La pandémie de COVID-19 a fait voler en éclats les patrons de déplacements grâce auxquels on planifie les services de transport collectif dans la région de Montréal. L’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), qui finance ces services, lance un appel à toute la population de son territoire pour y voir plus clair dans les changements d’habitude des gens. En d’autres mots, l’ARTM a besoin de savoir où vous allez pour mieux savoir où elle s’en va.

L’Autorité vient de mettre en ligne un questionnaire qui vise à documenter ces nouvelles habitudes de déplacements pour le travail ou les études qui se sont imposées avec le confinement, les restrictions sanitaires ou le télétravail. L’ARTM s’intéresse à tous les déplacements : ceux des automobilistes, des utilisateurs des transports collectifs, des cyclistes, des marcheurs et même des gens qui ne sortent presque jamais.

Ce questionnaire n’est que la première étape d’une enquête baptisée Perspectives Mobilité, qui se déploiera sur plusieurs volets jusqu’en 2022. Dans les semaines à venir, pas moins de 70 000 ménages choisis de façon aléatoire recevront par la poste une invitation à participer à cette enquête, pour produire un échantillon représentatif. Les grandes entreprises seront aussi invitées à participer à l’exercice. Un premier rapport est promis dès le printemps 2022.

De nouveaux modèles

Depuis une cinquantaine d’années, une succession de grandes études dresse un portrait statistique de la mobilité dans l’ensemble du territoire métropolitain. Ces études origine-destination (O-D) ont permis de déterminer avec précision les grandes tendances dans les habitudes de déplacements de la population, et leur évolution sur plusieurs dizaines d’années. La dernière étude O-D date de 2018. La prochaine est prévue en 2023.

Sauf qu’aujourd’hui, à mi-chemin entre ces deux études, les habitudes quotidiennes induites par la pandémie « sont sensiblement différentes de ce qu’on observait en 2018, et possiblement de ce qu’on va observer lors de la prochaine enquête, en 2023, quand une nouvelle “normale” se sera installée », dit le stratège en chef de l’ARTM, Daniel Bergeron.

Pendant cette transition, ajoute le directeur exécutif Planification des transports et mobilité de l’ARTM, « on veut savoir à quoi s’attendre en termes d’interventions sur les services aux usagers. Mais ce qu’on va observer comme nouvelles habitudes va surtout nous aider à préparer la prochaine enquête », dans un contexte où le télétravail est appelé à transformer les besoins en transports.

Une rupture

La pandémie, ajoute Catherine Morency, chercheuse spécialisée en transport à la Chaire sur la mobilité des personnes de Polytechnique Montréal, a produit une « rupture » dans les tendances observées.

Les nouvelles habitudes que la population conservera en partie après la pandémie de COVID-19 auront des répercussions majeures sur la façon d’offrir les services de transports en commun. « On a besoin de ces données pour mieux réfléchir sur la façon dont nos réseaux, nos rues, nos systèmes de transport vont devoir se transformer », ajoute la chercheuse.

« Il y a des gens qui vont travailler à des heures différentes, plutôt qu’en heure de pointe, ou qui vont faire des demi-journées au bureau pour revenir chez eux l’après-midi, poursuit-elle. Il y a toutes sortes de scénarios qui peuvent se produire, et on doit en tirer tous les futurs possibles pour que nos réseaux de transport puissent répondre convenablement à cette demande. »

Après 19 mois de pandémie, la fréquentation actuelle des réseaux de transport collectif de la région métropolitaine est équivalente à environ 55 % de ce qu’elle était en mars 2020, au début de la crise sanitaire.

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