L’ancien photographe de La Presse Michel Gravel, une icône dans le métier, est mort mercredi à l’âge de 84 ans. Considéré comme l’un des chefs de file du photojournalisme au Québec, il avait pris sa retraite en 2005, au terme d’une carrière couronnée de succès. Ses proches, eux, se souviennent aussi d’un homme modeste et profondément rassembleur.
« Dans la famille, il était vraiment le pilier central. Il a toujours été très humble et il faisait très peu part des personnalités célèbres, autant politiques que culturelles, qu’il rencontrait. Ç’a toujours été quelqu’un qui faisait son travail. Pour lui, c’était naturel de le faire. Et il ne s’en est jamais vanté », a raconté son fils Alexandre Gravel, en entrevue avec La Presse mercredi soir.
Hospitalisé depuis le 15 novembre dernier, Michel Gravel avait contracté la COVID-19 dans les dernières semaines, mais il s’en était toutefois remis et n’en est pas mort. « On peut dire qu’il a été fort jusqu’à la fin. Il est même passé à travers ce virus, il l’a combattu et s’en est sorti comme un chef », a ajouté son fils.
Je pense qu’il a su transmettre ses valeurs tout au long de sa vie à ses proches. Il avait de l’amour pour sa famille jusqu’à la fin. Ça démontre à quel point il en avait.
Alexandre Gravel, fils de Michel Gravel
Julie Deschênes, la conjointe de Michel Gravel qui a aussi travaillé à La Presse, a été à ses côtés jusqu’à la toute fin de sa vie. Le défunt laisse dans le deuil ses trois enfants ainsi que ses six petits-enfants.
Un parcours impressionnant
C’est en 1954 que Michel Gravel fait ses débuts sur le marché du travail, d’abord comme photographe affecté aux sports. Il travaille notamment au Studio David Bier entre 1956 et 1957, avant d’être recruté par le quotidien Le Devoir. Aussi passé par le média anglophone The Gazette entre 1959 et 1965, le photographe est embauché à La Presse en 1965, où il restera quatre décennies. En 1973, il est envoyé en territoire risqué, au Viêtnam, alors que la guerre fait rage dans ce pays asiatique.
Une dizaine de prix prestigieux ont été remis à M. Gravel au fil de sa carrière. Il a notamment remporté le Grand Prix national canadien deux fois, et a aussi été nommé photographe de presse de l’année en 2005, l’année de sa retraite. Il a aussi reçu le prix de l’Association des photographes du Canada (APC).
C’était vraiment un pionnier de la photo. Il aura fait tout le spectre de la photo, des appareils 4x5 au numérique. C’était un excellent photographe, peut-être le meilleur de sa génération. Il était très méticuleux.
Jean Goupil, ancien photographe et chef de division photo à La Presse
Sur le plan personnel, M. Goupil se souvient d’un « chic type », fiable et calme. « Il ne faisait pas de vagues, n’était pas nerveux. On pouvait se confier à lui. Et chaque affectation avait une valeur pour lui », lâche-t-il.
L’ancien photographe Robert Mailloux, lui, a connu Michel Gravel dans les années 1970, au moment de son arrivée à La Presse. « C’était un homme très intelligent qui avait son franc-parler. Quand il avait quelque chose à dire, il le disait de façon très claire. Pour moi, c’était un modèle. Il est parti en 1996, mais pendant des années, il a continué à travailler un jour par semaine », rappelle M. Mailloux.
« Il était vraiment excellent. La rétrospective de sa carrière à la Maison Frontenac, il y a quelques années, était d’ailleurs vraiment impressionnante », a aussi réagi l’ancienne journaliste Monique Prince, aujourd’hui présidente des Travailleurs retraités de l’information de La Presse (TRIP).
D’autres anciens collègues toujours actifs ont aussi voulu lui rendre hommage. « Michel était un homme doux et bon. Un artiste, qui aimait beaucoup les artistes et qui en faisait de magnifiques portraits. Il a accompagné plusieurs jeunes qui débutaient leur carrière, autant photographes que journalistes, parce qu’il nous donnait des conseils avec beaucoup de générosité et un authentique désir de partager son savoir immense. Heureusement, il nous reste ses photos qui ont marqué l’histoire », a dit l’actuelle directrice des équipes de production et de photo, Stéphanie Bérubé.
« C’était un grand monsieur. Il était discret, humble, calme. Et il savait observer. Je l’ai côtoyé dans sa fin de carrière, assez pour tisser des liens. Amoureux de football et des Alouettes, il continuait de shooter bénévolement sur le bord du terrain alors que j’étais photographe d’équipe. Il me prodiguait des conseils et surtout des anecdotes », s’est aussi souvenu le photographe de La Presse Patrick Sanfaçon.