec des blessures ne mettant pas sa vie en danger.

Une femme de 27 ans qui se trouvait dans le premier camion a également subi des blessures ne mettant pas sa vie en danger et a été transportée à l’hôpital, tandis que l’homme de 38 ans qui conduisait le tracteur a été légèrement blessé.

La police a indiqué que l’accident montre à quel point les convois de grande taille peuvent réduire considérablement la sécurité routière.