« Vous n’êtes pas les seuls à vous poser des questions sur vos différences », a lancé Isabelle Racicot à 10 000 élèves du secondaire réunis dans un webinaire, mercredi matin. C’est le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL) qui a organisé cette conférence sur la diversité après avoir appris que des élèves de communautés culturelles avaient été victimes d’intimidation en lien avec l’origine de la COVID-19.

Tour à tour, l’animatrice Isabelle Racicot, l’écrivaine Kim Thúy, le rappeur Samian et le chef de police Fady Dagher ont abordé leur propre passage à l’école secondaire. « J’ai trouvé ça difficile parce que je voulais ressembler à la majorité », a dévoilé Isabelle Racicot aux élèves du centre de services scolaire Marie-Victorin qui écoutaient la conférence en direct.

L’artiste Samian, né d’une mère algonquine et d’un père québécois, a parlé de ses écoles et de son adolescence comme d’un « grand défi ». « Sur la réserve, les jeunes me battaient parce que pour eux, j’étais un Blanc. Et quand j’allais chez mon père à Amos, les jeunes me battaient parce que pour eux, j’étais amérindien […] C’est l’écriture qui m’a appris à grandir. »

Avec l’âge, Samian s’est réconcilié avec ses origines. Il se dit maintenant fier de sa culture et de sa langue algonquine. « Je peux me sentir 100 % québécois et 100 % algonquin. Je n’ai pas besoin de les séparer », a dit celui qui sortira un album en algonquin d’ici quelques mois.

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Samian, rappeur

L’autrice Kim Thúy s’est aussi sentie « entre deux chaises » pendant longtemps. « Je ne maîtrisais ni le français ni l’anglais. Je ne me sentais ni québécoise ni vietnamienne. » Aujourd’hui, elle embrasse sa culture et elle considère ses différences comme un atout. « Je n’aurais jamais écrit des livres si je n’avais pas eu ses différences, cette culture différente, ce bagage différent. Ça m’a donné du matériel pour écrire. »

Isabelle Racicot est quant à elle convaincue qu’elle a obtenu des emplois grâce à sa couleur de peau, « pour respecter des quotas ». « Chaque fois, je me suis dit : “Je m’en fous de la raison pour laquelle on me met là. Je vais leur montrer que j’ai raison d’être là !” »

« Ne soyez pas gênés d’avoir été choisis pour vos différences », a-t-elle déclaré sur un ton encourageant.

« Ça m’a donné espoir »

Depuis le début de la pandémie, le chef de police de l’agglomération de Longueuil se sent interpellé par la détresse vécue par les adolescents en confinement. Des écoles sur son territoire lui ont également rapporté des cas d’intimidation visant des élèves de communautés ethniques. Fady Dagher a donc décidé de s’adresser directement aux jeunes pour les encourager à voir leurs différences comme des forces.

« Nous avons voulu leur présenter des acteurs jeunes, moins jeunes, de différents horizons pour qu’ils voient que c’est possible de réussir », a expliqué M. Dagher en marge du webinaire.

Mercredi matin, 15 écoles étaient branchées en même temps sur la conférence. À l’école Saint-Jean-Baptiste, Daniela Adao Manuel Da Silva, une élève de deuxième secondaire, s’est dite touchée par les histoires racontées par les intervenants du webinaire. Elle-même a été victime de remarques blessantes et racistes dans son école.

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Neah Malik

« On me demande souvent d’où je viens en Afrique à cause de ma couleur de peau. Mais je suis née ici. Je suis allée en Afrique une seule fois dans ma vie », cite-t-elle comme exemple.

Neah Malik était aussi enchantée à la fin du webinaire. « On a eu plusieurs conférences durant le secondaire, mais elles étaient plates. C’est la première fois que je sens que je connecte vraiment avec les animateurs », a dit l’élève de cinquième secondaire.

« Leurs histoires et leurs anecdotes, en tant que personne de couleur, ça m’a donné espoir pour le futur », a dit Neah Malik.