Hillary Clinton veut-elle devenir la première présidente des États-Unis, en 2016? Une fois de plus, la question lui a été posée. À Montréal, cette fois, où l'ex-secrétaire d'État était de passage, mardi soir.

Après les événements des dernières semaines en Ukraine, qui se sont soldés par un décret de Poutine rattachant la Crimée à la Russie, et devant l'opposition de l'Occident, sommes-nous à l'aube d'une nouvelle guerre froide? La question a été posée, mardi soir, au terme de la conférence de Hillary Clinton, à Montréal. «J'espère qu'il n'y aura pas d'autre guerre froide, a répondu l'ex-secrétaire d'État. Mais ça dépend de Poutine. Ce qu'il a fait est illégal. Il réécrit les valeurs associées aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale. La Russie continuera son intimidation tant que les pays clés de l'Europe ne seront pas indépendants, l'Allemagne en tête. La clé, ici, c'est l'énergie. Il faut multiplier les sources et les réserves de gaz. La concurrence doit être plus forte pour faire baisser le prix de la ressource.»

Devant 4300 personnes, Hillary Clinton a aussi rappelé l'importance pour les dirigeants de bâtir de meilleurs modèles pour éviter d'être intimidé, devenir de meilleurs leaders et enrayer les inégalités sociales. Un discours de président américain? Ou plutôt d'éventuelle et première femme dirigeante des États-Unis? Comme chaque fois que la question de la course à la présidentielle de 2016 est abordée publiquement, la dame sourit en donnant une réponse évasive. «Je me sens profondément engagée envers mon pays, mais je ne sais pas ce que je vais faire dans quelques années ni sur le plan politique ni sur le plan personnel. Comme je l'ai écrit dans ma biographie sur Twitter : TBD [À déterminer] ! Vous serez les premiers informés!»

Hillary Clinton n'a pas manqué d'humour, mardi soir, le distillant ici et là au fil de ses propos sur son parcours politique des dernières années (112 pays visités en tant que secrétaire d'État) et la place que doivent occuper les femmes au sein de la société et dans les sphères économiques. «Les gens dans les dernières rangées doivent venir du Vermont!», a-t-elle lancé d'entrée de jeu pour évoquer l'immensité de la salle où elle donnait sa conférence. «J'ai visité plus d'une fois Montréal, raconte-t-elle. Bill et moi venons ici depuis longtemps, au départ quand on pouvait se promener incognito ! Mon seul regret, cette fois, c'est que je ne suis ici que pour une courte visite.»

Mais les rapprochements avec le Canada que Mme Clinton appelle de ses voeux ne sont pas que d'ordre personnel! Celle-ci souhaite que les enjeux liés au développement de l'Arctique, notamment, soient menés main dans la main par le Canada et les États-Unis. «Nous devons coopérer en ce qui a trait aux changements climatiques et unir nos voix, alors que l'Arctique s'apprête à vraiment s'ouvrir au commerce maritime, à l'exploration pétrolière, alors que la Russie a de façon agressive rouvert ses bases militaires et survole le territoire, dit-elle. Nous devons établir des règles avant que d'autres pays comme la Chine et le Japon ne sautent dans la mêlée.»

Ces propos n'ont cependant pas détourné le coeur de la conférence de l'ex-première dame des États-Unis, soit le rôle économique des femmes. «On a fait des progrès depuis la Conférence de Pékin en 1995, soutient-elle. Plus de femmes occupent des postes de direction, mais le fossé persiste. Au Canada, les réformes ont contribué à multiplier par trois leur présence à des postes de direction. Mais les aspirations de trop d'entre elles sont encore contenues à cause du plafond de verre, difficile à briser. Plus de 100 pays ont des droits qui limitent leur participation dans certains secteurs.

«Or, on sait ce que ça donnerait de les faire participer pleinement à l'économie, ajoute Mme Clinton. Il n'incombe plus seulement aux gouvernements de faire avancer les choses, mais au milieu des affaires, également, lequel peut jouer un rôle significatif en engageant des femmes.»

Six des thèmes abordés par Hillary Clinton à Montréal

1. Sur les femmes et le marché du travail

- «Il y a encore trop de femmes qui se heurtent à des plafonds qui bloquent leurs aspirations.»

- «Même si plus de femmes entrent sur le marché du travail au Canada, à l'échelle du globe, c'est une tout autre histoire.»

2. Sur les femmes et la politique

- «Je vais citer l'une des préférées parmi celles qui m'ont précédée, Eleanor Roosevelt. Elle a écrit dans les années 20 que si une femme se lance en politique ou dans un domaine public, elle a besoin d'avoir une peau aussi épaisse que celle d'un rhinocéros.»

- «Si vous ne le dites à personne, je vais l'avouer : les femmes sont encore jugées selon des critères différents. Ça s'appelle un double standard.»

3. Sur son passage au département d'État

- «Je dois dire qu'une fois prise la décision d'accepter [le poste], je n'ai pas regardé en arrière. Je ne me suis pas inquiétée, je n'ai pas eu peur, je n'ai pas douté que je pouvais faire ce travail. J'étais persuadée de pouvoir le faire. Il s'agissait de mettre de l'ordre dans ce qu'il y avait à faire. Il y avait une liste accablante de choses à faire.»

4. Sur la relation entre le Canada et les États-Unis

«Je pense que plus les États-Unis et le Canada pourront coopérer sur des sujets clés, plus ils seront forts. Il y en a notamment trois: l'énergie, l'Arctique et notre partenariat au sein de l'OTAN [Organisation du traité de l'Atlantique Nord].»

5. Sur Vladimir Poutine et la situation en Ukraine

«J'espère qu'il n'y aura pas d'autre guerre froide. Bien entendu, personne ne veut voir ça.»

«Nous allons nous tenir debout face à des gestes illégaux et nous allons montrer que nous avons un meilleur modèle, comme nous l'avons fait pendant 50 ans.»

6. Sur son éventuelle candidature à la présidence américaine

«Je n'ai pas encore pris de décision.»

- Alexandre Sirois