Une petite ville du Québec se demande pourquoi elle a été la cible d'une cyberattaque d'un groupe islamiste extrémiste, après avoir perdu contrôle de son site internet public pendant une douzaine d'heures.

La page d'accueil de la petite municipalité de Terrasse-Vaudreuil, à l'ouest de l'île de Montréal, a été piratée jeudi soir par quelqu'un qui se disait membre du groupe islamiste MECA (Middle East Cyber Army - «Cyberarmée du Moyen-Orient»).

L'écran affichait un message à la gloire d'Allah et des références à l'attentat meurtrier contre «Charlie Hebdo», le 7 janvier à Paris.

Les experts allèguent qu'il y a eu des centaines de cyberattaques à travers le monde dans les derniers jours, qui visaient des sites vulnérables.

«Je sais que partout au monde, il y a plusieurs milliers de sites qui ont été infiltrés par ce genre de choses et j'imagine qu'aujourd'hui c'était à notre tour, et on espère que cela ne se reproduira pas», a dit Ron Kelley, directeur général de la municipalité de Terrasse-Vaudreuil.

Des responsables de la Ville ont rencontré la Sûreté du Québec, qui a ouvert une enquête après avoir été alertée du piratage. Celui-ci a été résolu par l'informaticien de la Ville vendredi matin.

«De ce que j'ai compris, cela n'a rien à voir avec Terrasse-Vaudreuil, a dit le maire, Michel Bourdeau. Il s'agirait d'un concours de circonstances.»

Selon le maire de la petite municipalité de près de 2000 habitants, seule la page d'accueil du site a été piratée.

Le serveur qui contient les renseignements personnels des citoyens est distinct de celui qui héberge le site internet public, a assuré M. Kelley. Et il n'a pas été piraté.

«Le site est rétabli, les citoyens n'ont pas à craindre pour leurs renseignements personnels: rien n'a été touché», a-t-il répété.

Selon les deux hommes, la petite municipalité aurait été la cible d'un piratage complètement aléatoire. M. Kelley indique que Terrasse-Vaudreuil coule des jours paisibles, sans conflits culturels particuliers.

En lettres bleu éclatant, sur fond d'un Coran bourgogne et or, le livre sacré de l'islam, le message des pirates était: «Nous sommes musulmans. Le Coran est notre livre. Nous croyons en Allah (Dieu). Nous travaillons pour Allah. Au diable votre Charlie Hebdo».

Le message se terminait par le mot-clic OPFRANCE, qui a été utilisé par des pirates informatiques après l'attentat mortel contre le journal satirique «Charlie Hebdo» à Paris.

À la suite de cette attaque, plus de 19 000 sites internet en France ont été la cible de cyberattaques de divers groupes. Les autorités françaises ont indiqué qu'un de ces groupes était le collectif de pirates informatiques «Cyberarmée du Moyen-Orient», dont se réclamait le pirate à Terrasse-Vaudreuil.

Cette semaine, le magazine «Paris-Match» a publié une entrevue avec un jeune de 19 ans qui prétend appartenir à MECA. Dix adolescents seraient au coeur du groupe.

Au cours des derniers jours, MECA a modifié plus de 1000 sites un peu partout dans le monde avec le même message, explique Helmi Noman, chercheur principal au Citizen Lab de Toronto, qui surveille les activités en ligne et la sécurité.

«La vaste majorité des sites attaqués n'ont rien à voir avec Charlie Hebdo ou même la France, a-t-il dit dans une entrevue effectuée par courriel. Les pirates attachent un message politique à des sites web qui ont des vulnérabilités informatiques».

Une campagne en ligne pour recruter des pirates informatiques pour défigurer le site de «Charlie Hebdo» est en cours, a-t-il ajouté.

Mais le piratage a rendu les citoyens de Terrasse-Vaudreuil perplexes, a dit une journaliste locale.

Carmen Fabio, éditrice en chef du journal communautaire «Your Local Journal», a rapporté que les citoyens de la municipalité étaient incrédules.

«Je ne crois pas que personne ne l'a réellement perçu comme une menace. Mais la plus grande question était: de tous les endroits possibles, pourquoi ici?» a dit Mme Fabio.