Des restaurateurs du Saguenay–Lac-Saint-Jean ont été surpris d’apprendre vendredi que le chef du Parti conservateur du Québec (PCQ), Éric Duhaime, prévoyait tenir des évènements partisans entre leurs murs. Rapidement, les propriétaires des établissements ont fait savoir qu’ils refusaient d’être les hôtes de tels rassemblements.

« On a tous vécu la même affaire. On l’a appris ce matin, par des clients », a affirmé Vladimir Antonov, propriétaire de la microbrasserie Hopera, à Jonquière.

Tout comme celle de l’Hopera, la boîte de messages textes du Bistro Café Summum, à Chicoutimi, et de la Microbrasserie du Lac-Saint-Jean, à Saint-Gédéon, ont été remplies de messages de clients mécontents. Ils s’opposaient au fait que les établissements reçoivent M. Duhaime pendant le mois de juillet.

Le PCQ a annoncé une série d’évènements se déroulant dans la région sur sa page Facebook.

Les restaurateurs ont tous reçu un appel pour une réservation de 10 personnes du PCQ, qui souhaitent venir discuter de politique. Ils n’ont jamais été mis au courant de la présence du chef de parti.

« Pratique assez douteuse »

« M. Éric Duhaime s’est invité au Summum sans notre permission. J’aimerais préciser que nous n’avons jamais été informés et que nous trouvons cette pratique assez douteuse. Il va de soi qu’il ne franchira pas les portes de notre établissement », a quant à lui écrit le copropriétaire du Bistro Café Summum, Bénédict Morin, sur sa page Facebook. Des messages du genre se sont mis à circuler sur les réseaux sociaux.

« Notre manière de penser à l’Hopera ne marche pas du tout avec les convictions de M. Duhaime, on est même à l’opposé de lui », a déclaré Vladimir Antonov, en disant qu’il ne refuse pas que des personnes viennent discuter de politique à l’Hopera.

« L’histoire que les gens peuvent venir pour rencontrer Éric Duhaime chez nous, là, c’est complètement différent », a précisé M. Antonov.

PHOTO PAUL CHIASSON, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Sylvain Gaudreault, député péquiste de Jonquière

Le député de Jonquière du Parti québécois à l’Assemblée nationale, Sylvain Gaudreault, a réagi à la nouvelle sur sa page Twitter. « L’Hopera, c’est une gang d’entrepreneurs de mon comté hyper présents et engagés. Je les appuie entièrement dans cette prise de position. Des valeurs d’entreprise, ça existe, et ils l’assument entièrement », a-t-il écrit.

Nous, on ne prend pas position pour un parti politique. Si vous voulez juste venir prendre une bière avec votre famille, vos employés ou votre gang, il n’y a aucun problème. Mais on n’est pas là pour dire qu’on appuie un tel ou un tel autre parti.

Annie St-Hilaire, propriétaire de la Microbrasserie du Lac-Saint-Jean

Le responsable de la tournée d’Éric Duhaime au Saguenay–Lac-Saint-Jean, Jimmy Voyer, avoue ne pas avoir mentionné la présence du chef du PCQ lors de ses appels pour réserver des tables dans les différents restaurants. Il souligne cependant que les restaurateurs ont déjà reçu d’autres partis politiques entre leurs murs.

« J’ai répondu à deux propriétaires. Je leur ai dit que la cancel culture, ça se joue à deux. Aussitôt que vous dites non à un, vous entrez dans la joute politique. […] Nous autres, on a des dizaines de milliers de membres sur nos plateformes », a déclaré M. Voyer.

Duhaime blâme un « cheap shot » de ses adversaires

« Que les adversaires se mettent à faire des appels puis fassent de la pression sur ces gens-là, je trouve ça assez ordinaire », a déclaré Éric Duhaime en entrevue avec La Presse.

« J’y vois un cheap shot de la part de nos adversaires politiques », a-t-il précisé. Le politicien croit que ses opposants ont contacté les restaurateurs pour faire annuler les évènements.

La propriétaire de la Microbrasserie du Lac-Saint-Jean indique plutôt que ce sont des clients réguliers qui l’ont jointe. « On n’est pas fâchés contre M. Duhaime ou contre personne. On ne veut juste pas être identifiés à un quelconque parti », a dit Annie St-Hilaire.

Le chef du PCQ a déclaré ne « pas vouloir casser le sucre sur le dos des restaurateurs », qui ont été éprouvés par la pandémie.

« C’est la première fois qu’on a un problème, puis comme par hasard ce n’est pas un [restaurateur], c’est plusieurs », a-t-il affirmé, en mentionnant également la sortie publique de Sylvain Gaudreault.

« Quand nos adversaires commencent à faire ça, c’est parce qu’on commence à déranger. Ça, en politique, ce n’est pas nécessairement négatif, c’est la rançon de la gloire d’une certaine façon », a évoqué Éric Duhaime.

Il considère que ses adversaires craignent de voir son parti avoir « le vent dans les voiles ».