Contrairement à son entraîneur-chef Claude Julien et à son président Cam Neely qui sont sortis de la défaite de 2-0 aux mains du Canadien plus meurtris que bien des joueurs des Bruins, le directeur général Peter Chiarelli n'affichait pas de meurtrissures. Du moins, elles n'étaient pas apparentes.

«Je garde ça en dedans. Je suis peut-être aussi d'une nature un peu plus calme que celle de Claude et Cam»,  lance l'architecte de la reconstruction des Bruins lors d'un entretien avec La Presse après l'entraînement de son équipe vendredi.

«Ça ne veut pas dire que je suis sorti indemne de ce premier match. C'était frustrant de voir que nous n'arrivions pas à marquer et à prendre le contrôle. Mais c'est la nature du hockey. Nous visons la coupe Stanley. Pour l'obtenir il faut être en mesure de rebondir après des sorties difficiles comme celle d'hier. Nous y arriverons.»

Malgré ses 46 ans, Peter Chiarelli complète sa cinquième saison à la tête des Bruins. Cinq saisons au cours desquelles il est loin d'avoir chaumé.

Les partisans doivent à cet avocat qui fut d'abord responsable du contentieux et directeur général adjoint des Sénateurs d'Ottawa, les embauches de Zdeno Chara, Marc Savard et de Michael Ryder à titre de joueurs autonomes.

Ils lui doivent aussi, et surtout, une quarantaine de transactions qui ont permis de changer et rechanger la face des Bruins. Outre Chara et Ryder, onze des 18 autres joueurs qui affrontent le Canadien ce printemps ont été acquis par le biais de transactions concoctées par Chiarelli. Nathan Horton, Tomas Kaberle, Andrew Ferrence, Dennis Seidenberg, Mark Recchi, Gregory Campbell, Daniel Paille, Chris Kelly, Rich Peverley, Adam McQuaid et Tuukka Rask - sa première acquisition - sont le fruit du travail de ce diplômé de Harvard (Économie). De ce groupe, six n'étaient pas ici en lever de rideau de la saison que les Bruins souhaitent prolonger le plus longtemps possible.

En plus d'apprendre à jongler avec des millions sur les bancs de l'une des plus prestigieuses universités au monde, Chiarelli a défendu les couleurs de l'équipe de hockey pendant quatre saisons. Au fil de sa carrière avec les Crimson, il a récolté 49 points en 70 rencontres en plus d'assumer le rôle de capitaine et de partager le vestiaire avec Don Sweeney, un ancien des Bruins. Chiarelli a ensuite mis le cap sur l'Europe où il a joué une saison avant de rentrer à Nepean, en banlieue d'Ottawa, pour y faire ses études de droit et accéder au barreau.

Partisans impatients

Les Bruins ont remporté leur dernière coupe Stanley en 1972. De très bonnes équipes se sont depuis succédées au Garden, mais elles n'ont jamais pu offrir le précieux trophée à des partisans qui commencent à s'impatienter. Les Bruins ont d'ailleurs été copieusement hués en troisième période jeudi. Ils le seront davantage samedi si le Canadien gagne un deuxième match de suite en terrain hostile.

Après sa première saison à Boston, Chiarelli a raté les séries. Il a congédié son entraineur-chef (Dave Lewis) qu'il a remplacé par Claude Julien.

Depuis, les deux hommes ont toujours accédé aux séries. Ils ont même connu une saison de 116 points - la deuxième de l'histoire après les 119 points récoltés lors de la dernière conquête en 1971-1972 - en 2008-2009. Malgré tout, ils n'ont jamais franchi la deuxième ronde.

Mardi, à l'aube de la 33e série opposant Boston et Montréal, Chiarelli a déclaré que personne ne pourrait se satisfaire si les Bruins tombaient avant la finale d'association. Un commentaire qui a été comparé à une épée brandie au dessus de la tête de son coach.

«Je te l'ai dit tout à l'heure. On vise la coupe Stanley. Les changements apportés nous permettent de compter sur une équipe capable de se rendre jusqu'au bout. Ma remarque n'était pas une analyse du travail de Claude, mais bien un objectif réaliste en fonction de notre potentiel», plaide l'avocat de carrière.

De fait, dans les coulisses du Garden, on soutient que Chiarelli doit remplir ses propres objectifs sans quoi il pourrait aussi payer de son job une autre élimination hâtive. Avec sa feuille de route, il ne serait toutefois pas au chômage bien longtemps.

Kessel : la pièce maitresse

S'il est fier d'une majorité de ses transactions, Peter Chiarelli convient que celle qui a envoyé Phil Kessel à Toronto en retour de deux premiers choix au repêchage - Tyler Seguin l'an dernier et la 9e sélection l'été prochain - et d'un choix de deuxième ronde l'an dernier (Jared Knight) fut la pièce maitresse de cette reconstruction.

«Il est toujours difficile de se départir d'un joueur de la trempe de Phil. Mais il ne voulait plus jouer à Boston et le salaire qu'il réclamait m'aurait empêché de respecter le plafond salarial. David Krejci et d'autres jeunes étaient prêts à prendre la relève. Ma philosophie est simple : je veux que mes équipes soient un mélange d'expérience et de jeunesse, de talent et de robustesse. C'est ce que nous avons. Le repêchage nous a donné les Bergeron, Krejci, Lucic, Marchand, Chara est venu du marché estival et les récentes transactions nous ont donné talent et expérience avec des gars comme Horton, Kaberle et Kelly. Il faut maintenant gagner.»