(Québec) Québec confie à la commissaire à la santé et au bien-être, Joanne Castonguay, le mandat d’examiner la performance du réseau de la santé, en particulier les soins aux aînés, lors de la première vague de la pandémie de COVID-19. Le gouvernement écarte donc – pour le moment – la tenue d’une commission d’enquête.

L’enquête de Mme Castonguay débute dès maintenant, a annoncé le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, à la sortie du Conseil des ministres, mercredi. La commissaire a pour mandat de jeter un « éclairage profond » et de mener une « analyse indépendante » de la « réponse » du réseau québécois au printemps dernier. Elle doit livrer ses recommandations d’ici le 1er septembre 2021.

Elle analysera aussi les enjeux liés à la gouvernance et à la gestion du système « qui ont fait obstacle à une gestion efficace des risques associés à la COVID-19 », indique-t-on.

« Je peux vous dire qu’elle peut aller pas mal loin », a lancé le ministre Christian Dubé.

PHOTO RYAN REMIORZ, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec

Le ministre de la Santé précise que c’est à la commissaire « de décider le niveau d’enquête et de recherche qu’elle voudra faire » au cours de ses travaux.

À Québec, les partis d’opposition ont critiqué le gouvernement de ne pas avoir déclenché une commission d’enquête publique pour faire la lumière sur la gestion de la crise sanitaire, notamment dans les CHSLD, où la pandémie a fait d’énormes ravages.

En commission parlementaire pour l’étude des crédits, mercredi, François Legault a expliqué avoir choisi d’aller de l’avant avec ce format d’enquête « pour avoir des réponses rapidement ».

« C’était l’objectif que je visais. On aurait pu pelleter le problème par en avant et se lancer dans une commission interminable. On a voulu un format qui va permettre de donner des résultats rapidement », s’est défendu le premier ministre, interrogé sur la question par les chefs du Parti libéral et du Parti québécois.

En entrevue à La Presse, Joanne Castonguay a souligné que l’article 21 de sa loi constitutive « lui donn[ait] tous les mêmes pouvoirs qu’une commission d’enquête, à l’exception de celui d’imposer l’emprisonnement ».

« Mes pouvoirs ne sont pas limités au niveau des enquêtes », a confirmé Mme Castonguay. Elle dispose notamment du pouvoir d’astreindre des témoins à comparaître si elle le souhaite.

Mme Castonguay soutient que son équipe aura « besoin de la collaboration de tous les acteurs du système de santé et de services sociaux » et que « tous seront appelés à partager leurs données ou leurs constats en toute transparence afin que nous puissions ensemble améliorer la performance du système ».

L’article 21 de la Loi sur le Commissaire à la santé et au bien-être stipule ce qui suit : « Pour la conduite d’une enquête, le commissaire […] est investi des pouvoirs et de l’immunité prévus à la Loi sur les commissions d’enquête (chapitre C-37), sauf celui d’imposer l’emprisonnement. »

Lors de l’annonce, le ministre de la Santé s’est par ailleurs fait clair : « Si, à la fin, [Mme Castonguay] décidait qu’elle veut une commission d’enquête, c’est son choix », a-t-il lancé.

ENQUÊTE « COMPLÉMENTAIRE »

L’examen de la commissaire à la santé et au bien-être s’ajoutera à l’enquête que mène la coroner en chef du Québec « sur certains décès survenus dans les CHSLD » et autres milieux d’hébergement pour aînés, notamment le CHSLD Herron, ainsi qu’aux travaux de la protectrice du citoyen.

« C’est pour ça que je réponds que c’est complémentaire avec tout ce qui arrive en ce moment », a précisé M. Dubé. « Nous, ce qu’on voulait regarder […], c’est qu’est-ce qui s’est exactement passé en termes de performance, de capacité, parce qu’on a manqué de capacité, et comment on a géré la crise, donc toute la question de la gouvernance », a-t-il poursuivi, en point de presse.

De son côté, Mme Castonguay assure que l’objectif de son équipe est de « bâtir une organisation agile ».

« Je ne veux pas avoir une organisation qui va mettre des années à produire un rapport et qu’ensuite, ça va être excessivement difficile d’éplucher le rapport en question », a-t-elle illustré.

La commissaire promet de « porter un regard global sur l’ensemble du système, au-delà des murs des CHSLD ou des résidences pour personnes âgées ». Elle sera accompagnée des experts Anne Lemay, économiste en santé, et Jean-Louis Denis, professeur de l’Université de Montréal, pour mener ses travaux.