Des locataires d’une maison de chambres de l’arrondissement Ville-Marie, à Montréal, ont échappé à une éviction engendrée par des travaux non réglementaires, a annoncé la mairesse de Montréal, Valérie Plante, mardi. Le propriétaire du bâtiment n’avait pas enregistré son immeuble en tant que maison de chambres à la Ville.

L’arrondissement de Ville-Marie a refusé la demande d’agrandissement réclamée par le propriétaire de l’immeuble pour justifier l’éviction des locataires. Le 1845 boulevard de Maisonneuve est dorénavant officiellement reconnu comme une maison de chambres par Montréal.

« La décision de l’arrondissement a permis de protéger de l’éviction une quinzaine de locataires », a affirmé le coordonnateur du Comité Logement Ville-Marie (CLVM), Éric Michaud.

En avril, des locataires se sont tournés vers le CLVM, puisque leur propriétaire les incitait à signer un avis de départ volontaire, a expliqué M. Michaud. Quelques chambres se sont ainsi libérées.

« Il a commencé à démolir les chambres pour les transformer en studio ou en d’autres choses, sans permis », a déclaré Éric Michaud.

Des résidents de l’immeuble souhaitaient cependant y demeurer. Une plainte a été déposée anonymement à l’arrondissement Ville-Marie, concernant de potentiels travaux illégaux dans le bâtiment.

Les inspecteurs de la Ville de Montréal ont pris conscience que les rénovations n’étaient pas réglementaires, mais aussi que le bâtiment, étant dans les faits une maison de chambres, n’était pas reconnu ainsi sur papier.

« Le 30 juin 2021, la division des permis et des inspections de l’arrondissement de Ville-Marie a envoyé un avis écrit au propriétaire l’avisant qu’il devait régulariser sa maison de chambres comme telle, qu’il ne pouvait pas la transformer et qu’il devait rétablir les travaux qu’il avait entamés dans un délai de dix jours », a évoqué par courriel Robert Beaudry, responsable de la gestion et planification immobilière et de l’habitation à la Ville de Montréal.

Des arrondissements ont adopté un règlement visant à protéger les maisons de chambres en 2020, dont celui de Ville-Marie.

« Dans le Code civil du Québec, il y a des dispositions qui permettent au propriétaire d’évincer des locataires, soit pour agrandir ou subdiviser des logements », a précisé Éric Michaud. Le règlement de certains arrondissements pallie donc cette clause.

Cependant, l’immeuble en briques rouges du boulevard Maisonneuve était désert mardi soir, alors qu’une chaleur humide s’abattait sur la métropole. Selon le concierge du bâtiment, six locataires s’y trouvent toujours, parmi les 22 chambres disponibles. Plusieurs sont même en voie de quitter leur logement, a-t-il affirmé.

De moins en moins de maisons de chambres

« Beaucoup de maisons de chambres ont été éliminées au fil du temps à Montréal, il y en avait beaucoup dans Ville-Marie », a expliqué Éric Michaud.

Plusieurs de ces édifices ont été transformés en hôtels ou en condos, mais d’autres ont été achetées par des organismes à but non lucratif. Ce sont souvent des personnes dans une situation financière précaire qui ont recours à ce type de logement, a détaillé le coordonnateur du CLVM.

Il est moins coûteux de résider dans une maison de chambres que dans un appartement. Dans ce type d’habitation, la cuisine, la salle de bain ou la toilette se trouve à l’extérieur du logement, et est partagée avec plusieurs locataires. Dans le cas de l’immeuble du boulevard Maisonneuve, les salles de bain étaient communes.

« Cette situation est un bon exemple de l’ampleur de la crise du logement dans laquelle nous sommes plongés, la marchandisation de l’hébergement est un véritable problème et les propriétaires sont de plus en plus astucieux pour contourner les réglementations, mais nous travaillons fort pour les devancer », a énoncé Robert Beaudry

La Presse n’a pas été en mesure d’entrer en contact avec le propriétaire de l’immeuble.