Le directeur adjoint du SPVM, Bernard Lamothe, a bel et bien fait l’objet d’une destitution déguisée, conclut la Cour du Québec qui ajoute toutefois qu’elle ne peut forcer la Ville de Montréal à le réintégrer à son poste, comme il le réclame.

Dans un jugement rendu mercredi après-midi, trois juges de la Cour du Québec, chambre civile, donnent raison à M. Lamothe sur plusieurs points, mais affirment qu’ils n’ont pas le pouvoir de réintégrer un policier dans un poste précis et de s’ingérer dans l’organisation et la nomination des hauts gradés du SPVM.

Bernard Lamothe a fait l’objet d’allégations criminelles et a été suspendu en mars 2017, dans la foulée de la crise qui a secoué les affaires internes du SPVM.

Les enquêteurs de l’équipe mixte mise sur pied par la Sûreté du Québec pour enquêter ces allégations n’ont rien trouvé et M. Lamothe a été blanchi. Il a ensuite fait l’objet d’un processus disciplinaire qui n’a débouché sur rien.

Mais M. Lamothe n’a pas été réintégré notamment parce que le directeur du SPVM, Sylvain Caron, n’a pas voulu reprendre aucun des anciens hauts gradés suspendus dans la foulée de la crise de 2017, avait témoigné le chef lors des audiences.

Par contre, M. Caron et la Ville de Montréal ont multiplié les démarches pour lui trouver une nouvelle affectation en dehors du SPVM.

L’une de celles-ci était à l’Unité permanente anticorruption (UPAC), mais M. Lamothe l’a refusée, considérant que dans les faits, il n’aurait géré aucun employé et n’aurait eu aucun pouvoir de décision. À la suite de ce refus, en mars 2020, le comité exécutif de la Ville de Montréal a suspendu sans traitement M. Lamothe qui s’est alors adressé à la Cour du Québec, affirmant qu’il s’agissait d’une destitution déguisée et réclamant sa réintégration à un poste de directeur adjoint.

Postes déjà pourvus

« En définitive, quel que soit l’angle avec lequel le Tribunal examine la preuve, monsieur Lamothe a fait l’objet d’une réduction de traitement. Il a aussi fait l’objet d’une diminution substantielle de ses conditions de travail qui conduit à la conclusion qu’il a fait l’objet d’une destitution sans cause », écrivent les juges de la Cour du Québec, qui soulignent la carrière et les compétences de Bernard Lamothe.

Mais durant les procédures, l’organigramme des directions du SPVM a évolué et les demandes de M. Lamothe également. À la fin, celui-ci réclamait sa réintégration « comme directeur adjoint à une direction parmi celles qui existeront à la date où le jugement deviendra exécutoire ».

« La formulation de cette conclusion pose problème puisqu’elle implique comme voie de conséquence la réintégration de monsieur Lamothe dans un des quatre postes de direction au SPVM, postes qui sont tous comblés au moment de l’instruction ».

« Le Tribunal ne peut pas faire de la gestion et forcer le SPVM à évincer un des quatre directeurs adjoints actuellement en poste pour le remplacer par monsieur Lamothe ».

« … puisqu’en date des présentes, tous les postes de direction du SPVM sont comblés, faire droit à la conclusion recherchée impliquerait que les droits des personnes qui occupent ces postes seraient affectés, alors qu’ils n’ont pas été partie au litige », expliquent les magistrats.

Ceux-ci ne peuvent forcer la réintégration de M. Lamothe, mais renversent sa suspension prise par le comité exécutif de la Ville de Montréal en mars 2020.

Le Tribunal confirme ainsi que M. Lamothe est un employé du SPVM. Ce dernier reçoit son plein salaire mais n’est actuellement pas assigné à une affectation.

Le Tribunal ouvre également la porte au fait que M. Lamothe pourrait se faire rembourser les frais d’avocats par la Ville, lui qui la poursuit déjà au civil pour une somme de 1,8 million de dollars.

« Je suis heureuse que la Cour ait reconnu la très grande compétence et le parcours professionnel impeccable de M. Lamothe. J’ai trouvé triste que la Ville de Montréal ne l’ait jamais fait, mais maintenant, tout le monde saura que mon client a été blanchi à tous égards. M. Lamothe ne fera pas de commentaires voulant respecter son devoir de réserve », a déclaré à La Presse l’avocate de Bernard Lamothe, MJulie Chenette.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.