L’avocate de la mère de la fillette morte à Granby au printemps dernier y est allée jeudi matin d’une charge à fond de train contre la DPJ, « une grosse machine qui est contre les parents », « où personne n’est jamais imputable » et qui est totalement dépourvue « de gros bons sens » à son avis. 

« La DPJ est convaincue d’avoir toujours raison », elle donne dans « l’abus de pouvoir » et trop de dossiers y sont judiciarisés », allant à l’encontre des « principes fondamentaux de la justice naturelle », a dénoncé Me Valérie Assouline, qui est avocate en droit de la famille et qui s’est montrée atterrée de ce qu’elle voit depuis qu’elle s’est plongée dans cet univers.

Ce réquisitoire contre la DPJ a été fait devant la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, qui a été mise en place à la suite du décès de la fillette de Granby. La présidente de la Commission, Régine Laurent, a rappelé à Me Assouline que ce cas particulier (qui est judiciarisé) ne doit pas cependant être abordé et que c’est bien l’ensemble du système qui se retrouve sous la loupe, de manière générale.

Pour Me Assouline, la DPJ se positionne contre les parents alors qu’elle devrait au contraire être neutre et chercher à « les guider, leur donner des outils pour les aider à sortir d’une mauvaise passe ».

Me Assouline a donné l’exemple d’une famille de quatre enfants qui, à la suite d’un signalement, ont été éparpillés dans quatre villes différentes. La fratrie ne se voit qu’une fois par semaine, pendant 1 h 30, lors de visites supervisées. Les parents se sont repris en main depuis, mais avant que le tribunal ne soit saisi de la nouvelle réalité, cette famille continuera pendant peut-être un an d’être déchirée.

L’avocate a aussi dénoncé que trop de grands-parents aimants sont écartés alors qu’ils pourraient représenter la solution.

Elle-même mère de quatre enfants, Me Assouline a rappelé que personne n’est à l’abri de voir la DPJ débarquer dans sa vie. Avec un peu de chance, on se retrouve devant une intervenante expérimentée, mais on risque fort, aussi, de se retrouver face à « une étudiante qui sort du collège ».

Me Assouline a souligné que le blâme qu’elle porte ne s’adresse pas aux intervenants, qu’elle a qualifiés de « courageux ». Par contre, elle a tenu à dénoncer les gestionnaires et
 cette culture de la DPJ « où ce n’est jamais la faute de qui que ce soit, où personne n’est imputable. C’est comme cela que ça se passe à la DPJ depuis 40 ans ».

Oui, certains enfants doivent être protégés et certains dossiers doivent être judiciarisés et c’est justement pour que le système puisse bien s’y consacrer qu’il faut cesser d’embourber le système avec des parents qui sont ou qui peuvent devenir adéquats.

Les familles d’accueil sont payées pour s’occuper d’enfants qui ont été retirés de leur famille. Beaucoup de ressources doivent aussi être consacrées aux visites supervisées. Pourquoi ne pas consacrer moins de ressources à tout cela et plus de ressources pour « agir en amont », pour aider les parents ?

Dans trop de cas, selon elle, « la DPJ a brisé leur vie, leur famille, elle a brisé leur enfance.

Trop de familles sont « cataloguées, stigmatisées, jugées avant d’être jugées ».

La dénonciation de Me Assouline a été applaudie par des gens qui se trouvaient dans la salle.

Elle a reconnu qu’elle n’œuvre pas en droit de la jeunesse et que c’est en s’y plongeant ces derniers mois qu’elle a découvert tout cela et qu’elle a ressenti une grande impuissance.

Aux commissaires qui lui demandaient les assises de son appréciation globale de toute un système, elle a répondu qu’un regard extérieur à tout cela lui avait servi et qu’elle a passé les derniers mois à lire quantité de dossiers, y compris la nuit, et que ce qu’elle a lu et entendu l’a sidérée.

« Je ne comprends pas et je dénonce. »