Personne ne pourra accuser Maurice Montreuil et Ron O'Neil de manquer d'assiduité à la tâche.

Cela fait maintenant plus de 50 ans que les deux hommes travaillent comme bénévoles aux Régates de Valleyfield, qui célébraient cette année leur 75e anniversaire. Bon an, mal an, ils sont à pied d'oeuvre pour s'assurer du bon déroulement des courses. Et pour vivre pleinement ce qui les anime.

«C'est une maladie. Une vraie drogue», lance fièrement M. Montreuil.

Ils ont tous deux été aux premières loges pour assister à l'évolution des Régates, de l'époque des courses de voiliers jusqu'aux hydroplanes d'aujourd'hui, véritables bolides de Formule 1 des eaux.

«On appelle ça un hydroplane, mais c'est beaucoup plus "plane" qu'hydro», souligne M. O'Neil. Une rafale et le bateau est à l'envers!»

Après un demi-siècle de loyaux services, le tandem pourrait bien décider d'opter pour une retraite bien méritée. Mais ça ne semble pas faire partie de ses options.

«Si le bon Dieu le veut, je serai encore là!», assure M. O'Neil sans hésiter.

Une notoriété pour la région

C'est justement dans le travail et le dévouement des quelque 350 bénévoles que réside le secret de la longévité des Régates, estime le directeur général, Michel Poirier.

Ça, et sans doute aussi grâce à un brin de résilience et de créativité. Car même la Deuxième Guerre mondiale n'aura pas réussi à forcer ce happening nautique à jeter l'ancre.

«Dans les années 40, les courses de bateau à moteur ont été remplacées par des courses de rameurs en raison des restrictions sur l'essence, raconte M. Poirier. Il n'y a eu aucune interruption depuis 1938.»

Et c'est bien tant mieux pour la région. Non seulement les Régates génèrent-elles des retombées économiques appréciables - environ 6 millions par année -, mais elles contribuent à bâtir la réputation de la ville.

«Depuis toujours, quand tu mentionnes Valleyfield, on l'associe aux Régates partout au Québec, note le DG. C'est l'événement le plus important dans notre région. Les gens le savent, et c'est un moteur de développement touristique important.»

Le public d'abord

Évidemment, il n'y a pas uniquement au sein du personnel que l'on ressent une passion indéfectible pour les Régates. Chez les nombreux spectateurs aussi, qui ont fait fi de la chaleur accablante du week-end pour assister aux courses.

«Notre clientèle est composée à tout près de 70% de locaux, c'est-à-dire de gens demeurant à moins de 40 km de Valleyfield, explique Michel Poirier. Trente pour cent viennent de l'extérieur et, là-dessus, environ 5 % ou 6 % de l'extérieur du Québec.»

Jonathan Boilard, professeur dans une école de Montréal, est l'un de ces fidèles. Difficile de le rater à travers la foule, d'ailleurs. Il se promène vêtu d'un accoutrement semblable à celui d'un amiral britannique d'autrefois, casquette et tunique rouge incluses. Il avoue avoir un peu chaud.

«C'est une fête en soi, indique-t-il. On est 19 de Montréal qui viennent chaque année. Il y en a qui prennent leurs vacances en conséquence.»

«Je dis souvent qu'on ne fait pas cet événement pour les coureurs, on fait un événement pour le public qui vient vous voir, souligne Michel Poirier. C'est sûr qu'en tant que pilotes, ils doivent avoir du plaisir. Mais si c'était juste pour les coureurs, on ne se casserait pas la tête pour avoir cette infrastructure. Quand le public est là, c'est sûr que ça fait plaisir.»

M. Boilard fréquente les Régates depuis sa plus tendre enfance. Qu'est-ce qui l'attire ici année après année?

«La vitesse, le danger du sport, mais aussi l'accessibilité aux pilotes, répond-il. Tu peux t'asseoir dans leur bateau et prendre des photos, contrairement à la Formule 1. Ici, à Valleyfield, les gens sont très accueillants et nous reçoivent bien. Je pense que c'est ce qui fait la différence avec nous autres à Montréal. C'est le 75e anniversaire cette année. Je pense qu'on est encore bons pour un autre 75 ans», affirme-t-il.

À voir la passion et la ferveur qui habitent tout ce beau monde aux Régates, il est tout à fait permis de le croire.