Il n'y a pas que les médailles aux Jeux. La lutteuse montréalaise Dory Yeats nous l'a rappelé hier. Au fil de sa journée, elle a reçu un doigt dans l'oeil, des coups de tête et s'est fait arracher une mèche de cheveux.

Comme si ce n'était pas assez, elle a fini au pied du podium. Mais Yeats a terminé sa journée le sourire aux lèvres, fière d'elle, de son parcours olympique et de ses quatre combats.

« Cette année, je suis sortie de l'entraînement en pleurant au moins une fois par semaine. Alors ici, je me suis dit que j'allais tout donner. Je me suis dit que je n'avais pas fait ces sacrifices pour rien, dit-elle. C'est mission accomplie, je suis satisfaite. »

Yeats, dont le père Doug a représenté le Canada en lutte à quatre Jeux olympiques, a commencé sa journée par une victoire sur une adversaire nigériane qu'elle a totalement dominée. Le tirage au sort l'a ensuite envoyée dans la fosse aux lions. Contre la Japonaise Sara Dosho, future médaillée d'or, elle s'est inclinée.

Passée par le repêchage, elle a battu son adversaire turque. La victoire la qualifiait pour la petite finale, le quatrième combat de sa journée. Si elle battait la Suédoise Jenny Fransson, championne du monde 2012, elle gagnait le bronze.

La rencontre a eu lieu en soirée dans un aréna presque rempli. Yeats, 21 ans, a tenté de se maîtriser, mais elle était nerveuse.

« Je ne m'étais jamais battue contre elle, et pour être honnête, j'étais un peu intimidée. Elle a été championne du monde, elle est allée aux Jeux olympiques. Elle a beaucoup d'expérience. »

Le combat a été serré du début à la fin. Les deux athlètes se sont disputé la victoire bec et ongles. « Souvent, avec deux adversaires du même niveau, ça fait un combat intense. À la fin, on se donnait des coups de tête. C'était la guerre. Ça forge le caractère. La lutte, c'est magnifique ! »

Yeats s'est finalement inclinée 3-1, tentant dans les dernières secondes de renverser la Suédoise, forte comme un boeuf, en vain. Elle termine au cinquième rang dans la catégorie des moins de 69 kg.

Au fil de la journée, plusieurs lutteuses éliminées dans la petite finale ont éclaté en sanglots. Elles perdaient une médaille. Elles étaient anéanties. Yeats, elle, semblait à peine déçue.

« Évidemment, j'aurais aimé gagner une médaille. Tous les athlètes veulent une médaille. Mais je suis vraiment contente de ce que j'ai accompli », dit-elle.

« J'ai fait quatre matchs. J'aurais pu perdre mon premier et arrêter là. Avec un match, c'est difficile de savoir ce qu'il faut améliorer. Mais avec quatre, j'ai une bonne idée de ce que ça prend pour gagner aux Jeux olympiques. »

L'objectif pour la jeune lutteuse de l'ouest de Montréal a toujours été Tokyo et ses Jeux de 2020. Les Japonaises ont dominé la discipline à Rio. Mais Yeats ne s'en fait pas trop : la pression sera sur elles.

Son père Doug a participé à l'épreuve de lutte gréco-romaine aux Jeux de 1976, 1984, 1988 et 1992. Il n'a jamais gagné de médaille, ce que sa fille pense pouvoir faire dans quatre ans.

« J'ai vraiment hâte aux Championnats du monde, l'année prochaine, pour affronter les mêmes filles, lâche Dory Yeats. Je veux leur montrer que je peux devenir meilleure année après année. Et si tout se passe comme prévu, je vais arriver à Tokyo en 2020 et personne ne pourra me battre. »