L'Abitibi-Témiscamingue n'est pas la destination touristique la plus populaire au Québec. Loin de là. La vaste région gagne néanmoins à être connue, avec ses 20 000 lacs, sa nature d'une beauté sauvage et les personnages colorés qui l'habitent. Virée au pays de l'épinette.

> Nos photos

Deux gars, une voiture, quatre jours devant nous. Et un objectif: voir le plus possible de l'Abitibi-Témiscamingue. Un périple de 1100 km qui nous a menés de Ville-Marie à Val-d'Or, en passant par Rouyn-Noranda, Mont-Brun et Amos, sur des chemins où défilent tour à tour des forêts - beaucoup de forêts -, des lacs paisibles et des villages tout droit sortis d'une autre époque.

La route a été longue et les attractions, espacées. Mais nous avons réussi à trouver, la plupart du temps sans la chercher, une beauté surprenante à la région. Une bande de grues du Canada en train de picorer dans un champ près d'Amos. Des milliers de lupins - une fleur mauve tissée serrée sur une longue tige - dressés au bord de l'autoroute, entre un immeuble placardé et une mine. Un ours, surpris au lever du jour, qui n'a pas tardé à déguerpir en nous apercevant.

L'Abitibi-Témiscamingue mise d'abord et avant tout sur sa nature pour attirer les touristes, avec raison. L'immense région de 65 000 km2 compte quelques villes de taille moyenne, mais leur intérêt est assez limité, et leur apparence, rudimentaire. Nous sommes dans un pays de défricheurs où l'architecture et le design ne sont pas des priorités. Jadis comme maintenant.

Hors des villes, en revanche, les panoramas sont souvent impressionnants. Le Témiscamingue, au sud, est étonnamment vert et fertile avec ses nombreuses fermes et ses forêts remplies de feuillus. À mille lieues de la taïga que certains s'imaginent.

Partout, des lacs sont posés comme par accident. On en compte plus de 20 000 dans la région... soit l'équivalent d'un lac par sept habitants! Les pêcheurs sont aux anges, avec le doré et la truite qui abondent.

Au fur et à mesure qu'on progresse vers le nord, les paysages deviennent typiquement abitibiens. Les épinettes s'alignent à l'infini, pour laisser place de temps à autre à un village ou à un site d'exploitation minière. Mieux vaut prévoir de la bonne musique - ou de bons partenaires de voyage - car les trajets sont longs.

L'Abitibi-Témiscamingue ne compte pas des tonnes d'attractions touristiques «formelles», outre ses grands espaces et son immense réseau hydrographique. Les voyageurs à l'affût d'un flot incessant d'activités ont intérêt à coordonner leur visite avec l'un des grands festivals de la région (comme le Festival du cinéma international de Rouyn-Noranda, en octobre).

Les amateurs de plein air seront de leur côté séduits par le charme brut des lieux. Et tous apprécieront la gentillesse terre-à-terre des Témiscabitibiens, qui mettent parfois beaucoup d'efforts à tenter de vous convaincre que leur région est belle-et-pas-si-loin-de-Montréal-que-ça.

Voici les points forts de notre périple, entamé depuis l'aéroport de Rouyn-Noranda un matin de juin.

Les environs du lac Témiscamingue

Le lac Témiscamingue est gigantesque, avec ses 300 km2. Un magnifique réservoir de poissons, doté de certaines infrastructures touristiques de haut calibre, où l'on peut camper, louer des chalets, faire du canot ou du kayak.

À Duhamel-Ouest, près du complexe récréotouristique La Bannik, le fort Témiscamingue propose un voyage à l'époque de la traite des fourrures. Instructif, même si presque tout ici a été reconstitué.

À 40 kilomètres au sud, le minuscule village de Laniel est au contraire tout ce qu'il y a de plus authentique: quelques maisons, 186 habitants, peu de choses à faire. Mais un lac et de petites îles d'une beauté intense, surtout quand la brume du matin leur donne un aspect fantomatique.

Les chutes Topping, situées non loin, impressionnent par leur puissant débit.

Le refuge Pageau

Michel Pageau est devenu un véritable emblème de l'Abitibi grâce à tout le travail qu'il a fait pour soigner les animaux blessés.

