La photo était si virale, c'est à se demander si c'est à cause d'elle que Facebook et Instagram ont été en panne hier après-midi.

On parle ici de la photo d'équipe que les joueurs ont prise dans le vestiaire du Canadien après la victoire de 3-1 sur les Red Wings de Detroit, qui permettait à Carey Price de battre le record de 314 victoires de Jacques Plante dans l'uniforme du Tricolore.

Le compte Instagram du Canadien en a partagé une version; elle a été «aimée» 22 000 fois. Tomas Tatar, Max Domi et Charles Hudon en ont chacun partagé une version. On les distingue essentiellement à la proportion du visage de Nicolas Deslauriers - pourtant dur à manquer dans une photo de groupe! - qui ressort. «C'est parce que les gars avaient encore leurs patins!», plaidait le colosse de 6 pi 1 et 221 lb, après le court entraînement d'hier à Brossard.

La photo s'est faite rapidement, après l'entrevue de la première étoile que Price avait accordée à Marc Denis, mais avant l'ouverture du vestiaire aux journalistes. L'équipe avait déjà eu droit à une première répétition à Los Angeles, après la 314e victoire. Dans les deux cas, c'était l'idée de l'homme masqué.

«Je sais que ce record veut dire beaucoup à ses yeux. Il a vécu plusieurs choses dans cette ville et avec cette équipe», a indiqué Brendan Gallagher.

Ce n'était qu'une photo, mais on sentait bien l'enthousiasme qu'elle suscitait. D'abord, parce qu'un record de victoires, comme Price l'a souvent rappelé, c'est aussi un record collectif. Ensuite, parce que ça brisait un peu les vieilles habitudes qui sont solidement ancrées, rendu au 70e match de la saison. C'était une belle occasion de souligner différemment un triomphe.

«Depuis le début de la saison, c'est comme ça, notre chimie est incroyable. C'est ce qui fait qu'on gagne beaucoup de matchs. Ça peut nous amener très loin», estimait Phillip Danault.

Parlant de chimie, cette photo a permis d'unir tout le monde, même ceux qui sont confinés à la passerelle depuis quelques semaines. C'est d'ailleurs le téléphone de Hudon qui a servi à prendre quelques-uns des clichés.

«C'est le fun d'être avec un joueur dont le nom sera gravé dans l'histoire. Et ça arrive à un moment où on a besoin de victoires», a rappelé Hudon.

La rotation

Le téléphone de Hudon, Deslauriers en souliers plutôt qu'en patins... À travers les moments de réjouissance, ces petits indices nous rappellent aussi qu'on arrive à ce stade de l'année où certaines situations individuelles deviennent plus difficiles.

Depuis la date limite des transactions, les équipes ont le droit d'excéder la limite des 23 joueurs dans la formation, pour peu qu'elles respectent le plafond salarial. La marge de manoeuvre du CH à cet effet a été largement documentée. Et il n'y a personne sur la liste des blessés.

C'est pourquoi on voit tant de joueurs en habit sur la photo. Ils étaient six à avoir été laissés de côté pour le match de mardi. Pour les joueurs affectés au quatrième trio, la rotation devient plus cruelle.

Hudon ratait mardi son neuvième match de suite. D'ailleurs, quand on l'a approché pour l'interroger sur la photo, il était justement heureux de parler de ça, et non pas de son sort.

Deslauriers a été retranché pour la 11e fois en 12 matchs. L'arrivée de Nate Thompson, Jordan Weal et Dale Weise lui a fait mal.

Parlant de Weise, il a lui aussi sauté son tour mardi. Matthew Peca a raté les sept derniers matchs. Même Jesperi Kotkaniemi a dû céder sa place deux fois. Et le récent rappel du gardien Charlie Lindgren porte à croire qu'Antti Niemi devra peut-être lui aussi assister à des matchs en costard.

«Je ne sais pas si tu peux être à l'aise dans une telle situation, a admis Weise. Mais les choses se passent comme ça quand tu as 16 attaquants en santé. Tu ne veux pas laisser des joueurs de côté trop longtemps. J'ai souvent composé avec ça dans ma carrière, donc ce n'est rien de nouveau.»

«L'équipe va bien dernièrement. De notre côté, c'est dur de regarder les matchs d'en haut, de ne pas jouer, a ajouté Deslauriers. Mais quand l'équipe va bien, l'ambiance dans le vestiaire est le fun.

«Je dois vivre avec ça. Je ne peux rien changer, je ne contrôle pas ça. Mais dans le gym, je fais de l'extra, donc je reste prêt si l'équipe a besoin de moi.»

Weal jouit de la pleine confiance de l'entraîneur jusqu'ici. Il a disputé les quatre derniers matchs du CH, avec un temps d'utilisation moyen de près de 16 minutes. Il compte un but, une passe, déjà 11 tirs au but, et gagne 65% de ses mises au jeu. Il sera difficile à déloger s'il continue ainsi.

Thompson a participé aux 14 matchs du CH depuis son arrivée à Montréal. Il présente un différentiel de -5 et n'a toujours pas marqué, mais il gagne 57% de ses mises en jeu et Claude Julien continue à l'employer 13 minutes par match.

Julien insiste sur l'importance de pouvoir déployer quatre trios en tout temps depuis le début de la saison. Et à l'entendre parler hier, on devine que la rotation continuera tant qu'il n'obtiendra pas satisfaction. Surtout à 12 matchs du fil d'arrivée, en pleine course aux séries.

«On n'a pas les supervedettes que les autres équipes ont, qui font la bonne majorité de ce qu'ils doivent accomplir pour gagner. Nous, on le fait en groupe. Si on a trois trios qui fonctionnent, mais pas le quatrième, ce n'est pas assez pour nous.»