À 50 ans, Luan Jujie est la doyenne des épreuves d'escrime des jeux Olympiques 2008, mais Pékin marque surtout pour cette Canadienne un émouvant retour vers son passé: la Chine n'a pas oublié celle qui lui avait offert l'un de ses tout premiers titres olympiques en 1984.

«Participer aux jeux Olympiques qui ont lieu en Chine, mon pays natal, c'est un rêve devenu réalité pour moi», insiste Mme Luan qui aborde lundi le tournoi de fleuret dames sans grandes illusions, mais avec un enthousiasme tout olympique.

Mon classement final n'est pas le plus important. Ce qui compte, c'est de vivre un rêve», poursuit la Canadienne d'adoption qui s'est installée après les JO-1988 à Edmonton (Alberta) pour entraîner le club d'escrime local.

Depuis qu'elle est arrivée à Pékin la semaine dernière, Luan Jujie a pu constater que sa popularité qui lui avait valu dans les années 1980 du régime communiste d'avoir un timbre frappé à son effigie et un statut particulier, était encore énorme, 24 ans après sa médaille d'or de Los Angeles, la seule jamais remportée en escrime par la Chine.

Sa conférence de presse jeudi a même failli tourner à l'émeute, comme s'il s'agissait d'une star mondiale du football ou d'une des deux icônes du sport chinois, le joueur de basket-ball Yao Ming et le champion olympique du 110 m haies, Liu Xiang.

Pour décrocher son passeport olympique, cette mère de trois enfants a dû refaire toutes ses gammes. Elle est partie s'entraîner en Europe, a écumé des tournois de seconde zone, avant de terminer 3e des Championnats panaméricains 2007.

Une fois qualifiée, la 107e mondiale a peaufiné sa préparation à Nanjing, sa ville d'origine, où une salle d'escrime porte son nom.

«J'ai abandonné mon travail, j'ai fait une croix sur ma vie de famille. Après plusieurs années sans compétition, ma forme physique et mes réactions n'étaient plus aussi bonnes qu'avant», détaille-t-elle dans un entretien au service d'informations des JO-2008.

Luan Jujie savait toutefois à quoi s'attendre: avant les JO-2000, elle était déjà sortie une première fois de sa retraite sportive à 42 ans pour représenter le Canada.

À Sydney, elle avait terminé à la 35e place après une défaite dès le premier tour. Lundi, la fleurettiste canadienne devra, pour faire mieux, battre la Tunisienne Ines Boubakri, championne d'Afrique 2008 et 36e mondiale, âgée de... 19 ans.

«Si cela n'avait pas été à Pékin, je ne me serais jamais relancée dans une telle aventure», assure-t-elle, en promettant de mettre définitivement un terme à sa carrière après Pékin.

Les Luan n'en ont toutefois sans doute pas fini avec les JO: Jerrica, l'une des filles de Jujie, est présentée comme l'un des plus grands espoirs de l'escrime canadienne.