Saint-Élie était un village comme bien d'autres avant que Fred Pellerin se mette à en raconter les petits et grands secrets (et à en inventer quelques-uns): on songeait à fermer l'école faute d'écoliers, aucun commerce n'y survivait, la population déclinait... Mais depuis, les choses ont bien changé. Et la féerie de Noël permet de le constater hors de tout doute.

Une bonne boulangerie, un petit resto, 60 enfants à l'école, l'ancien presbytère devenu une chouette auberge et des visites guidées du village qui emploient 18 étudiants l'été! Saint-Élie-de-Caxton est un village bien vivant.

Pour la quatrième année, la municipalité offre même un tour d'hiver, baptisé «Féerie de Noël». Les rabat-joie et autres pisse-vinaigre diront qu'il y a des limites à presser le citron et que, à la fin, ça commence à sentir le mercantilisme. Après tout, qu'y a-t-il donc de si particulier à Saint-Élie-de-Caxton, à part le fait que Fred Pellerin y est né?

Rien, en apparence. Mais quand on visite les quatre rues de l'endroit (qui est peut-être un envers?), qu'on écoute ses gens si colorés et pleins de bonne humeur raconter leurs histoires à eux, on se dit que ce n'est pas pour rien que ce «conteux»-là n'est pas comme les autres: en fin de compte (conte?), le village n'est pas tellement comme les autres non plus! Né ailleurs, Fred serait peut-être agent d'assurances...

Féerie

En tout cas, la féerie opère pour vrai. D'abord, le soir de notre passage, il faisait un temps de chien à Montréal, la route était affreuse, il tombait un crachat immonde (absolument, un crachat, et non un inoffensif crachin), il n'était pas quatre heures et il faisait déjà nuit. Il y avait de quoi se demander ce qu'il pourrait bien y avoir de féerique dans une pareille bouillasse.

Eh bien: à Saint-Élie-de-Caxton, une belle petite neige toute douce couvrait le sol et poudrait les épinettes. À croire qu'«ils» en avaient fabriqué juste pour nous! («Ils», évidemment, ce sont les lutins et les fées, tellement nombreux dans ce village qu'ils s'écrasent sur les pare-brise le soir, selon Fred Pellerin).

La balade, qui se fait dans des chariots tirés par des tracteurs, passe et repasse pendant une heure et demie dans les quelques rues du village, avec une pause de 15 minutes à l'église pour la projection d'une vidéo qui met en images un conte de qui vous savez. Une heure et demie, cela pourrait paraître longuet, mais la bande sonore qui se fait entendre, narrée par le «conteux» lui-même et ponctuée d'interventions de ses concitoyens, est si pleine d'humour et d'esprit qu'on ne s'ennuie pas une seconde. Et puis c'est vrai qu'il est joli, ce village, avec sa belle église tout illuminée et ses maisons pimpantes.

À la fin, on s'arrête dans ce qui était le garage local, transformé en centre culturel à la vocation encore incertaine. Il y a là une petite exposition quelque peu hétéroclite - un train électrique, des éléments du décor du film Babine, les photos primées lors du dernier concoursFocus sur la Mauricie...

Souper traditionnel

Après la balade, ceux qui le désirent peuvent prendre un souper traditionnel à la station touristique Floribell, un peu à l'extérieur du village. C'est à la bonne franquette, cela se veut sans prétention et c'est sympathique comme tout, malgré la salle un peu froide et le décor pas très recherché. Au menu: ragoût de boulettes, dinde, pâtés à la viande et une curiosité toute mauricienne qu'on appelle «poutine» quand on veut être poli. (Est-ce la décence, la fausse pudeur ou la vocation familiale de ce journal qui nous empêche d'écrire en toutes lettres l'autre nom de ces boules de pâte farcie de viande hachée et pochées dans le bouillon? Nous nous contenterons de dire que ça commence par P et que ça désigne habituellement le sexe féminin dans la langue vernaculaire...).

Quant au groupe Grav'ô Portes (quel drôle de nom!), qui assaisonne la soirée de ses rigodons, quadrilles et autres chansons à répondre, il fait son boulot avec humour et brio.

On repart de là le sourire aux lèvres en se disant que, décidément, il faudrait un Fred Pellerin dans tous les villages du Québec.

Féerie de Noël à Saint-Élie-de-Caxton, jusqu'au 2 janvier. Renseignements et réservations à la Station touristique Floribell: 819-221-5731 www.floribell.com

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