Samedi 22 janvier 2011, 9h30. Deux ballons sur la piste d'atterrissage de l'aéroport de Saint-Jean-sur-Richelieu sont sur le point de décoller. Les conditions atmosphériques sont parfaites, à l'exception d'un seul «petit» inconvénient pour les passagers: il fait - 21 degrés Celsius! Qu'à cela ne tienne, on part! Récit d'une aventure mémorable, entre ciel et terre, au-dessus des plaines enneigées de la Montérégie.

Les pilotes

Deux montgolfières prennent part à notre envolée: Daniel Turcotte pilote le ballon officiel de l'International de montgolfières de Saint-Jean-sur-Richelieu, tandis que Richard Vaillancourt, «vole la banque», selon son expression, c'est-à-dire qu'il dirige le ballon à l'effigie de la Banque Laurentienne. Ces deux aéronautes sont de grands amis et volent si souvent ensemble qu'on les appelle, dans le milieu, «les frères Velcro», puisqu'ils atterrissent toujours à quelques mètres de distance. Seuls des pilotes très expérimentés peuvent y parvenir.

Les préparatifs

Dans le froid intense, c'est le branle-bas de combat sur la piste. Pour procéder à une envolée, il faut toute une équipe de préparation au sol. Après avoir assemblé la nacelle en osier, les équipiers entreprennent le gonflement du ballon, qui se fait à l'aide d'un immense ventilateur. Il faut trois personnes pour procéder à la manoeuvre, deux pour ouvrir la bouche (l'extrémité du ballon) et une troisième à la couronne, sans compter le pilote qui dirige les opérations.

Décollage!

L'envol d'un ballon ne s'apparente en rien au départ d'une navette spatiale, qui suit un compte à rebours. La montgolfière, elle, décolle subitement, même si les passagers ne sont pas encore à bord de la nacelle! Heureusement, un câble retient l'aéronef au camion. Malgré tout, la nacelle bouge en tous sens et les équipiers la retiennent, de peine et de misère, au sol, en raison des grands vents qui soufflent ce matin. C'est assez rock'n'roll. «Vas-y Simon, monte!» Par où? Comment? On saute à bord du mieux que l'on peut! Après ce moment intense, on coupe le câble et le ballon s'envole. Du coup, l'atmosphère devient complètement zen. On monte vers les cieux en n'émettant aucun bruit. On se sent léger comme l'air. Quelle sensation!

Voler au gré du vent

Après quelques minutes, on survole la rivière Richelieu, à 500 pieds d'altitude, en se dirigeant vers le mont Saint-Grégoire. Les montgolfières ne possédant aucun système de navigation, c'est le vent qui nous mène. Toutefois, les pilotes arrivent à se diriger partiellement en profitant des vents changeants à différentes altitudes. Combien de temps allons-nous voler? Ce matin, la durée du vol sera déterminée par le facteur froid. Quand nos pieds gèleront, on mettra fin à l'aventure.

Des panoramas en HD

En hiver, la plus faible concentration d'humidité dans l'air nous procure des vues d'une grande netteté. Notre regard porte loin, très loin: du centre-ville de Montréal, à l'ouest, jusqu'au mont Brome, à l'est. À nos pieds défile la blancheur infinie des plaines de la Montérégie, d'où émergent les monts Rougemont, Yamaska et Saint-Grégoire. Le froid? Puisque le vent nous transporte, on ne ressent pas le fameux facteur éolien. De plus, les deux brûleurs, d'une puissance de 17 millions de BTU chacun, tiennent le haut du corps bien au chaud. Donc, tout le froid se concentre dans nos pieds...

Faucher du blé d'Inde

Entre ciel et terre, les paysages sont spectaculaires, mais le plus enivrant, c'est faire du rase-mottes, c'est-à-dire survoler les champs de quelques mètres seulement. Le pilote Richard Vaillancourt a décidé de faire vivre des émotions fortes à notre photographe en fauchant les blés d'Inde avec la nacelle, puis en frôlant les arbres, accrochant au passage quelques branches. Ouf!

L'hiver, la meilleure saison

Pourquoi faire de la montgolfière en hiver? Selon les aéro-stiers, il s'agit de la meilleure saison pour pratiquer cette activité. Les avantages de la saison froide, c'est que l'on peut voler à toute heure de la journée, on peut atterrir n'importe où dans les champs des agriculteurs et on peut voler plus longtemps. L'été, les envolées se font que le matin ou le soir, pour éviter les tourbillons de vent dans le ciel, phénomène inexistant en hiver, il faut atterrir dans les champs en prenant soin de ne pas endommager les récoltes et la durée des vols dépasse rarement les 60 minutes.

L'atterrissage

«Attention, ça va cogner!», crie Daniel Turcotte. On s'agrippe, on s'accroupit et bang! on heurte le sol dans un champ de foin. Si le vol est d'une grande quiétude, il en va autrement de l'atterrissage! «Il arrive parfois que l'on racle le sol sur une longue distance, ramassant la neige à bord de la nacelle», raconte le pilote. Heureusement, ça ne sera pas notre cas. Après 1h15 de vol, nos deux pilotes atterrissent, côte à côte, dans le rang Saint-Charles, à Ange-Gardien, fidèles à leur réputation de «frères Velcro».

Un cadeau du ciel

La tradition veut que les disciples des frères Montgolfier sablent le champagne avec les propriétaires du terrain où ils atterrissent, afin de les remercier de leur accueil. «Cette tradition remonte au XVIIIe siècle, quand les premiers pilotes de montgolfières voulaient démontrer aux paysans qu'ils n'étaient pas des extraterrestres», raconte Daniel Turcotte. Comme le veut aussi la tradition, une petite cérémonie d'initiation a suivi mon baptême de l'air. Qu'est-ce que c'était? À vous de faire votre premier vol et de la vivre.

Comment s'envoler?

Pour vivre une aventure en montgolfière, il suffit de communiquer avec l'International de montgolfières de Saint-Jean-sur-Richelieu (450-346-6000 ou www.montgolfieres.com). L'organisme vous mettra en contact avec des pilotes professionnels de votre région. Des départs sont possibles un peu partout au Québec. Les tarifs sont négociés directement avec les pilotes. L'Association montgolfière du Québec recommande le prix de 200$ par personne. Cher? Il faut savoir que le ballon d'une montgolfière coûte environ 35 000$ et une nacelle, au moins 15 000$. En plus, lors d'une envolée, il faut une équipe pour venir vous chercher sur votre lieu d'atterrissage. La durée de vol varie de 45 à 60 minutes en été. En hiver, on peut voler plus longtemps. Règle générale, quatre personnes, en plus du pilote, peuvent monter à bord d'une nacelle. Les enfants sont bienvenus, à condition qu'ils soient assez grands pour voir par-dessus la nacelle!