Roseline Filion avait prévu un dernier tour de piste aux Championnats du monde de Budapest, l'été prochain. La double médaillée olympique a plutôt choisi de devancer ses plans de retraite.

Après 20 ans dans le plongeon, dont 12 avec l'équipe nationale, Filion a annoncé sa décision de se retirer au gala annuel de Plongeon Canada, vendredi soir à Ottawa.

L'événement s'est transformé en un « festival de larmes », aux dires de la nouvelle retraitée, qui a été l'objet d'un hommage surprise.

« Ça allait bien jusqu'à ce que Meg se mette à pleurer ! a dit Filion au sujet de son inséparable partenaire de synchro Meaghan Benfeito. J'ai flanché aussi et c'était fini pour le reste de la soirée ! Ç'a été vraiment fort en émotions. Je m'attendais à verser des larmes, mais pas à ce qu'autant de gens pleurent avec moi. »

Deux jours plus tard, au téléphone, la femme de 29 ans était encore « à moitié excitée et tout à l'envers » après l'officialisation de ce passage important. À son retour de Rio, elle a mûri sa décision pendant trois mois. Elle a consulté Benfeito et Jennifer Abel, des amies et coéquipières, et son entraîneur Arturo Miranda. Elle a aussi passé quelques coups de fil à Alexandre Despatie, qui lui a conseillé de prendre son temps.

En retournant à la piscine et dans le gym pour le plaisir, elle a compris que l'idée de poursuivre sa route jusqu'aux prochains Mondiaux ne l'allumait plus autant.

« Peut-être remporter une autre médaille, est-ce vraiment ça que je cherche, est-ce encore assez fort ? » s'est-elle demandé. 

La façon dont j'ai terminé les Jeux, c'était le summum pour moi. J'en suis très contente. Les plongeons étaient parfaits... à part un ! C'est cette image de mes plongeons que je veux garder dans ma tête. »

Sixième de l'épreuve individuelle à Rio, en dépit d'un plongeon raté en finale, Filion a remporté une deuxième médaille de bronze olympique avec Benfeito en synchro. Quelques mois après le début de son association, le duo s'était révélé en finissant troisième aux Mondiaux de Montréal, en juillet 2005. Roseline Filion venait tout juste d'avoir 18 ans.

En 2008, la native de Laval a participé à ses premiers JO à Pékin, terminant 7e en synchro. Médaillée de bronze en synchro et 10e à la plateforme à Londres, en 2012, elle pensait avoir atteint son sommet. Un nouvel environnement d'entraînement au Parc olympique lui a fait franchir un autre palier. Elle a gagné une première médaille d'or individuelle aux Séries mondiales de Londres en mai 2015.

Son parcours vers les Jeux de Rio a pris une tournure dramatique quand elle s'est fracturé un os du talon. Pendant quelques semaines, elle a craint de ne pas se remettre à temps.

« Ç'a été une année extrêmement difficile sur le plan de l'insécurité, a-t-elle rappelé. Finalement, ç'a marché aux Jeux. Ça n'a pas paru du tout que j'avais été blessée. Au contraire, j'ai été meilleure. C'est le fruit du travail de toute l'équipe extraordinaire qui m'a entourée. »

Transition

Inspirée par la médaille de bronze d'Annie Pelletier aux Jeux d'Atlanta en 1996, Roseline Filion a commencé le plongeon à l'âge de 9 ans. Elle a rapidement rejoint une équipe canadienne forte menée par Despatie et Émilie Heymans. Elle a porté le flambeau après la retraite de ces deux icônes en 2012.

Sereine par rapport à l'avenir, Filion a bien préparé sa transition. Elle termine cette semaine une formation professionnelle en radio et télévision et poursuit son baccalauréat en communications à l'Université de Montréal. Elle gère aussi Immersia, une entreprise familiale de jeux d'évasion dans le quartier industriel de Laval. Plongeon Canada a également des projets pour elle dans son service des relations avec les médias.

« Je ne veux pas remplir mon horaire tout de suite et prendre mon temps, parce que je veux relaxer », dit-elle pourtant.

Photo Frank Gunn, archives La Presse canadienne

Meaghan Benfeito et Roseline Filion aux Jeux olympiques de Rio