Quand on donne à Michael Schumacher l'occasion de se sauver avec la victoire, il est rare que l'as du volant allemand n'en profite pas.

Quand on donne à Michael Schumacher l'occasion de se sauver avec la victoire, il est rare que l'as du volant allemand n'en profite pas.

Dans des conditions difficiles, sur une piste détrempée qui s'est progressivement asséchée, Schumacher a piloté hier avec toute la maestria dont il est capable pour remporter le Grand Prix de Chine, devant les Renault de Fernando Alonso et Giancarlo Fisichella.

Renault avait pourtant tous les atouts en main au départ de la course pour porter un dur coup aux espoirs de Schumacher de remporter un huitième et dernier championnat du monde.

Alonso et Fisichella en première ligne, une piste mouillée parfaite pour les Michelin et Schumacher coincé en sixième place sur la grille: difficile de demander mieux.

Mais l'écurie française a mal joué ses cartes. Mauvaise stratégie pour les pneumatiques d'Alonso, légère maladresse de Giancarlo Fisichella à la sortie de son deuxième arrêt aux stands, mécanos qui mettent une éternité et demie à changer une roue: sans ces multiples erreurs, l'indéniable brio de Schumacher n'aurait probablement pas suffi à lui procurer la 91e victoire de sa carrière.

Pour Renault, le fait qu'Alonso et Fisichella aient complété le podium a des allures de prix de consolation. «Nous ne cherchons pas d'excuses aujourd'hui, a dit le directeur technique de l'écurie française, Pat Symonds. Nous aurions dû gagner cette course. Le fait que nous ayons échoué est profondément frustrant pour toute l'équipe.»

Dans la première partie de la course, sur piste humide, Alonso n'a eu aucun mal à creuser l'avance sur ses poursuivants. Après 10 tours, il disposait déjà d'un coussin de plus de 22 secondes sur Schumacher. L'Allemand a toutefois progressé lentement mais sûrement au sein du peloton. Il était troisième après 17 tours, derrière Fisichella.

Schumacher s'est arrêté pour ravitailler au 21e tour, mais a gardé le même train de pneus. Une sage décision qu'Alonso, malheureusement pour lui, n'a pas imitée quand il est lui-même rentré aux stands, un tour plus tard. Il a fallu près de 10 tours à ses nouveaux pneus intermédiaires pour devenir suffisamment lisses et performants. Entre-temps, l'Espagnol a perdu trois à quatre secondes par tour. Fisichella, mais surtout Schumacher (dont les Bridgestone étaient particulièrement performants sur une piste qui s'asséchait rapidement) sont revenus dans sa roue.

«C'est une course difficile pour l'équipe car nous avons gaspillé une très bonne occasion, a dit Alonso. J'avais une bonne avance après 20 tours, mais mes pneus étaient très usés. Nous avons décidé de changer les pneus avant pour des neufs, mais c'était une erreur. Fisi et Michael, qui avaient gardé leurs pneus d'origine, ont été beaucoup plus rapides que moi.»

Alonso omet de préciser que l'usure de ses pneus résultait vraisemblablement du fait qu'il avait trop poussé la voiture dans le premier tiers de la course. Une stratégie légèrement plus conservatrice lui aurait probablement permis de garder le même train de pneus à son premier arrêt.

Quoi qu'il en soit, Alonso a dû céder la tête à Fisichella au 30e tour. Quelques secondes plus tard, Schumacher l'a aussi dépassé. Puis, au 41e tour, fraîchement chaussé de pneus pour le sec, Fisico a été incapable de maintenir sa trajectoire à la sortie des puits. Schumacher, qui s'était arrêté un tour plus tôt, en a profité pour lui faire l'intérieur dans le premier virage.

«Le moment crucial s'est produit là, a commenté Schumacher. Je savais que j'aurais une occasion de dépasser Fisichella au premier virage même s'il sortait des puits devant moi, car il aurait de la difficulté à faire monter ses pneus en température- et c'est ce qui s'est produit.»

Chez Renault, certains avaient une interprétation un peu moins charitable. «(Fisichella) est sorti des stands largement devant Schumacher, a souligné le directeur de l'exploitation moteur, Denis Chevrier. Il n'y avait qu'une trajectoire sèche. Il fallait s'ingénier à rester sur cette trajectoire, car ça aurait été mission impossible pour quelqu'un (lire Schumacher) qui arrivait avec des slicks d'essayer de le dépasser sur le mouillé.»

Quant à Alonso, son second arrêt aux puits lui a coûté une dizaine de secondes supplémentaires, en raison d'un problème lors du changement de la roue arrière droite. Le champion en titre a ensuite enfilé les tours rapides, mais c'était trop peu, trop tard, et il n'a pu que dépasser Fisichella, sans pouvoir s'approcher de Schumacher.

Malgré les points, c'est une journée que Renault préférera sans doute oublier.