La Coupe Rogers de Montréal a vu le jour dans le bureau de Paul Paré, grand patron d'Imperial Tobacco au début des années 80.

En 1980, Imperial Tobacco a acheté les droits de commandite des Internationaux de tennis du Canada, un tournoi mixte disputé à Toronto qui était jusque-là la chasse gardée de son rival Rothmans. Paul Paré a posé toutefois une condition: scinder le tournoi entre Toronto et Montréal, où son entreprise avait son siège social. Une année, Montréal accueillerait les femmes. L'autre année, ce serait les hommes.

Trente ans plus tard, le pari de Paul Paré tient toujours. «Encore aujourd'hui, ce système d'alternance est unique dans le monde du tennis», dit Richard Legendre, directeur du tournoi de 1990 à 2000.

La première présentation de la Coupe Rogers à Montréal, un tournoi hors-concours féminin remporté par Martina Navratilova en 1980, n'est pas passée à l'histoire. «Il pleuvait beaucoup et les gradins étaient vides, même pour la finale», se rappelle le directeur du tournoi Pierre Lamarche, qui est ensuite retourné enseigner le tennis à Toronto.

L'année suivante, Ivan Lendl a gagné le premier de ses quatre titres montréalais - un record qui tient toujours - alors qu'une des séances a été interrompue par une panne d'électricité. Malgré cet épisode mémorable, le tournoi a gagné en crédibilité avec les années.

En 1996, Montréal s'est doté d'un stade digne de l'élite mondiale du tennis au coût de 39 millions. «Le tournoi allait déjà bien, mais le nouveau stade a été un tournant. Il nous a permis de monter d'un cran au chapitre des foules et des commandites», dit Richard Legendre, aujourd'hui vice-président principal de l'Impact de Montréal.

La construction du stade Uniprix a coïncidé avec le début de la relation d'amour entre les Montréalais et le tennis féminin. Montréal est l'une des rares villes au monde où le tennis féminin attire autant de spectateurs que le tennis masculin. «C'était la grande époque des Graf, Seles, Capriati et Sabatini, dit Richard Legendre. Les gens aimaient bien le tennis féminin parce qu'il y avait plus d'échanges.»

Par surcroît, les amateurs de tennis du Québec ont eu droit à des drôles de champions masculins: Andrei Chesnokov en 1991, Mikael Pernfors en 1993, Chris Woodruff en 1997, Thomas Johansson en 1999 et Andrei Pavel en 2001.

Durant les années 90, seule une grande vedette du circuit masculin - Andre Agassi en 1995 - a triomphé à Montréal. «Les vedettes prenaient le tournoi de Montréal au sérieux, mais nous étions le premier tournoi de l'été et les possibilités de surprises étaient plus grandes», dit Richard Legendre.

La survie du tournoi montréalais a été menacée à deux reprises. En 1997, les joueurs ont voulu réduire le nombre de participants et Montréal a dû livrer bataille à Cincinnati. «À la suggestion de Yevgeny Kafelnikov, les joueurs ont toutefois décidé de garder le même nombre de tournois», dit Richard Legendre. En 2000, le gouvernement fédéral a interdit aux compagnies de tabac de commanditer les manifestations sportives et culturelles. Deux ans plus tard, l'entreprise de télécommunications Rogers s'est manifestée. Et depuis, les amateurs de tennis du Québec applaudissent leurs athlètes préférés à la Coupe Rogers.