Face à la possibilité de voir les travailleurs de l’usine locale de Bombardier manquer encore une fois de travail à compter de juin, la communauté politique de La Pocatière s’est réunie vendredi pour demander que l’on prolonge à nouveau le contrat de construction de voitures de métro Azur. Leur demande se heurte toutefois à un obstacle de taille à la Société de transport de Montréal (STM).

Le maire de La Pocatière, Sylvain Hudon, et le préfet de la MRC de Kamouraska, Yvon Soucy, ont mené vendredi une visite de représentants politiques et économiques de la région visant à demander au gouvernement du Québec de passer une troisième commande de voitures Azur à l’usine de Bombardier de La Pocatière, cette fois pour remplacer les voitures MR-73, en fonction depuis les années 70.

Le syndicat de l’usine et Bombardier Transport elle-même avaient lancé des appels similaires il y a un mois.

L’usine de La Pocatière emploie actuellement un peu plus de 400 personnes, qui pourraient toutes devoir être mises à pied à compter du mois de juin prochain. C’est à ce moment que devrait être terminé le dernier des 17 trains commandés par la STM et Québec en 2018. Les services de certains employés pourraient être retenus jusqu’en septembre.

« Un creux »

« Ils vont tomber dans un creux à partir du milieu de l’année prochaine, constate M. Hudon. Le carnet de commandes va être très mince. C’est une grosse inquiétude pour les employés et les fournisseurs. »

« Alstom s’en vient, normalement ils vont faire l’acquisition de cette usine-là », poursuit M. Hudon.

Je pense que stratégiquement, c’est mieux d’avoir un carnet de commandes bien garni, pour être capable de la conserver, mais surtout de développer un centre de développement complet pour les voitures de métro, entre autres.

Sylvain Hudon, maire de La Pocatière

Tous les intervenants gravitant autour de l’usine de La Pocatière ont à l’œil certains contrats qui pourraient se matérialiser au cours des prochaines années : tramway de Québec, tramways dans le Grand Montréal, ligne rose du métro de Montréal, etc.

« Malheureusement, on ne pourra pas se rendre à ces contrats-là, si jamais l’usine de La Pocatière en obtenait, parce qu’à partir du mois de juin, c’est 75 % de la main-d’œuvre qui va sortir de l’usine », craint pour sa part M. Soucy.

« Depuis 2006 que je vais régulièrement à l’usine et je pense que c’est la fois où j’ai vu le plus d’inquiétude. On en a déjà senti, mais pas comme cette fois-ci. »

Problème à la STM

C’est une situation similaire qui, en 2018, avait mené la STM et Québec à ajouter 17 trains à leur commande originale de 52. La décision avait été prise dans la foulée de celle de la Caisse de dépôt, qui avait préféré faire construire les trains du REM en Inde.

Le scénario sera toutefois plus difficile à répéter, prévient la STM. Pour accueillir les voitures Azur, elle a dû modifier de façon très importante son atelier Youville. Mais celui-ci ne pourrait accueillir plus de voitures Azur que ce que la STM a déjà prévu de recevoir.

« Pour recevoir d’autres trains, il faudrait faire des modifications à nos ateliers, et ce ne sont pas de petites modifications », a expliqué vendredi un porte-parole de la STM, Philippe Déry.

La mise à niveau de l’atelier Youville a nécessité plus de trois ans de travaux et des investissements de centaines de millions de dollars.

Environ la moitié du montant de 2,4 milliards pour les voitures Azur visait à couvrir les travaux de modification des infrastructures.

Philippe Déry, porte-parole de la STM

Alors que les voitures des anciens trains MR-73 peuvent être isolées et soulevées individuellement lors de travaux, celles des nouveaux trains Azur forment un tout qui doit être soulevé en entier, d’où l’importance des travaux de mise à jour nécessaires dans les ateliers.

Pour accueillir davantage de voitures Azur, la STM devrait refaire son atelier Honoré-Beaugrand. Aucun projet en ce sens n’est amorcé, de telle sorte qu’il est impossible d’accepter de nouveaux trains en 2021, fait valoir l’organisme.

La STM a annoncé en 2014 des investissements de 108 millions de dollars pour prolonger la durée de vie des voitures MR-73 jusqu’en 2036.