Certains fans du Canadien retiennent encore leur souffle.

Jesperi Kotkaniemi disputera son huitième match dans la LNH ce soir contre les Flames de Calgary et à son dixième, samedi à Boston, la première année de son contrat de trois ans entrera en vigueur.

Des équipes préfèrent renvoyer leurs jeunes joueurs en Europe ou dans les mineures avant le dixième match si elles ne sont pas convaincues de l'impact à court terme de la recrue en question sur l'équipe.

Les indices dans le cas de Kotkaniemi ne laissent plus aucun doute. L'entraîneur Claude Julien lui-même affirme qu'on ne se pose même pas la question dans l'entourage du club. Kotkaniemi est à Montréal pour y rester.

Autre indicateur important, le temps d'utilisation. Quand on se prépare à rétrograder un jeune, son temps de jeu diminuera inévitablement.

Outre le match contre les Penguins de Pittsburgh, il y a dix jours (11:24), Kotkaniemi n'a jamais joué moins de 14 minutes par rencontre en moyenne. Samedi, à Ottawa, ses 14:58 le plaçaient à seulement 12 secondes de son sommet en saison.

Prenez Victor Mete l'an dernier. À ses dix premiers matchs, il n'a jamais joué moins de 16 minutes. Il a même disputé quatre matchs consécutifs de 20 minutes et plus à la mi-octobre.

Puis, début novembre, son temps d'utilisation a chuté à dix minutes et moins. Le temps était venu de le prêter à l'équipe nationale junior canadienne en prévision du Championnat du monde.

Mete avait disputé 28 matchs avant de rejoindre l'équipe canadienne. On aurait pu le laisser dans les rangs juniors pour éviter l'autre barrière contractuelle, celle des 40 matchs. Mais on l'a ramené et il a finalement pris part à 49 matchs.

À compter de 40 matchs, un jeune joueur vient de gagner une année supplémentaire d'autonomie. Prenons Kotkaniemi en exemple. S'il dispute dix matchs cette saison, on «brûle» une année de son contrat d'entrée dans la LNH et le Canadien doit lui soumettre une nouvelle offre de contrat (souvent des offres qualificatives) dans deux ans plutôt que trois.

Et si Kotkaniemi dispute au moins 40 matchs dans la Ligue nationale cette saison, non seulement la première année de son contrat s'envole-t-elle, mais il aura droit à l'autonomie complète dans sept ans, à 25 ans, contrairement à 26 ans s'il joue 39 matchs ou moins. Le seuil de dix matchs n'a pas d'incidence sur l'autonomie.

Voilà pourquoi plusieurs organisations ne font pas grand état de la barre des dix matchs. «Pour plusieurs équipes désormais, les dix matchs ne changent pas grand-chose, me confiait ce matin le gestionnaire d'un club de la LNH sous le couvert de l'anonymat. Pour notre part, nous n'aimons pas "brûler" une année de contrat recrue si nous ne sommes pas convaincus que le jeune rendra notre équipe meilleure, mais chacun pense différemment.»

Le seuil des 40 matchs ne fait pas frémir les équipes non plus. Du moins pas le Canadien, qui n'a pas hésité à en donner 49 à Mete l'an dernier.

«Les 40 matchs ne changent plus grand-chose non plus aujourd'hui, ajoute notre interlocuteur. Les bons jeunes joueurs signent désormais des ententes à long terme très rapidement comme s'ils étaient déjà joueurs autonomes sans compensation.»

En effet, Kotkaniemi, si sa carrière se déroule comme prévu, pourrait très bien signer dans deux ans une entente à long terme de huit ans avec l'équipe, de façon à repousser son autonomie à 28, 29 ans. Ou encore, si on n'est toujours pas convaincus de son impact, signer une entente passerelle de deux ou trois ans comme l'ont fait P.K. Subban et Alex Galchenyuk, avant d'accepter un contrat à long terme.

Le talent n'a pas d'âge. Kotkaniemi, 18 ans, rend l'équipe supérieure à l'heure actuelle. Il a trois points en sept matchs. Une fiche de +3. Il vient au neuvième rang chez les attaquants de l'équipe au chapitre de l'utilisation. Il a sa place au sein de la deuxième vague de supériorité numérique.

Sa présence au centre du troisième trio avec Joel Armia et Paul Byron amène une belle profondeur à l'équipe et permet d'alléger le fardeau des deux autres centres offensifs, Max Domi et Philip Danault.

Personne ne peut prendre la place de Kotkaniemi à l'heure actuelle sur un tel trio. Tomas Plekanec est blessé et Matthew Peca a encore beaucoup de choses à prouver.

Le Canadien ne fait pas exception. Les quatre premiers choix au repêchage de 2018, Rasmus Dahlin, Andrei Svechnikov, Kotkaniemi et Brady Tkachuk ont entamé l'année dans la LNH. Le défenseur Evan Bouchard, 10e au total à Edmonton, y est également, tout comme le centre Isac Lunderstrom, 23e choix au total à Anaheim.

«C'est fascinant à quel point la Ligue a changé en cinq ans, ajoute notre source. C'est tellement rapide maintenant. Les jeunes entrent dans la LNH à 18, 19, 20 ans. Ils ont tous suivi des cours de patinage de puissance et de maniement de rondelles, ce qui rend leur niveau technique tellement supérieur par rapport à l'ancienne génération. Les carrières seront plus courtes. Ça va devenir difficile de jouer dans la ligue à 30 ans...»

Le Canadien semble l'avoir compris cet été. S'agit de ne pas l'oublier!