Une vingtaine de personnes se sont rassemblées à Laval, samedi, pour soutenir la famille du jeune Hani Ouahdi, tué par balles jeudi dans l’arrondissement d’Anjou, à Montréal. Parmi ces membres de la communauté algérienne, beaucoup exigeaient des actions pour mettre fin à la violence dans les rues de la métropole.

« Indépendant », « généreux », « souriant », un « ange » : les bons mots en souvenir d’Hani Ouahdi ont fusé parmi le groupe de personnes endeuillées rassemblées devant la maison familiale du jeune homme, samedi soir, à Laval. Sur place, amis et connaissances ont bravé le froid mordant pour offrir leurs condoléances et leur soutien à la famille Ouahdi. Un abri d’hiver pour automobile avait même été transformé en tente pour accueillir les visiteurs.

La famille estime que près de 300 personnes se sont relayées ainsi depuis vendredi, un hommage à la nature généreuse du jeune homme. Les gens présents ont d’ailleurs accueilli La Presse avec ouverture. Ils souhaitaient dénoncer la violence qui sévit dans la métropole. « C’est une gangrène, une maladie qui prend de l’ampleur », s’est insurgé un ami de la famille.

« On a fait des milliers de kilomètres pour fuir le terrorisme, pour offrir une vie meilleure à nos enfants », a ajouté avec émotion Mustapha Ouahdi, père de la victime. « Maintenant, on enterre nos enfants… »

Le rêve d’une nouvelle vie

Hani Ouahdi, 20 ans, habitait à Toronto depuis quelques mois. Il venait tout juste de revenir à Montréal pour aider sa mère, qui allait subir une opération aux yeux, a affirmé M. Ouahdi. Le jeune homme travaillait dans la sécurité et prévoyait commencer des études universitaires. Il avait même le projet de se marier, se remémore son père, encore sous le choc.

PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE OUAHDI

Mustapha Ouahdi et son fils, Hani, au centre-ville de Montréal, en 2020

La famille est venue d’Algérie il y a une douzaine d’années. M. Ouahdi était juge et sa femme pratiquait la médecine. Au Canada, ils souhaitaient offrir une nouvelle vie à leurs trois enfants : Hani et ses sœurs jumelles, âgées de 18 ans.

Le jeune homme n’était pas connu des services de police et n’avait pas d’antécédents criminels. Rappelons qu’en fin de journée jeudi, il a été atteint par balles alors qu’il se trouvait dans un véhicule garé dans l’arrondissement d’Anjou, à Montréal. Un adolescent dans le véhicule a aussi été blessé et a fui les lieux pour se réfugier dans un dépanneur avoisinant. Hani Ouahdi a succombé à ses blessures dans la nuit de jeudi à vendredi, tandis que le jeune de 17 ans a survécu et est dans un état stable.

La police a indiqué connaître ce dernier, qui collabore à l’enquête. Les personnes rassemblées chez la famille Ouahdi, à Laval, ont affirmé à La Presse que cet adolescent n’était pas lié à des activités criminelles. Il était connu des services de police en raison d’une infraction routière, a soutenu l’un d’eux.

Aucun suspect n’avait été arrêté samedi dans ce dossier, et l’enquête est toujours en cours, a précisé Jean-Pierre Brabant, porte-parole du Service de police de la Ville de Montréal.

Une passion pour la musique

« Il voulait simplement faire de la musique et être heureux », a raconté à La Presse Tiffany, amie d’Hani Ouahdi, qui a préféré taire son nom de famille. « C’était une bonne personne, toujours souriante, de bonne humeur. »

Le jeune rappeur répétait dans un studio situé à Anjou, dans le secteur où le meurtre a eu lieu, a indiqué son père. C’est ce qui pourrait expliquer sa présence là-bas.

PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE OUAHDI

Hani Ouahdi, lors de son 17e anniversaire

Le rap faisait partie de la vie d’Hani Ouahdi depuis ses 16 ans. Il était connu sous le nom d’artiste Dzairy, qui signifie « Algérien » en arabe. « Il avait du talent, beaucoup de gens l’aimaient », a raconté Tiffany. « Il était passionné de rap », a aussi témoigné une autre amie, Lina, qui a vu Hani la veille du meurtre. « Cette passion occupait une grande partie de son temps, et il travaillait fort là-dessus », a-t-elle ajouté.

Selon Lina, Hani Ouahdi s’est retrouvé « au mauvais endroit, au mauvais moment ». « Il n’était pas impliqué dans ce genre d’histoires [criminelles] et n’avait pas ce genre de fréquentations », a-t-elle souligné.

Pour Mustapha Ouahdi, la douleur est encore irréelle : « C’était mon bras droit. Je me sens comme un oiseau qui n’a plus d’ailes. Je n’ai jamais imaginé que, dans la vie, mon enfant partirait avant moi, témoigne-t-il. J’ai envie qu’on fasse quelque chose [contre cette violence]. Je veux que mon fils soit le dernier sur la liste. »

Avec la collaboration de Mayssa Ferah, de Coralie Laplante et de Daniel Renaud, La Presse