(Québec) L’Ordre des agronomes du Québec dit vouloir séparer le conseil et la vente de produits pour protéger le public, mais que cela devrait se faire dans le Code de déontologie et non dans la loi qui régit la profession.

Les agronomes ont été écorchés à la suite de l’affaire Louis Robert et des consultations sont en cours pour réformer la loi qui les régit, datant des années 1970.

Dans la réforme à venir, le gouvernement vise à faire une distinction très claire entre l’agronome qui prescrit les pesticides aux agriculteurs et celui qui facture le produit, cela dans le but de prévenir les conflits d’intérêts.

Dans un communiqué publié tard vendredi, l’Ordre soutient avoir « récemment déclaré vouloir aller au-delà de la proposition du gouvernement en séparant le conseil et la vente dans l’ensemble des champs de pratiques de l’agronomie, sans se limiter aux pesticides (phytoprotection) ».

« Pour ce faire, l’Ordre est d’avis que c’est dans le Code de déontologie qu’il faudra apporter des modifications à ce sujet et non dans la loi elle-même. L’Ordre poursuit actuellement ses consultations afin de proposer la meilleure manière de faire au gouvernement du Québec et à l’Office des professions », a affirmé par communiqué la présidente de l’Ordre, Martine Giguère.

Si la présidente affirme que le « statu quo n’est pas une option », elle ajoute qu’il faut que les modifications proposées soient « applicables dans le quotidien des agronomes ».

« Il faut proposer la meilleure option pour protéger le public et préserver l’indépendance professionnelle », soutient-on dans le communiqué.

Dans une entrevue avec La Presse Canadienne diffusée plus tôt vendredi, Mme Giguère disait vouloir mieux encadrer « l’apparence de conflit d’intérêts » chez l’agronome qui à la fois conseille et vend.

Elle soutenait que des remparts étaient déjà en place pour éviter les conflits d’intérêts, comme une déclaration d’intérêts que doit émettre le professionnel.

De même, l’agronome ne peut plus toucher d’incitatifs ou de bonis pour vendre des produits tels que des pesticides. Un comité de travail a proposé 17 recommandations pour favoriser l’indépendance de leurs membres.

Elle reconnaît toutefois qu’il reste « du travail à faire » concernant l’apparence de conflit d’intérêts.

Cependant, « il est trop tôt pour l’instant pour dire jusqu’où on va aller », a affirmé en entrevue Mme Giguère.

« Le travail, la réflexion commence actuellement », a laissé entendre la présidente de l’Ordre des agronomes.

« Notre conseil d’administration a donné l’aval pour amorcer des travaux de réflexion, pour mieux encadrer cette apparence de conflit d’intérêts dans le double rôle de l’agronome, qui fait du service conseil et de la vente », dans le code de déontologie, a-t-elle expliqué à La Presse Canadienne.

Elle a admis qu’il faut rebâtir le lien de confiance avec la population. Elle a toutefois ajouté qu’elle n’a pas de doute sur la compétence et l’indépendance de ses membres.

« Je pense qu’il faut travailler à rebâtir la confiance envers le professionnel, parce que moi, je n’ai jamais douté de la compétence et du professionnalisme au cours des dernières années. »

Rappelons que les agronomes ont été éclaboussés à la suite de l’affaire Louis Robert en 2019.

Cet agronome à l’emploi du ministère de l’Agriculture était devenu un lanceur d’alerte en soutenant que l’industrie des pesticides a encore la mainmise sur une bonne partie du monde agricole. Il avait aussi indiqué qu’il avait subi des pressions pour le faire taire.

En 2021, le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, avait laissé savoir qu’il voulait moderniser la loi pour qu’il n’y ait plus d’ambiguïté entre le conseil et la vente.

Il avait également affirmé que les agriculteurs épandent encore trop de pesticides au Québec.