Trevor Timmins a reçu une volée de bois vert à la suite du repêchage de 2007.

Il avait osé ignorer des vedettes locales, Angelo Esposito, David Perron et Keven Veilleux au profit d'un défenseur issu d'une école secondaire du Minnesota, un certain Ryan McDonagh, un attaquant Américain anonyme du Connecticut, Max Pacioretty, et un défenseur ontarien, P.K. Subban, sympathique, certes, mais pas désiré autant que les Québécois.

J'avais levé la main à l'époque pour défendre Timmins et le Canadien. Non pas pour vanter ses choix, mais pour inciter les fans (et certains médias) à la patience et les inviter à faire leurs devoirs puisqu'ils critiquaient des choix qu'ils n'avaient jamais vus à l'oeuvre.

Cinq ans plus tard, un spécialiste sur NHL.com a refait ce repêchage. McDonagh, Subban et Pacioretty figurent parmi les huit meilleurs joueurs de cette cuvée.

À mon grand étonnement, c'est la réaction inverse cette année. Un vent d'enthousiasme inégalé souffle sur le Montréal sportif.

Trevor Timmins est pourtant toujours en poste et le Canadien a repêché un attaquant américano-russe en première ronde, suivi d'un Suédois chétif, d'un défenseur robuste de Saskatoon, d'un attaquant Français, d'un centre ontarien et d'un seul p'tit Québécois, choisi en cinquième ronde.

Je dois lever la main à nouveau, mais dans le contexte inverse : pourquoi s'emballer ainsi pour des joueurs que la grande majorité des fans n'ont jamais vus à l'oeuvre ?

Il est vrai qu'Alex Galchenyuk, repêché au troisième rang, est un centre dont le grand talent est reconnu par la vaste majorité des observateurs de la scène du hockey. Sebastian Collberg, choisi en deuxième ronde, a été l'attaquant le plus productif de la Suède au Championnat mondial junior malgré son jeune âge.

Mais d'entendre certains partisans parler de vol dans le cas de Dalton Thrower, Tim Bozon et Brady Vail incite votre chroniqueur à recommander un peu de retenue.

Comment peut-on déclarer des gagnants à ce repêchage alors que le développement des espoirs demeure tellement aléatoire ?

Qui avait eu le flair de déclarer en juin 2006 que Claude Giroux deviendrait la grande découverte de ce repêchage ?

Qui avait osé prétendre en 1999 que Patrick Stefan, repêché premier, deviendra un flop mémorable avec Atlanta, mais que Martin Havlat, repêché au 26e rang par Trevor Timmins (alors avec les Sénateurs), et surtout Henrik Zetterberg, repêché en septième ronde, seraient parmi les meilleurs joueurs de ce repêchage ?

Non seulement vante-t-on les choix de Timmins, mais on semble même l'avoir réhabilité. Voilà pourtant un homme que plusieurs espéraient voir congédié à l'arrivée de Marc Bergevin.

Qu'a-t-il fait de si spectaculaire entre le 2 mai et le 23 juin ? Le béton a pourtant remplacé la glace depuis trois mois au Centre Bell.

Tout est affaire de perceptions, voyez-vous. Marc Bergevin est encore en lune de miel à Montréal, il est francophone et populaire, ses premières décisions ont plu et il a publiquement louangé Timmins à maintes reprises. Ce qui constitue un vote de confiance beaucoup plus puissant que celui d'un Pierre Gauthier ou d'un Bob Gainey, par exemple.

En outre, la nouvelle direction du CH laisse finalement Timmins s'exprimer publiquement et les gens découvrent un individu sympathique, drôle, mais aussi confiant.

Il aura sans doute fallu l'aval d'un DG populaire pour qu'on reconnaisse le talent de Timmins qui, malgré seulement deux choix parmi le top dix en dix repêchages, a pu dénicher de nombreux joueurs de qualité, Jaroslav Halak, Alexei Emelin, Mark Streit, Mikhail Grabovski, Carey Price, Guillaume Latendresse, Matt D'Agostini, Sergei Kostitsyn, Ryan McDonagh, Max Pacioretty, P.K. Subban, Yannick Weber et compagnie.

En raison de sa feuille de route, l'optimisme est de mise pour ce repêchage. Mais laissons de grâce les perceptions de côté.