Son refuge, ouvert au public depuis 1986, constitue l'une des attractions les plus populaires de la région.

L'organisme accueille des animaux de toute l'Abitibi-Témiscamingue, souvent des bébés devenus orphelins ou encore des adultes heurtés par des voitures.

Au moment de notre passage, de minuscules visons, des écureuils, des mouffettes et des marmottes s'accrochaient à la vie dans la nursery.

Le refuge, assez vaste, est parcouru de sentiers qui permettent d'aller observer les animaux dans leurs enclos. La plupart seront relâchés dans la nature au terme de leur convalescence.

Michel Pageau, aujourd'hui âgé de 67 ans, s'est quelque peu retiré de la gestion quotidienne. Mais il parle toujours avec autant de passion de sa relation avec les animaux.

Il affirme ne jamais avoir été blessé par un pensionnaire du refuge, malgré la robustesse de certains d'entre eux, comme les ours et les orignaux. «Je n'ai pas de cicatrices. Ou plutôt une seule, faite par un lapin quand j'avais 13 ans!»

La Cité de l'or

L'exploitation minière est indissociable du passé de l'Abitibi-Témiscamingue (et du renouveau économique qui balaie ces jours-ci la région). La Cité de l'or, à Val-d'Or, permet de mieux comprendre les conditions dans lesquelles les mineurs doivent travailler.

La visite nous mène à 300 pieds sous terre, au troisième niveau de l'ancienne mine Lamaque... qui en comptait 27!

Notre guide, Raymond Couture, nous a expliqué en détail les méthodes d'extraction du quartz aurifère. Une tâche titanesque: il fallait concasser cinq tonnes de roches pour obtenir une once du précieux métal.

«Les gens s'étonnent, mais c'est très bon car ça prend normalement 10 tonnes dans les autres mines», souligne-t-il.

La visite complète de la mine et des autres installations dure environ quatre heures. À quelques pas, le village historique de Bourlamaque est aussi intéressant à visiter. Il compte une soixantaine de maisonnettes en bois rond où étaient logés les mineurs.

Le hameau était considéré comme le «petit Westmount du Nord» à son ouverture en 1935, dit M. Couture, puisque toutes les habitations étaient dotées de l'eau courante et de l'électricité. L'une des maisons est ouverte au public.

Le parc d'Aiguebelle

L'Abitibi-Témiscamingue compte un seul parc national, situé au nord-est de Rouyn-Noranda. On y trouve des terrains de camping, quelques chalets et des lacs aussi reluisants qu'un miroir lorsque le vent est calme.

Les guides du parc d'Aiguebelle parlent avec entrain des phénomènes géologiques qui ont entraîné la formation de ces étendues d'eau et des montagnes environnantes.

De part et d'autre du lac La Haie, on peut observer de nombreux coussins volcaniques - causés par le refroidissement brutal de la lave -, de même que des blocs erratiques, soit de grosses pierres déposées au sommet des monts lors de la fonte des glaciers.

Il est possible de louer des canots et des kayaks pour pagayer tranquillement sur les eaux relativement peu fréquentées.

Les 2 et 3 août prochains, le festival Aiguebelle en spectacle promet de transformer le parc en oeuvre d'art à ciel ouvert. Pendant tout le week-end, des peintres, musiciens, danseurs et poètes offriront des performances en plusieurs lieux différents.

Malartic... et les autres

Malartic, comme plusieurs autres municipalités de la région, propose un retour dans le temps. En quelque sorte. Dans cette petite ville de 3700 âmes, les voitures se garent de biais dans la rue principale.

Plusieurs édifices arborent des façades de style western, héritées du boom minier des années 40. Au moment de notre passage, des haut-parleurs placés sur les lampadaires diffusaient de la musique country partout en ville!

L'Abitibi-Témiscamingue regorge de tels endroits au charme suranné. On y voit plein de motels des années 70, de salles de quilles logées dans des bâtiments insolites et autres casse-croûtes qui feront la joie des amateurs de rétro.

Les nombreuses décorations placées sur les terrains des bungalows - des chevreuils en plastique, des papillons géants ou encore des moulins à vent miniatures - sont rafraîchissantes à observer pendant les longs trajets.

__________________________________________________________

Les frais de ce voyage ont été payés par Tourisme Abitibi-Témiscamingue.