Visiter Paris ne suffit pas pour explorer la «France romantique», ont affirmé cette semaine à Pékin des responsables de châteaux de la Loire, désireux de capter eux aussi la manne croissante des touristes chinois.

«C'est un marché qui démarre. Il y a dix ans, il n'y avait pas de touristes chinois dans la région», souligne Jean-Louis Sureau, directeur du château royal d'Amboise, en marge d'un forum sur le patrimoine mondial dans la capitale chinoise.

Surnommé la «pouponnière» du royaume de France pour les divers souverains qui y sont nés, ce château accueille près de 400 000 touristes par an, dont plus de 4000 originaires de Chine continentale.

M. Sureau espère voir se reproduire avec les Chinois ce qu'il a connu avec les Russes, qui en moins de 25 ans se sont imposés comme la première clientèle étrangère de son monument historique.

Cela en prend déjà le chemin: Amboise enregistre une hausse annuelle de 8% à 10% du nombre de touristes venus de l'Empire du Milieu.

Une progression toutefois moindre que celle dont profitent d'autres grands sites mondiaux. Les voyageurs chinois sont passés de 10 millions en 2000 à 83 millions en 2012, selon l'Organisation mondiale du tourisme.

Le Val de Loire, classé au patrimoine mondial de l'humanité de l'UNESCO --une référence importante aux yeux des Chinois--, souffre en effet de son relatif éloignement de Paris.

«Ils viennent en Europe huit à dix jours, pour faire un maximum de pays», décrit Gaël Ibramsah, directeur commercial du château du Clos Lucé.

Organiser un détour par le Val de Loire, à environ 200 kilomètres de Paris, représente donc un défi dans cet emploi du temps serré, où un jour est sacrifié pour les achats à rapporter au pays.

D'où la volonté des châteaux de la Loire de cibler non les «primo-visiteurs» mais ceux qui reviennent avec la France comme mono-destination. En 2012, plus d'un million de Chinois ont visité l'Hexagone.

Dans leur immense majorité, ils connaissent la Tour Eiffel, mais n'ont jamais entendu parler de Villandry, Azay-Le-Rideau ou Cheverny.

D'où les efforts entrepris sur les influents réseaux sociaux chinois pour combler ce déficit de notoriété, explique à l'AFP He Siyang, chargée de la promotion en Chine de Chenonceau, deuxième château le plus visité de France après Versailles.

Chenonceau (jusqu'à 8000 visiteurs par jour) vient d'ouvrir un compte «Weibo», le premier service de microblogues chinois, et saisit toutes les occasions de se montrer en Chine, assure-t-elle.

Une marque de vêtements de Shanghai, 16e Nord, y a ainsi réalisé son catalogue automne/hiver 2013.

Le château du Clos Lucé, où Léonard de Vinci a passé les dernières années de sa vie, joue lui la carte du génie de la Renaissance.

«100% des touristes chinois à Paris vont visiter le Louvre en 45 minutes, pour voir Mona Lisa», rappelle M. Ibramsah.

Dans un exposé à Pékin, en présence de responsables du ministère chinois de la Culture, il a vanté l'intérêt de pousser plus loin sur les traces du peintre de La Joconde.

Le domaine national de Chambord compte de son côté passer de quasiment 800 000 visiteurs annuels en 2012 à un million en 2019, en multipliant par cinq le nombre de Chinois.

La grandiose résidence de François 1er essaie également d'augmenter son exposition médiatique en Chine. Déjà jumelé avec le Temple du Ciel à Pékin, Chambord a hébergé il y a quelques mois un défilé de «miss Chine».

Ces châteaux disposent désormais de sites internet, de notices de visite voire d'audioguides en chinois.

Et, de plus en plus, ils s'inscrivent dans des circuits destinés à la clientèle asiatique, incluant le Bordelais (pour ses vins rouges appréciés en Chine) ou le Mont Saint-Michel.

Dans l'imaginaire des Chinois, la France est le pays de l'art de vivre et de la romance, une réputation qui a été récemment écornée par des agressions de touristes.

Atout France, l'agence de développement touristique de la France, a repris ce thème en lançant en 2012 en Chine une vaste campagne de promotion de la «France romantique».

Une voie également suivie sur les bords de Loire. Le château royal d'Amboise organise ainsi des «demandes en mariage» facturées 349 euros.

«On scénarise la demande en mariage sur le schéma de Roméo et Juliette», explique à l'AFP Marc Metay, directeur adjoint du château.

Cette offre ciblant les jeunes couples chinois comprend la déclaration amoureuse dans les jardins et un cocktail au champagne, un photographe immortalisant l'instant.

Des «cérémonies de mariage» sont aussi possibles, avec remise d'un «certificat» par un membre du conseil municipal d'Amboise ceint d'une écharpe tricolore.