Dans la tête d'Anthony Mantha, c'est comme si c'était hier. Il se rappelle très bien le moment où les Red Wings de Detroit lui ont annoncé qu'il ne serait pas retenu avec l'équipe cette saison. C'était l'automne dernier. L'as marqueur était dans un avion entre Pittsburgh et Detroit. Et il avait devant lui deux des plus grands cerveaux du hockey.

«Quand tu as Mike Babcock et Ken Holland assis devant toi, tu écoutes!», note Mantha, 19 ans.

Alors, il a écouté. L'entraîneur et le directeur général des Red Wings ont été concis avec leur jeune espoir, 20e choix au total du dernier repêchage: Mantha doit polir son jeu défensif et il doit travailler fort tous les jours.

«Ils appellent ça être un "every-dayer". C'est la mentalité de l'équipe», raconte le Québécois au bout du fil.

Mantha a donc mis le cap sur Val-d'Or avec la ferme intention d'envoyer un message assez fort pour être entendu jusqu'à Detroit. Le résultat? Une saison de rêve avec les Foreurs. Le joueur originaire de Longueuil a été le meilleur compteur de la LHJMQ avec 120 points en 57 matchs (57 buts et 63 aides). Dans tout le pays, un seul joueur a fait mieux, Connor Brown, un espoir des Maple Leafs de Toronto, qui a accumulé huit points de plus dans la Ligue de hockey de l'Ontario.

Au Championnat du monde junior en janvier, Mantha a fait des flammèches aux côtés de Jonathan Drouin. Il a été le meilleur compteur de l'équipe canadienne et le quatrième du tournoi.

«Mon but était de connaître une meilleure saison que l'an passé. Mais est-ce que je m'attendais à une saison comme cette année? Honnêtement, peut-être pas, dit-il. Mais j'ai travaillé fort toute l'année pour y arriver.»

Un modèle nommé Eric Staal

Mantha se concentre maintenant sur la série de deuxième ronde entre les Foreurs et les Voltigeurs de Drummondville. Mais il ne cache pas qu'il pense déjà au prochain camp d'entraînement des Red Wings.

«Je vais tout faire pour percer l'alignement. Si je n'y arrive pas, alors j'aimerais aller faire mes preuves dans la Ligue américaine, note-t-il. Il peut y avoir une blessure, une ouverture et je devrai être prêt à saisir ma chance dans la LNH.»

Anthony Mantha a plusieurs cartes dans son jeu. Il y a sa dernière saison, bien sûr, qui l'a positionné comme l'un des meilleurs espoirs offensifs. Mais il y a aussi sa taille. À 6 pi 5 po et 205 lb, Mantha est exactement le type de joueur qui pourrait aider les Red Wings.

La formation de Mike Babcock compte huit joueurs d'attaque de moins de 6 pi, contre six pour le Canadien. À seulement 19 ans, Mantha devrait aller chercher quelques livres durant les prochains étés. Pourrait-il devenir un attaquant de puissance?

«Je pense que oui. Mais je ne me mets pas de stress là-dessus. Je travaille avec le même préparateur physique depuis cinq ans. Je sais que je vais prendre du poids dans les prochaines années, ça va venir avec le temps», croit-il.

Mantha s'inspire du style d'Eric Staal, des Hurricanes de la Caroline. «C'est un modèle à suivre pour moi. Il est capable de faire la différence dans un match à l'attaque, mais en même temps, il est très fort défensivement et en désavantage numérique aussi.»

À sa première saison dans la LNH en 2003-2004, Staal a disputé 81 matchs et amassé 31 points. Quatre-vingt-un matchs! Mantha y rêve mais n'en demande pas tant: il espère simplement avoir sa chance.

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Sur les traces de son grand-père

Anthony Mantha et les Red Wings de Detroit, c'est en quelque sorte une histoire de famille. Car s'il joue un jour pour l'équipe, l'espoir québécois va marcher dans les pas de son grand-père.

Au début des années 60, après cinq saisons dans l'uniforme du Canadien et trois autres dans celui des Bruins de Boston, André Pronovost a revêtu le chandail rouge et blanc des Red Wings.

«Il était vraiment excité que les Red Wings me repêchent, raconte Anthony Mantha. On ne s'y attendait vraiment pas.»

André Pronovost, aujourd'hui âgé de 77 ans, a accompagné son petit-fils au repêchage, au New Jersey. Mantha explique que, pour lui, c'était une manière de vivre son repêchage par procuration. «Parce que, dans le temps, il n'y en avait pas!»

L'espoir des Red Wings dit avoir beaucoup appris de son ancien Glorieux de grand-père.

« Il a eu un grand impact. Depuis que je suis jeune, mon père et lui m'entourent beaucoup. Les deux m'ont suivi partout dans les arénas, ont joué dehors avec moi, m'ont montré comment patiner et jouer au hockey. »

Même aujourd'hui, son grand-père lui prodigue encore de petits conseils : comment positionner son corps, manier son bâton, appliquer son coup de patin...

Avec une expérience de 12 saisons dans la LNH, Pronovost a vu neiger. Mais parions qu'il ne croyait pas voir un jour son petit-fils repêché par son ancienne équipe.

Photo archives La Presse

André Pronovost (en arrière à droite), le grand-père d'Anthony Mantha, lors de la conquête de la Coupe Stanley par le Canadien en 1958.