(Québec) La Cour d’appel vient de condamner le gouvernement du Québec à verser 425 898 $ à Me Louis-André Hubert pour l’avoir forcé à renoncer à son poste de juge administratif à la Régie du logement, en 2016, parce qu’il avait déjà été en relation avec la ministre de la Justice de l’époque.

Selon la décision rendue publique dimanche, le tribunal estime que « le gouvernement a menacé (Me Hubert) de le destituer » en faisant fi du principe d’indépendance des juges administratifs, ce qui l’a poussé à remettre sa démission.

Les juges de la Cour d’appel insistent dans leur décision sur le fait que « seul le Conseil de la justice administrative a le pouvoir de recommander la destitution d’un juge administratif de la Régie du logement ».

Selon le récit des évènements, Me Hubert a participé à un appel de candidatures en 2012 dans l’espoir de devenir régisseur (aujourd’hui juge administratif) à la Régie du logement.

À la suite d’examens et d’entrevues, il est sélectionné pour faire partie d’une banque de candidats. Puis, en 2015, le Secrétariat des emplois supérieurs l’informe qu’il sera nommé dans la région de Laval. Sa nomination est approuvée le 28 octobre 2015 par le Conseil des ministres du gouvernement libéral dirigé par Philippe Couillard.

Son mandat doit débuter en novembre, mais des reportages sont publiés dans les médias faisant état du fait qu’il est un ex-conjoint de la ministre de la Justice en fonction Stéphanie Vallée.

Suivra une série d’autres révélations concernant des critiques sur son travail et des affaires aux petites créances, qui vont toutes se solder par des désistements, mais la médiatisation de la chose aurait eu pour effet de forcer le gouvernement à vouloir étouffer la controverse en procédant à sa destitution par décret.

La décision de la Cour d’appel relate d’ailleurs une conversation téléphonique avec le responsable du Secrétariat aux emplois supérieurs qui informe Me Hubert d’une destitution imminente en raison de la controverse.

C’est cet appel qui a été retenu comme étant une menace à l’endroit de Me Hubert, justifiant ainsi le fait que sa démission n’était pas un choix libre, mais bien un geste provoqué par la menace.

« La destitution de “Me Hubert » comme régisseur à la Régie du logement ne pouvait intervenir qu’à la suite d’une recommandation du Conseil de la justice administrative, après la tenue d’une enquête. J’ajouterais aussi qu’il apparaît du dossier que n’eût été le battage médiatique, le gouvernement n’aurait pas menacé l’appelant de le destituer », écrit la juge Dominique Bélanger de la Cour d’appel.

Me Louis-André Hubert avait démissionné en décembre 2015, ou plutôt renoncé à sa nomination, puisqu’il n’avait encore jamais été assermenté à titre de régisseur.

La Cour d’appel du Québec condamne le Procureur général du Québec à verser à Me Hubert 410 898 $ à titre de perte de revenus ainsi que 15 000 $ en dommages moraux. Le gouvernement devra également assumer tous les frais de justice autant en première instance qu’en appel.