La Presse a soumis à trois nutritionnistes 12 aliments pour enfants vendus au Québec, dont l'emballage vante les vertus. Leur verdict? «Beaucoup sont des bonbons déguisés», dit Stéphanie Côté, d'Extenso, le centre de référence en nutrition de l'Université de Montréal et auteure d'Un enfant sain dans un corps sain.

Les collations à saveur de fruits Dora l'exploratrice sont «sans gras», avec «saveurs naturelles», clame la boîte. «Ça donne l'impression que ce sont des fruits, mais c'est presque exclusivement du sucre», observe Geneviève Nadeau, de Nadeau Nutrition. Les deux premiers ingrédients: sirop de maïs et sucre. On y trouve aussi de la tartrazine, «un colorant qui pourrait être la cause de l'hyperactivité chez les enfants, selon certaines études», souligne Mme Nadeau.

Même constat pour les coupes de gelée aux fraises Snack Pack Juicy Gels. «Préparé avec du jus de fruits fait de concentrés, naturellement sans gras», lit-on sur l'emballage. Or, on y trouve surtout de l'eau et du sucre. «Il y a zéro vitamine, zéro minéraux, zéro fibre», constate Mme Nadeau.

Le gruau Quaker pour enfants aux biscuits à la crème est, quant à lui, orné du logo «Bien choisir». Un gros coeur rouge figure sur la boîte avec la mention «Une source de fibres - Enrichi de cinq éléments nutritifs essentiels et de fer». Ce gruau contient aussi beaucoup de sucre, de sel, des biscuits au chocolat, et même un peu de gras trans.

«Ça crée de la confusion, regrette Véronique Provencher, professeure au département des sciences, des aliments et de la nutrition à l'Université Laval. D'abord, on se dit que ça ne peut pas être sain. Mais on voit le logo, le coeur, et on se dit que ce n'est pas si mauvais que ça!»

S'inspirer de la Grande-Bretagne?

Le problème, c'est qu'aucun règlement n'encadre les logos santé au Canada, souvent apposés par les fabricants eux-mêmes. «Le seul logo indépendant, c'est "Visez santé", de la Fondation des maladies du coeur», souligne Mme Nadeau. Et rien n'oblige à prendre en considération l'ensemble d'un produit avant d'en vanter un bienfait.

En Grande-Bretagne, on a implanté des étiquettes nutritionnelles uniformes appelées «feux de circulation»: rouge pour les mauvais aliments, jaune pour ceux qui sont corrects et vert pour les plus sains. «On pourrait créer quelque chose du genre ici, avance Mme Provencher. Nécessairement, ça pousserait l'industrie à changer la composition de ses aliments. Personne ne veut n'avoir que du rouge.»

Déjà, Quaker bouge. «Nous allons réduire la teneur en sodium et en sucre de plusieurs de nos gruaux instantanés en 2011», a indiqué à La Presse Kathryn Matheson, vice-présidente au marketing de Quaker Foods. D'autres fabricants, comme General Mills, ont répété que toute l'information nutritive sur leurs emballages «est exacte et basée sur des faits».

«Je ne sais pas s'il faut une réglementation ou plus de sensibilisation, observe Mme Côté. Mais il faut faire quelque chose pour que les gens ne se fassent pas leurrer lorsqu'ils achètent des produits.»