L'année qui s'achève a encore vu un nombre important de joueurs quitter la glace sur une civière, ou encore aux bras de coéquipiers, victimes d'une commotion cérébrale.

Brent Burns, Pierre-Marc Bouchard, Petr Sykora, Robert Nilsson, Steve Staios, Paul Kariya et Andrej Lilja sont toujours à l'écart en raison de commotions cérébrales. Jonathan Toews, Matt D'Agostini, Chris Drury et Sheldon Souray ont eu à s'absenter pendant une longue période. Avant eux, deux des meilleurs joueurs québécois, Patrice Bergeron et Simon Gagné, auraient pu voir leur carrière écourtée à cause de coups à la tête.

Dans une majorité de cas, les agresseurs n'ont pas été punis, ou si peu. Mike Richards, des Flyers de Philadelphie, n'a pas été suspendu à la suite de sa mise en échec sauvage aux dépens de David Booth, des Panthers de la Floride, l'une des vedettes montantes de la LNH. Booth n'est pas revenu au jeu depuis sa mésaventure survenue le 25 octobre.

Un joueur a nettement plus de chances de subir les foudres de la Ligue nationale en critiquant les arbitres ou en insultant la copine d'un joueur qu'en tentant d'assommer un adversaire avec un coude en plein visage.

Les autorités de la Ligue, Gary Bettman en tête, semblaient figées dans un immobilisme déconcertant jusqu'à tout récemment, mais voilà que les choses bougent depuis quelques semaines.

Le DG des Red Wings de Detroit, Ken Holland, a donné le ton début novembre en affirmant avant la rencontre des directeurs généraux de la Ligue nationale qu'il entendait proposer un règlement pour interdire les mises en échec données par des joueurs provenant d'un angle mort, comme celle qui a assommé Booth. Son bras droit Steve Yzerman l'a aidé dans sa croisade.

À la surprise générale, les directeurs généraux sont allés plus loin. Ils ont décidé de former un comité pour analyser la situation et on laisse sous-entendre que tout coup à la tête, même donné avec l'épaule, pourrait désormais être interdit dès la prochaine saison.

Une volte-face étonnante compte tenu du fait que les directeurs généraux n'avaient pas répondu, en mars, à l'appel de l'Association des joueurs de la Ligue nationale qui a demandé à la LNH de bannir tout coup à la tête.

Juste avant le début du congé des Fêtes, une étude publiée par les chercheurs de l'Université de Boston a donné encore plus de poids aux arguments de ceux qui cherchent à éliminer les coups à la tête dans le hockey. Les scientifiques ont analysé les tissus du cerveau de l'ancien hockeyeur Reggie Fleming, victime de multiples commotions cérébrales au cours de sa carrière, et conclu qu'il souffrait d'une maladie dégénérative du cerveau. La détérioration de son cerveau était semblable à celle d'une douzaine de footballeurs et de cinq boxeurs dont on a analysé les cas. C'était la première fois qu'on pouvait mesurer les effets à long termes de commotions cérébrales chez un hockeyeur.

Compte tenu du nombre de joueurs qui subissent une commotion dans la Ligue - qui ne semble pas diminuer avec les années - et des résultats d'une telle étude, on se demande désormais comment la LNH pourra reculer.

L'ancien hockeyeur des Flyers de Philadelphie, Keith Primeau, qui a été contraint à la retraite en 2006 à la suite d'une énième commotion cérébrale, et qui n'est pas encore complètement rétabli aujourd'hui - il doit restreindre ses activités physiques - s'est dit pour la première fois encouragé par les initiatives de la Ligue, au cours d'une entrevue accordée ces derniers jours à l'agence Associated Press.

«Si vous m'aviez posé la question il y a quatre mois, ma réponse aurait été une réponse de frustration, parce que je ne croyais pas qu'il pouvait prendre une initiative dans ce dossier, a confié Primeau, qui lèguera son cerveau à la science à sa mort. Mais cette réunion des directeurs généraux m'encourage parce qu'ils ont un plan. Ce plan pourrait prendre du temps à être appliqué parce qu'ils sont 30 directeurs généraux, mais c'est un pas dans la bonne direction.»

Primeau estime qu'il ne serait pas compliqué d'instaurer un nouveau règlement pour enrayer de tels coups. «C'est la même chose que d'interdire les mises en échec par derrière. Les joueurs sauront s'ajuster.»

La LNH aurait un modèle puisque la Ligue de hockey junior de l'Ontario a déjà instauré un règlement qui interdit tout coup porté à la tête. Ça ne serait pas la première fois qu'une ligue junior agit à titre de précurseur puisque la Ligue de hockey junior majeur du Québec a mis sur pied un système antidopage avant la Ligue nationale.

La LNH a perdu des joueurs de la trempe d'Eric Lindros, Pat LaFontaine, Mike Richter, Jeff Beukeboom, Primeau et plusieurs autres en raison de commotions cérébrales. Ils ne seront pas les derniers si la Ligue ne passe pas à l'action. Espérons que l'année 2010 sera celle où l'on annoncera la fin des coups à la tête, et le début d'une ère plus sécuritaire, mais pas moins spectaculaire pour autant, dans le hockey.